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Révélations sur le coup de filet de Berrechid

Les habitants de Berrechid viennent d'être les auteurs de l'une des plus belles pages de la lutte contre le terrorisme, en aidant, spontanément, à la capture de deux dangereux extrémistes, activement recherchés par les services de sécurité, depuis les odi

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C'est un carrefour stratégique entre la capitale économique du Royaume et les villes d'importance, comme Marrakech, Settat, Khouribga et Béni-Mellal. Célèbre, pour son hôpital psychiatrique à tel point que «aller à Berrechid» signifie dans le langage populaire «aller à l'asile d'aliénés», Berrechid a été fondée, au XIXe siècle, par une famille des Oulad Hariz, sur l'emplacement de l'ancienne Marjana pour contrôler les échanges commerciaux.

Berrechid, c'est historiquement le lieu où ont pactisés les habitants de la Chaouia, pour lutter contre l'invasion étrangère. Une célèbre chanson qui fait partie de notre patrimoine culturel, en fait état. En 1907, la Kasbah de Berrechid a été détruite par un bombardement. Par la suite, l'administration du Protectorat y a construit un hôpital psychiatrique, dans lequel ont été internés des malades venant de toutes les régions du Royaume.

La réputation de la ville était faite : Berrechid signifie depuis, asile de fous. Mais, une chose est sûre, elle ne sera jamais un asile pour terroristes. Hier encore, les habitants de cette ville l'ont démontré, en déclarant avec fierté à la presse qu'ils ont contribué à l'arrestation des " criminels ".

Devant la maison où les éléments de la brigade anti-gangs, dépendant du commissariat central de Berrechid, ont arrêtés les terroristes, des dizaines de citoyens n'hésitent pas à fournir de menus détails sur cette péripétie et dénoncent vigoureusement tout intégrisme et tout recours à la violence.

Une cité administrative française fut donc érigée en 1920 et la majorité des constructions se sont installées tout autour. C'était un petit village modèle. Au cours de la deuxième guerre mondiale, l'installation de la base aérienne américaine à Nouasser, soit à environ une quinzaine de kilomètre de Berrechid, allait donner à la localité une autre dimension. C'est, à ce moment là, qu'apparurent les premiers bidonvilles de la cité et le " village " comme on l'appelait à l'époque, deviendra le refuge de prolétaires, d'ouvriers agricoles saisonniers et de migrants, allant vers des centres où l'on pouvait trouver du travail. Il y a même de nombreux anciens pensionnaires de l'hôpital psychiatrique, qui ont préféré s'installer à Berrechid, plutôt que de retourner chez-eux. Ainsi et jusqu'au début des années soixante dix, elle est restée comme une petite bourgade, une petite ville rurale que l'on traverse sans y prêter attention, ou en racontant, à la rigueur, une histoire de fous. C'est en 1976, que l'évolution de Berrechid allait connaître un nouveau tournant. Le conseil municipal de l'époque avait engagé un vaste programme d'équipement et de résorption des bidonvilles.

Une zone industrielle, de plus de 400 hectares, a été réalisée et elle accueille aujourd'hui, plus de 100 unités industrielles et non des moindres. Il faut noter ici que la région de Berrechid qui est, malgré tout, un pôle industriel, participe à hauteur de 13,25% dans la production agricole nationale. A cette époque, également, tous les bidonvilles de Berrechid ont été rasés et les bidonvillois recasés dans de nouveaux quartiers, notamment Hay Hassani, là où les terroristes ont été arrêtés, mardi dernier.

Selon M. Abdallah Kadir, député de Berrechid, ancien président de la région de Chaouia-Ourdigha et ancien président du conseil municipal de Berrechid, " à partir de 1992, la ville s'est dangereusement désorganisée. Elle devait être la ceinture de Casablanca et une de ses villes satellites modèles, mais on l'a voulu autrement et les investissements, qui devaient se faire dans la zone industrielle, ont été orientés vers d'autres centres, notamment Settat ".

" L'élan de Berrechid a été stoppé net et le développement maîtrisé, engagé a céder la place à la désorganisation " a affirmé, M. Kadiri, qui a ajouté que " les quartiers et les habitations, initialement, prévus pour le recasement des habitants des anciens bidonvilles de Berrechid ont servi à abriter des populations venant d'autres régions ", notamment, de Sidi Moumen et de Kariane Sequoila, tristement célèbres pour avoir enfanté la quasi- totalité des terroristes impliqués dans les attentats du 16 mai.

Aujourd'hui, alors que l'arrestation rocambolesque, de mardi dernier, a braqué tous les feux de l'actualité sur cette ville de 120 000 âmes, on se demande qu'est-ce qui pousse les extrémistes à se réfugier à Berrechid ? En effet, au lendemain du 16 mai, un des candidats au suicide, Hassan Taoussi, qui avait abandonné la charge explosive qu'il transportait prés du Cercle de l'alliance israélite de Casablanca, s'était réfugié chez " des amis " à Berrechid, avant son arrestation, et sa condamnation avec ses complices.

Les deux terroristes, Hicham Derbani et Salah Brich, activement recherchés par tous les services, ont également trouvé refuge depuis quelques mois à Berrechid. La ville offre-t-elle des planques idéales ? Ou bien, tout simplement, le fait qu'elle soit devenue, en quelque sorte, une cité dortoir offre moins de risque à ceux qui ne veulent pas attirer l'attention sur eux ? Toujours est-il que Berrechid n'a jamais été et ne sera jamais une couveuse d'intégristes sanguinaires.

Le film des événements

Muni de fausses pièces d'identité, Hicham Derbani échappait depuis les attentats du 16 mai dernier, aux mailles des filets des services de sécurité. Dernièrement encore, il a failli être arrêté à Casablanca, mais il a pu disparaître dans la nature. Ce ne sera que partie remise. La traque est bien engagée. Même avec un faux nom et un nouveau look, l'éloignant de toute suspicion, il n'arrivera pas à tromper la vigilance des fins limiers. Mardi dernier, en début d'après-midi, toutes les informations dont disposaient les responsables de la lutte anti-terroristes faisaient état de la présence de Hicham Derbani à Berrechid.

La machine se mit en marche pour le localiser. On le repéra, en compagnie de Salah Dbich, alors qu'ils descendaient d'un grand taxi. Au moment de leur interpellation, les deux suspects ont commencé à vociféré, puis ont fait usage de sabres contre les éléments de la police, blessant l'un d'eux. Ils ont réussis à prendre la fuite et se sont dirigés vers Hay Hassani. Là, ils ont essayé de se réfugier dans une habitation en construction. Tout au long de leur course vers un refuge, ils disaient aux passants " cachez-nous, nous sommes des musulmans ".

Aucun des habitants du quartier ne répondit à leur demande, bien au contraire, les personnes qui se trouvaient sur le chantier de construction ont même tenté de les arrêter. Quand les éléments de la brigade anti-gang, dépendant du service de la police judiciaire de Berrechid arrivèrent sur les lieux, les deux terroristes ont refusé de se rendre et ont tenté, une nouvelle fois, de s'échapper en sautant d'une terrasse, d'un immeuble à l'autre. Ils furent finalement coincés dans une terrasse de 6m2, mais ont continué à menacer les éléments de la police avec leurs sabres.

Devant la menace et le refus de se rendre, les policiers qui ont commencé par tirer des coups de sommation, ont été dans l'obligation de tirer sur la jambe de l'un des terroristes pour le neutraliser. Ils réussirent finalement, après une rude bataille, à les arrêter. Une autre histoire allait commencer. On trouva que les deux suspects avaient non seulement de fausses pièces d'identité, mais de faux billets de banques, des coupures de cent et deux cents dirhams. Hicham Derbani a avoué aux enquêteurs où il habitait.

La police s'est rendue sur les lieux, un appartement dans un bel immeuble sur l'avenue principale de Berrechid et, la découverte est surprenante : un ordinateur, un scanner, une imprimante, et des produits entrant dans la fabrication d'explosifs. Affaire à suivre puisque cette arrestation a permis de démenteler une cellule qui envisagait de commettre des attentats à la bombe.
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