Au-delà des problématiques de l’enseignement, il appréhende les enjeux de notre mal développement et son constat est sans appel : «Tout au long de ces dernières décennies, dit-il, l’université et la recherche scientifique ont été marginalisées, le résultat c’est que nous sommes aujourd’hui dos au mur et que nous avançons à reculons dans la mondialisation. Nous rêvons tous de la planète Mars, mais comment y aller à dos d’âne ?» Et de regretter que dans les discussions à l’international, nous n’évoquions que les tomates, les sardines et les haricots, sans parler d’université, de recherche, de services à haute valeur ajoutée.
Aujourd’hui, dit-il, il s’attelle à un combat, celui de placer l’université et la recherche en tête des priorités, celui de s’ancrer dans la mondialisation, de s’ouvrir aux langues étrangères, à la société du savoir pour en faire un levier de croissance. Concernant le bilan de son prédécesseur, il insiste pour regarder vers l’avenir, car l’état des lieux ne pousse guère à l’optimisme : malgré tous les moyens du Plan dit d’urgence et les budgets injectés, le réel douloureux est là : avec les détournements des postes budgétaires, on s’est retrouvé, dit-il, avec 1 enseignant pour 300 élèves, soit 13 000 enseignants, alors qu’en Tunisie, avec une population trois fois moindre, on compte plus du double des enseignants. On compte également 3 étudiants par chaise et quelque 510 000 étudiants, alors qu’en Algérie on compte 1 300 000 étudiants !»
On sait où aller, reste à savoir comment !
Le diagnostic étant fait, la vision tracée et les objectifs fixés, reste à savoir comment y aller. Et l’on sait, selon l’adage, que «quand il y a la volonté, il y a le chemin». Un chemin que va dérouler une heure durant et avec passion un ministre déterminé. Il s’agit, dit-il, de mettre tout d’abord et au cœur de chaque action les principes de gouvernance, d’efficacité, de mutualisation, de lutte contre le gaspillage : «en réunissant les écoles d’ingénieurs de Rabat, nous pouvons créer le premier pôle d’Afrique, en atteignant la masse critique en termes de budget, de chercheurs et de doctorants.
Il faut repenser les structures universitaires, créer Rabat Tech, Casa Tech et les écoles polytechniques des différentes villes moyennes, créer de grands campus de 40 hectares dans les villes moyennes et de 100 hectares dans les villes capitales régionales qui soient des pôles de développement durable, mais aussi des lieux de vie, avec des laboratoires, des bibliothèques, des salles de sport...»La simplification va de pair avec la transparence et la lutte contre l’opacité du système. La lutte contre le gaspillage, notamment dans la rubrique voyage et repas organisés, a permis une économie de 70% avec des projets pour améliorer le cadre de vie des fonctionnaires du grand mammouth : restauration, amélioration du système de communication. Dorénavant, tout est transparent et chacun peut savoir où va l’argent du budget.
La gouvernance, dit-il, c’est l’alpha et l’oméga de notre action et, dans ce sens, un effort conséquent au niveau de la formation est consenti. Les doyens et directeurs qui seront recrutés ou nouvellement recrutés auront tous une formation au ministère des Finances et tous, comme les présidents, seront formés à la gestion.
Répondre à la demande des entreprises
Autre chapitre, celui de l’ouverture à l’international : «Les universités européenne et canadienne se bousculent, dit-il, au portillon du Maroc, un pays stable, tolérant, riche de sa pluralité, et notre idée est de faire du Maroc un hub africain, maghrébin, mais aussi arabe. Faire également du Maroc une base de développement, de recherche et de production pour les pays émergents.» Avec quels outils ? celui de la fondation. «Nous avons, souligne M. Daoudi, 52 000 étudiants à l’étranger qui dépensent quelque 5 milliards de DH. Pourquoi ne pas attirer les grandes universités internationales, comme l’École centrale de Paris, l’INSEA, l’École d’architecture de Paris Est, l’Université de Valenciennes, de Turin, qui ont toutes répondu favorablement et qui pourraient dès 2014 fonctionner dans différentes régions au Maroc ? C’est là, dit-il, une manière d’attirer les investissements, de mettre le pied dans la société du savoir, étant entendu que les diplômes délivrés seront de même qualité que ceux délivrés en France, en Italie, en Espagne, et seront inscrits dans les BO de ces différents États.» Concernant le privé, le ministre rappelle qu’il est un associé, que ce privé a une grande place dans la stratégie actuelle. Dans l’agence d’évaluation qui sera créée sous peu, le privé va siéger et faire entendre sa voix. En fait, et pour résumer l’état d’esprit du ministre, celui-ci souligne que le privé fait ce que ne peut faire l’État, mais il faudra davantage sérier les formations par rapport aux besoins du monde l’entreprise.
Mettre en avant les richesses nationales : le cactus, le cannabis, l’arganier…
Le chapitre consacré à la recherche tel qu’il le décline nous réserve une surprise de taille ! À la question relative à l’Institut des plantes de Taounate, créé en 2004, le ministre ne va pas par quatre chemins. Il évoque une catastrophe managériale et quelque 54 millions de DH jetés par la fenêtre ! Un résultat d’autant plus dramatique que le Maroc dispose de quelque 4 200 variétés de plantes et que l’avenir de la santé est à la phytothérapie, dont le marché mondial atteint quelque 64 milliards de dollars.
L’autre exemple traité par le ministre est celui du «cannabis, une richesse nationale qui détruit le pays au lieu de le construire». Et de rappeler les propriétés thérapeutiques du cannabis, que le Maroc doit exploiter dans ce sens, comme il doit exploiter le cactus, l’arganier et bien d’autres richesses.
Le cas du cannabis a déjà été évoqué au Parlement, affaire donc à suivre. En attendant, le texte de loi destiné à optimiser le secteur de la recherche en assurant une meilleure coordination entre toutes ces mille et une unités et structures qui font de la recherche.