Huit ans après le lancement de la Télévision numérique terrestre (TNT) au Maroc par la Société nationale de radiodiffusion et de télévision (SNRT), seuls 6 à 8% des foyers marocains en sont équipés, alors que le réseau d’émetteurs TNT couvre actuellement 80% de la population. Une réalité qui avait poussé, en 2013, le ministère de la Communication à mettre en œuvre un plan national visant à accélérer la vulgarisation de la Télévision numérique terrestre (TNT) auprès des Marocains. Une des raisons avancées à l’époque par Mustapha El Khalfi était de permettre au Maroc de respecter ses engagements internationaux en matière de diffusion numérique d’ici 2015. Et pour cause, passé ce délai, la diffusion en analogique pourrait conduire à un brouillage des signaux numériques des pays voisins, dont l’Espagne.
Cependant à quelques mois de l’échéance, et malgré les différentes mesures prises, la TNT peine à se faire une place dans le paysage audiovisuel marocain. Surtout face à son grand frère, le satellite, largement adopté par la population depuis de nombreuses années. Celui-ci, avec sa profusion de canaux, ses programmes très ciblés et sa forte pénétration des foyers marocains, reste le moyen de diffusion le plus répandu, le plus efficace et préféré par les ménages marocains. De plus, les chaînes de la TNT se retrouvent déjà sur le satellite. Le consommateur ne perçoit donc pas la nouveauté. Sans entrer dans les détails trop techniques, pour le téléspectateur, l'intérêt majeur est la réception, via une simple antenne râteau, voire d'une antenne d'intérieur, des chaînes numériques. Exit, donc, les paraboles au balcon qui prennent beaucoup de place et sont, il faut l’avouer, totalement disgracieuses, sauf si vous optez pour la TNT par satellite... Deuxième avantage de la TNT : son prix. Bien que le premier argument avancé soit la gratuité des chaînes. Il ne faut pas se mentir, rien n’est gratuit dans la vie. Ainsi, c’est le décodeur que l’on devra payer entre 200 et 600 dirhams, tandis que le satellite coûtera aux alentours des 1.500 dirhams (décodeur, moteur, parabole, installation…). Cependant même à 200 dirhams, certaines familles ne pourront pas se le procurer. Pour y remédier, il semblerait que le gouvernement y mette du sien en œuvrant à soutenir les familles à revenu limité pour l'acquisition des convertisseurs-décodeurs TNT. C’est en tout les cas ce qu’avait promis Mustapha El Khalfi.
À noter que sur la plupart des télévisions vendues en grandes surfaces depuis 2010, la TNT est déjà intégrée. Mais sur les anciens postes, c’est une autre histoire. Certains pourront recevoir le décodeur, d’autres non, et là c’est tout le poste qui est à changer. Il faudra donc investir dans un écran plat. Et pour que la qualité d’image soit à son rendu maximal, on pourra investir dans un câble HDMI qui nous permettrait de regarder la télévision en HD (haute définition)… À condition que son décodeur et son poste de télévision soient dotés du type de port approprié. Quand la TNT offre moins de 10 chaînes, le satellite, lui, en propose plus de 800. Dans ces conditions, les améliorations de l'image et surtout du son qu'offre la TNT sont insignifiants. Cependant, la TNT pourrait constituer un levier important pour le développement local et régional. C'est le mode de diffusion idéal pour toucher le monde rural via le développement des petites chaînes locales qui sont aujourd'hui très rares, faute de cadre juridique encourageant leur création.
Il est possible d'utiliser la TNT pour lutter contre l'analphabétisme dans les compagnes, diffuser les règles élémentaires d'hygiène, vulgariser le savoir-faire au sein de la population rurale, mener des compagnes de sensibilisation de proximité en tenant compte des spécificités de chaque région et donc de chaque population. Mais cela suppose une véritable libéralisation du paysage audiovisuel et une révision radicale du découpage régional.
