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La régénération des lézards inspire la recherche sur la cicatrisation

Notre corps est capable de réparer les lésions qu'il subit. Si certaines plaies cicatrisent en quelques semaines, d’autres mettront plus d’une année. Au-delà du simple pansement, il existe aujourd’hui différentes méthodes de cicatrisation destinées aux plaies difficiles. Explications…

«La cicatrisation est un phénomène naturel. C’est l’une des caractéristiques de la vie humaine, animale et végétale (ce que peut-être certains ignoraient jusque-là). En effet, au même titre que la peau, l'arbre possède des capacités à recouvrir seul ses plaies lorsque sa santé et la taille de la plaie le lui permettent», explique le professeur El Hassan Boukind, Chef de service Chirurgie plastique, reconstructrice et brûlée au CHU Ibnou Rochd de Casablanca.

On parle de cicatrisation lorsqu’il s’agit de la régénération d'un tissu ou d'un organe, souvent la peau, ou de la consolidation d'un élément séparé en deux comme dans le cas d'une fracture osseuse. La durée de cicatrisation dépend de la nature et de la gravité de la lésion. «En fonction de l’organe touché (peau, os, foie, cerveau, cœur), celle-ci sera plus ou moins longue. Pour l'exemple, une lésion mineure se cicatrise en quelques semaines, alors qu'une plaie chirurgicale peut prendre jusqu'à 18 mois à guérir», informe le chirurgien. Pour ce faire, la cicatrisation passe par différents stades. «Trois pour être exact, lesquels sont la détersion (élimination des tissus mortifiés), le bourgeonnement (phénomène de compensation de la perte de substance résultant de la lésion et de la détersion) et l’épithélialisation (régénération de l’épiderme)», poursuit la même source.

À noter qu’une cicatrice normale mesure au plus 2 à 3 mm de largeur. Cependant, il arrive que certaines cicatrices deviennent larges, creusées, épaisses et dures. On les appelle les cicatrices vicieuses. Une blessure située au centre de la poitrine (région du sternum) a beaucoup plus tendance à faire une cicatrice vicieuse. C'est même la pire région du corps, sans qu'on sache trop pourquoi. Les épaules, les genoux, les coudes, les articulations en général présentent également ce problème, probablement parce qu'elles bougent beaucoup. C'est également le cas du dos, où la peau est plus épaisse.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, les enfants ont tendance à faire des cicatrices moins belles, car les cellules de leur peau se régénèrent de façon rapide et anarchique. Au contraire, les personnes âgées font rarement de mauvaises cicatrices.

Concernant les nouveaux traitements de la cicatrisation, le professeur El Hassan Boukind avait indiqué en juin dernier, lors du premier Congrès francophone de la cicatrisation et des plaies, qu’il existait aujourd’hui de multiples technologies afin d’aider à la gestion de ces situations cliniques souvent difficiles. On parle notamment de transferts de graisse PRP, de lasers LED. Cependant, celui-ci voit encore plus loin. «Actuellement, nous n’essayons pas de cicatriser, mais de régénérer les tissus lésés, en nous basant sur la salamandre ou l’hydre. Ces petits amphibiens sont capables de régénérer totalement leurs membres, leur queue, parfois l'œil, et même de larges portions du cœur», informe la même source. Sans pour autant devenir les prochains «Wolverine», si leurs mystères sont percés, nous pourrions donc faire un grand pas dans la cicatrisation des plaies et soigner les plus difficiles d’entre elles. 


Explications

Par Dr Abdellah Bouchta, spécialiste en chirurgie plastique, reconstructrice

«Une plaie peut cicatriser en 15 jours, comme durer plusieurs années»

Comment le corps réagit-il face à une plaie ?
La première réaction de l'organisme suite à une plaie est le comblement de la zone lésée d'une substance appelée exsudat inflammatoire. Cet exsudat renferme des cellules sanguines et des molécules, en particulier une protéine filamenteuse appelée fibrine. Cette dernière emprisonne les cellules sanguines et participe ainsi à la formation du caillot, ce qui permet d'arrêter le saignement. D'autres cellules dites inflammatoires (macrophages et lymphocytes) font également partie de cet exsudat et ont pour rôle la lutte contre l'infection.

Quelles sont les différentes étapes de la cicatrisation ?
Il convient d’abord de distinguer deux types de cicatrisation. D'une part la cicatrisation dite de première intention où les berges de la plaie sont accolées l'une à l'autre, par une suture ou par des strips (bandelettes adhésives stériles). D'autre part, la cicatrisation de deuxième intention où les berges de la plaie sont éloignées, comme dans le cas des escarres, par exemple. Dans ce cas, le processus de cicatrisation se déroule en trois étapes. La première, appelée phase de détersion chimique ou suppurée (nettoyage chimique de la plaie), est un préalable nécessaire à la cicatrisation. La deuxième étape, dite phase de bourgeonnement, fait suite à la phase de détersion ; une fois la plaie nettoyée en partie ou en totalité, la surface devient plus ou moins rouge (bourgeon), attestant la formation de nouveaux vaisseaux. La troisième étape est dite d'épidermisation. Durant cette phase, les cellules de l'épiderme (couche la plus superficielle de la peau) bordant les berges de la peau se multiplient et avancent de la périphérie vers le centre de la plaie.

Quelle est la durée de la cicatrisation ?
Il est très difficile de donner un délai de cicatrisation ; celle-ci dépend de plusieurs paramètres : la plaie peut cicatriser en environ 15 jours si plusieurs conditions sont réunies (petites plaies situées en zone statique, chez un sujet jeune en bonne santé), comme elle peut traîner plusieurs années sans tendance à la guérison, comme dans certains cas d'ulcère de jambe, par exemple.

Y a-t-il des facteurs favorisant ou empêchant la cicatrisation des plaies ?
Une plaie cicatrisera plus rapidement si le sujet est jeune et/ou si le patient a une bonne hygiène de vie (alimentation riche en protides, en sels minéraux, notamment le calcium, et en vitamine, en particulier les vitamines A, B5, C et E). En revanche, certains facteurs peuvent ralentir le processus de cicatrisation comme le diabète, un déficit immunitaire des corticoïdes, la dénutrition, les problèmes vasculaires, certaines anémies chroniques, certaines affections neurologiques, le tabagisme...

Qu'appelle-t-on «plaies aigües» et «plaies chroniques» ?
Une plaie est considérée comme chronique si elle ne cicatrise pas après 4 à 6 semaines d'évolution, et ce en raison de la présence d'un ou de plusieurs facteurs de retard de la cicatrisation évoqués ci-dessus (diabète, tabagisme, etc.). En l'absence de facteur local ou général pouvant entraver la cicatrisation, la plaie peut cicatriser en moins de 4 semaines et on parle alors de plaie aigüe.

Comment soigner une plaie ?
Le traitement de la plaie doit tenir compte également de l'état général du patient, par exemple le traitement d'une plaie chez un patient diabétique doit tenir compte de son équilibre glucidique. Localement, le traitement peut être chirurgical, si la plaie est propre et les berges bien vascularisées. Ce traitement fait appel à plusieurs procédés : suture directe, lambeau tissulaire, greffe de peau... Il peut aussi faire appel aux soins locaux si la plaie comporte des tissus nécrosés (morts) et/ou infectés. Dans ce cas, on dispose d'une multitude de pansements, en fonction de l’état clinique de la plaie.

Quelles nouveautés en termes de cicatrisation ?
Parmi les procédés récents en matière de cicatrisation, on peut citer le plasma autologue riche en plaquettes (PRP). Issu d'une simple prise de sang, le PRP peut être injecté dans la plaie (propre) ou appliqué sous forme de gel sur celle-ci. Plusieurs études ont montré que le PRP accélère manifestement le processus de cicatrisation en stimulant la prolifération cellulaire.

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