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Khalil El Ghrib, une figure à part dans l'art pictural marocain

La Fondation CDG a le privilège de faire découvrir, dans son Espace Expressions CDG, environ 200 œuvres inédites, parcourant 50 ans de créativité, de l’artiste plasticien Khalil El Ghrib. Le vernissage a eu lieu mardi dernier, ainsi que la signature du livre édité à cette occasion par la Fondation CDG et le Conseil national des droits de l’Homme qui le dédient à la COP 22, prévue en novembre prochain à Marrakech.

Khalil El Ghrib, une figure à part dans l'art pictural marocain
Une œuvre de l’artiste-peintre Khalil El Ghrib.

Avec cette exposition, qui se poursuivra jusqu’au 27 août prochain, la Fondation CDG compte faire sensation sur les passionnés de l’art et le large public. Et pour cause, Khalil El Ghrib est un artiste qui affiche rarement ses œuvres. On peut lui compter, en général, une prestation par an. Selon ses amis proches, Khalil est, aussi, quelqu’un de très spécial. Il n’a jamais cherché ni argent ni célébrité. Alors qu’il passait tout son temps dans son atelier à Asilah, menant des recherches et expérimentant les matières les plus insolites qu’on puisse imaginer. «Inconsciemment, je cherche, mais consciemment je ne cherche pas. Mais qu’est-ce qu’on cherche ? La plupart des gens cherchent la fortune, la reconnaissance sociale et culturelle, mais dans mon cas, non, je cherche autre chose, et cette chose-là n’est pas matérialisée.

C’est pour cette raison que je dis que je ne cherche rien, en tout cas, pas ce que cherchent les gens, les gens moins sensibles à des questions existentielles», disait El Ghrib.
Cet artiste, qui est à l’image d'Asilah, où il a toujours vécu jusqu’à maintenant, essaye de comprendre et d’évoluer avec les plus infimes changements de sa ville. «Khalil El Ghrib a une singularité créative qui en fait un de nos tout premiers artistes marocains, parce qu’il ne s’adresse pas à nous en flattant notre légitime envie du beau dans la représentation du réel, mais en nous dévoilant à nous-mêmes, tels que nous sommes, dans notre essentielle fragilité et la modestie de notre présence au monde. Nous avons conçu cette exposition et ce livre pour qu’ils soient exceptionnels, de par la nature même de ce qui y est montré. Car jamais à ce jour ces travaux sur papier, ces dessins, ne furent présentés dans un tel ensemble», renchérit Dina Naciri, directrice générale de la Fondation CDG. En effet, cet artiste atypique n’a jamais cherché les lumières des événements. Il gardait jalousement ses créativités. Cette prestation vient à point nommé pour montrer toute une rétrospective de ses travaux qui le placent en tant que visionnaire par rapport aux effets des changements climatiques.

À ce propos, Driss El Yazami, président du Conseil national des droits de l’Homme, a souligné que cette exposition ne pouvait mieux tomber. «L’œuvre de Khalil témoigne à sa façon, bien avant la prise de conscience universelle qui s’amorce, de ces traces et de ces bouleversements. Parcourant les ruelles de sa ville et ses plages, El Ghrib fait de tous les matériaux qu’il y collecte depuis des décennies son miel et ses créations originales». Mohamed Rachdi, Hassan Bourkia, et Fouad Bellamine ont aussi rapporté des témoignages sur Khalil, expliquant sa personnalité et son œuvre. Bellamine précise que Khalil occupe une place unique dans la cohérence et la discrétion. «Je serai tenté de le qualifier de shaman, car Khalil vit et s’exprime à travers une spiritualité qui lui est propre, inspirée de la culture arabo-musulmane, et marquée par un rapport singulier à la mort dans une sorte d’esthétique mortuaire.

C’est toute une intimité qu’il vit, aussi, en compagnie des matériaux qui l’entourent». Dans une conversation filmée avec Bernard Collet en 2002, Khalil explique qu’«Asilah visualise le temps, d’après les ombres, la fermentation, le comportement des gens qui vont lentement, comme des acteurs, et ainsi on peut observer le passage du temps et le processus sur les matériaux organiques et minéraux. J’utilise le temps comme un matériau plastique, c’est lui qui aide à la fermentation et à l’oxydation. Comme un artiste conventionnel utilise les couleurs, moi, j’utilise le temps comme élément, comme outil qui tisse toute mon activité plastique». Un extrait du livre de feu Edmond Amran El Maleh dévoile l’ambivalence, l’ambiguïté, le geste spontané qui nie le temps dans le triomphe de l’instant, «mais dévoile paradoxalement dans le revers du temps sa nature vraie d’un seul tenant. Méditatif, rebelle à la discontinuité spatiale». Ses travaux représentent des formes et des mouvements divers : figuration, paysages, nature morte, abstraction lyrique, sous toutes ses formes expressives, aquarelles, gestuelle, matière, grattage… Avec ce récapitulatif de l’œuvre de Khalil ainsi que la mise à nue de sa personnalité, le public amateur et les professionnels pourront découvrir la fertilité et la grandeur de l’âme de cet artiste hors pair. 

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