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«La commission mixte parlementaire a inscrit les relations Maroc-UE dans la stabilité et la continuité»

La commission mixte Maroc-Union européenne (UE) tiendra, demain mardi à Rabat, sa huitième réunion annuelle. À l’ordre du jour figurent plusieurs dossiers stratégiques. Le contexte dans lequel intervient cette réunion est très particulier, marqué par le retour du Royaume à l’Union africaine, le rapport du Secrétaire général des Nations unies sur la situation concernant le Sahara marocain ainsi que l’apaisement des relations entre le Maroc et l’UE après une période de tensions au sujet de l’accord agricole. Abderrahim Atmoun, président de la commission parlementaire mixte Maroc-UE, fait le point sur le rôle et le travail de la commission, ainsi que sur les défis auxquels elle doit faire face.

«La commission mixte parlementaire a inscrit les relations Maroc-UE dans la stabilité et la continuité»
Abderrahim Atmoun.

Le Matin : Pourriez-vous nous présenter d’abord la commission mixte Maroc-UE et son rôle ?
Abderrahim Atmoun : Dans le cadre de la politique européenne de voisinage, le Maroc a obtenu le statut avancé avec l’Union européenne. Le Conseil d’association UE-Maroc a recommandé la création d’une commission parlementaire mixte Maroc-UE afin de traduire le statut avancé par une plus grande coopération parlementaire et un approfondissement des liens politiques entre le Maroc et l’UE. C’est ainsi que la commission parlementaire mixte Maroc-UE a vu le jour à Bruxelles en mai 2010.
La commission, que j’ai coprésidée pendant les cinq dernières années avec Pier Antonio Panzeri, aujourd’hui président de la commission des droits de l’Homme au sein du Parlement européen, et que je copréside actuellement avec Ines Ayala Sender, est un formidable lieu d’écoute et de partage d’expériences entre les députés européens et marocains. La commission parlementaire mixte Maroc-UE a surtout permis aux deux parties de mieux se connaître, de se défaire des préjugés et de travailler de manière concrète sur des sujets d’intérêt commun. Elle a inscrit les relations Maroc-UE dans la stabilité et la continuité. Elle exerce également un rôle de contrôle parlementaire. D’ailleurs, nous formulons, de manière régulière, des recommandations au gouvernement marocain et à la Commission européenne. L’existence d’une commission parlementaire mixte Maroc-UE permet aussi de mieux communiquer sur la relation privilégiée entre l’UE et le Maroc et d’en expliquer les enjeux aux citoyens européens et marocains.

Dans quelle mesure et comment cette commission peut-elle servir à défendre les positions et les dossiers stratégiques du Royaume, comme l’accord agricole, la migration et la coopération sécuritaire ?
Nous avons développé une entente et un langage commun que nous partageons avec nos partenaires européens. Notre méthode de travail a permis d’instaurer et de pérenniser des contacts personnalisés, tout en maintenant un travail intense et efficace. Forts de cette confiance mutuelle avec nos collègues députés européens, nous pouvons aborder des sujets d’intérêt commun en toute franchise. La commission parlementaire mixte est donc devenue l’espace idoine pour défendre nos positions et faire valoir les intérêts des deux parties sur des dossiers aussi stratégiques que l’agriculture, la pêche, les questions migratoires ou sécuritaires. La commission parlementaire mixte Maroc-UE a joué un rôle clé au moment des votes concernant l’accord de pêche et l’accord agricole au Parlement européen.

Justement, les relations entre le Maroc et l’UE sont traversées de temps à autre par des périodes de tension. Comment réagit la commission mixte dans ces cas ?
Je tiens à rappeler qu’il n’existe aucune crise entre le Maroc et le Parlement européen. Les deux accords en vigueur entre le Maroc et l’UE ont été adoptés par le Parlement européen, qui possède un pouvoir de codécision au sein de l’UE. Si tension il y a, c’est au sein de l’Union, entre ses différentes instances. Cependant, il est vrai que la commission parlementaire mixte Maroc-UE a souvent fait face à des manœuvres politiques dirigées par une petite minorité hostile à notre intégrité territoriale. Notre rôle est de prémunir la relation entre le Maroc et l’UE de toutes tentatives de déstabilisation. Aujourd’hui, la présence de la commission parlementaire mixte est permanente au sein du Parlement européen.

Quel regard portent les eurodéputés sur les efforts menés par le Maroc en matière de lutte contre le terrorisme et l’immigration ?
Je me trouvais à Bruxelles à la fin du mois de mars pour intervenir devant les députés européens membres de la Délégation pour les relations avec les pays du Maghreb, et ce à l’invitation de la présidente de la Délégation, Mme Ines Ayala Sender. Durant cette rencontre, les eurodéputés, et à leur tête Mme Sender, ont salué le rôle que joue le Maroc dans les efforts de la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme, notamment à travers la coopération efficace qui existe entre les services de renseignements marocains et européens. La présidente de la Délégation Maghreb a également souligné le rôle que joue le Royaume du Maroc dans le champ religieux, à travers la formation des imams et la diffusion d’un Islam marocain tolérant et modéré. Enfin, les députés européens ont salué la nouvelle politique migratoire du Royaume du Maroc, engagée sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, rappelant qu’il s’agit d’une approche unique dans la région, s’inscrivant dans une logique de coopération Sud-Sud et dans un esprit humaniste et respectueux des droits de l’Homme.

Comment le Parlement européen a-t-il accueilli le retour du Maroc à l’Union africaine ? La commission aura-t-elle un rôle dans le renforcement des relations entre le Parlement européen et le Parlement panafricain ?
La grande majorité des députés européens ont accueilli avec beaucoup d’enthousiasme le retour du Maroc au sein de sa famille institutionnelle qu’est l’Union africaine. Le Parlement européen a pleinement conscience du rôle que joue le Maroc en tant que hub économique, d'autant que de nombreux échanges, notamment commerciaux, entre les pays européens et africains se font à partir du Maroc. C’est dans ce sens qu’ils interprètent et apprécient également la demande d’adhésion du Maroc à la Cédéao (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest). Nos partenaires européens ont pleinement conscience de l’importance que revêt l’action de Sa Majesté le Roi Mohammed VI en direction du continent africain, pour son développement et son essor, et des efforts entrepris par le Royaume du Maroc pour lutter contre les extrémismes religieux ou encore pour rapprocher les points de vue des deux continents dans la lutte contre le changement climatique. Nos partenaires parlementaires européens ont donc perçu le retour du Maroc au sein de l’UA comme une démarche cohérente et surtout bénéfique aux continents européen et africain. En tant que président de la commission parlementaire mixte Maroc-UE, j’ai l’intime conviction que le Maroc contribuera au rapprochement Nord-Sud grâce à la consolidation des relations Sud-Sud que le Maroc est en train de construire. La réunion de la commission, qui se tiendra dès demain à Rabat, abordera bien évidemment les raisons du retour du Maroc au sein de l’Union africaine et viendra rappeler l’engagement du Royaume du Maroc à promouvoir une coopération parlementaire accrue entre les législateurs africains et les députés européens, et à renforcer les relations tripartites entre l’Europe, le Maroc et l’Afrique. La commission parlementaire mixte Maroc-UE mettra au profit des Parlements africains son expérience dans la coopération parlementaire avec le Parlement européen et souhaite insuffler des dynamiques entre l’Europe et l’Afrique.

De manière générale, quelle évaluation peut-on faire aujourd’hui du bilan de la commission mixte Maroc-UE ? Quels en sont les acquis et quelles sont les insuffisances auxquelles il faut remédier ?
Depuis sa création, la commission parlementaire mixte Maroc-UE a pris à bras le corps de nombreux sujets d’intérêt commun, comme les réformes politiques, la régionalisation avancée, la jeunesse, la condition féminine, la politique migratoire et les questions sécuritaires. La méthode de travail adoptée par la Commission, à savoir l’instauration des binômes de travail, et la qualité des rapports réalisés par les membres de la commission nous ont permis de nous saisir sereinement des grands enjeux qui structurent les relations entre le Maroc et l’Union européenne. Forts de nos acquis, notamment des accords agricoles et de pêche, votés par le Parlement européen, le rejet des résolutions hostiles aux intérêts supérieurs du pays, nos deux Parlements sont désormais appelés à amplifier leur collaboration. Pour préserver sa place singulière dans le domaine de la coopération entre le Maroc et l’UE et pour conserver son efficacité, la commission parlementaire mixte devra faire preuve d’audace et d’un sens de l’innovation. Son champ d’action devra s’étendre à tous les sujets d’intérêt commun, notamment ceux liés à l’Afrique. Son mode de fonctionnement devra aussi être peaufiné et adapté en permanence aux challenges qui nous devons relever.

Quelle place occupe aujourd’hui la commission Maroc-UE dans le paysage diplomatique maroco-européen ?
Nous avons pu créer un véritable outil de diplomatie parlementaire, qui complète les relations gouvernementales en apportant à la relation Maroc-Union européenne une véritable valeur ajoutée. La commission parlementaire mixte Maroc-UE s’est imposée comme un organe de travail incontournable des relations Maroc-UE et un exemple de coopération politique et parlementaire. La fréquence de nos rencontres avec les députés européens, l’intensité de nos échanges, la pertinence de nos discussions et la franchise de nos rapports font que la relation Maroc-UE n’a pas d’égale dans tout le pourtour méditerranéen. La commission est le digne reflet du partenariat stratégique et de la relation singulière entre le Maroc et l’UE.

Quelles sont les grandes lignes de l’agenda et du plan d’action de la commission pour l’année 2017 ?
La réunion de la commission parlementaire mixte Maroc-Union européenne sera l’occasion d’annoncer notre plan d’action pour l’année 2017. Au programme de cette réunion, une visite de l’Institut de formation des imams et au Salon international de l'agriculture de Meknès. Nous tiendrons également des rencontres de haut niveau avec des responsables gouvernementaux et les présidents des deux Chambres du Parlement marocain. Concernant les grandes lignes du plan d’action 2017, je peux d’ores et déjà vous dire que nous avons décidé de relancer les binômes. C’est une méthode de travail efficace et qui a fait ses preuves dans le passé. Nous avons également opté pour un élargissement des sujets d’intérêt commun que nous traiterons au sein de la commission, pour y inclure notamment la dimension africaine. Nous souhaitons également poursuivre l’ouverture de la commission parlementaire mixte Maroc-UE, en organisant des conférences thématiques sur des sujets qui représentent de véritables défis communs aux deux parties.

Vous avez été reconduit à la tête de la commission, quels sont vos objectifs ?
J’ai eu l’honneur d’avoir été reconduit à la tête de la délégation marocaine au sein de la commission parlementaire mixte Maroc-UE qui regroupe en son sein des membres issus de divers horizons, expérimentés et rompus au travail de diplomatie parlementaire. Nous travaillons en harmonie, en bonne intelligence et dans un climat de confiance avec la partie européenne. Je placerai mon action dans la continuité de l’esprit de cette commission et du partenariat stratégique qui nous lie à l’UE. Nous devrons redoubler d’efforts et intensifier notre action pour consolider le travail de la commission et amplifier les relations politiques, économiques, universitaires et culturelles que nous entretenons avec l’UE.

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