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La médiation prend une place de choix dans la résolution des litiges

La lourdeur de la justice encourage les opérateurs économiques à recourir, de plus en plus, à la médiation, un outil de résolution particulièrement adapté aux conflits commerciaux et qui se caractérise par sa rapidité, son efficacité et sa confidentialité. Le Centre de médiation pour l’entreprise nous livre son expérience en la matière.

La médiation prend une place de choix dans la résolution des litiges

La médiation, outil de résolution particulièrement adapté aux conflits commerciaux, a été introduite dans le contexte marocain des affaires depuis 2006 dans le Code de la procédure civile, sous le chapitre médiation conventionnelle (une quinzaine d’articles). Cela a permis le développement de la médiation, étant donné que plusieurs secteurs d’activité se sont inspirés de ce texte et ont développé cette pratique conformément aux caractéristiques et aux spécificités de chaque secteur. Ainsi, on la retrouve dans les secteurs de l'assurance, de la banque... Elle s’est développée également sous forme de médiation institutionnelle, comme c’est le cas, par exemple, chez Barid Al Maghrib, la Lydec ou L’OCP, qui compte parmi les plus grosses sociétés à avoir institué la médiation à travers «l’ombudsman OCP». Instance installée pour gérer les différends au sein de l’Office, mais aussi vis-à-vis de ses nombreux sous-traitants.

Selon Me Yasmine Essakalli, médiatrice agréée du Centre de médiation pour l’entreprise (CME de la Chambre française de commerce et d'industrie du Maroc), cette pratique prend de plus en plus sa place dans le monde des affaires. «On est parti d’un cadre général pour retrouver la médiation dans d’autres textes tels que la loi sur le consommateur, le texte instituant l’Agence de développement agricole (ADA), la loi relative au partenariat public privé, les textes relatifs aux délais de paiement… On se rend compte aujourd’hui qu’au Maroc la médiation n’est plus un fait exceptionnel. On y recourt dans plusieurs secteurs d’activité, et ce aussi bien de la part des entreprises que de la part des simples citoyens marocains», affirme-t-elle. La médiation prend ainsi une place de choix puisqu’on peut y recourir pour régler un problème avec un opérateur de distribution d’eau et d’électricité, avec la poste, la banque, l’assurance… De plus, le cadre juridique l’encadrant est clair permettant son ancrage croissant.

Qu'est-ce que la médiation ?

Elle consiste à régler, à l’amiable, le différend opposant deux parties, de manière assez rapide, à l’aide d’un tiers médiateur formé à cet effet. La médiation doit être menée en toute confidentialité et aboutir à un accord afin de mettre fin de manière définitive au litige. Ce qui évite d’aller au tribunal et permet même de maintenir la relation d’affaires entre les deux parties. L'accord peut ainsi être accompagné de la signature d’avenants et de conventions nouvelles. À ce niveau, il faut faire la distinction entre l’arbitrage et la médiation. L’arbitrage est une justice privée où l’arbitre (ou le tribunal arbitral) rend une sentence arbitrale. C'est cet arbitre qui rend la décision et tranche dans le litige et non pas les parties. Or le médiateur n’impose pas de solution ni ne tranche. Son rôle consiste à aider les deux parties, à travers des techniques et des outils, à reprendre le dialogue et à creuser pour découvrir où se trouve le problème. Ce qui permet d’explorer des pistes de solutions et d'arriver à la rédaction d’un accord d’entente qui prend la forme d’une transaction. Par ailleurs, «si nous n’avons pas de chiffres exacts sur le nombre de médiations effectuées, il y a en revanche un autre chiffre plus important.

Il s’agit du taux d’exécution, de manière volontaire par les parties, des accords de médiation. Ce taux atteint 95% au sein du CME. Ce qui n’est pas le cas des jugements ou des sentences arbitrales. Car, très souvent, il faut recourir aux huissiers, aux services des exécutions, procéder à des saisies… pour pouvoir exécuter une décision de justice», affirme Yasmine Essakalli. «Il faut aussi savoir que 75% des actions en médiation aboutissent à une transaction», ajoute-t-elle. Or la question qui se pose est de savoir s’il y a un nombre suffisant de médiateurs qualifiés pour répondre aux demandes des parties en conflits. Le Centre de médiation pour l’entreprise, installé depuis 2010, participe à la promotion de la médiation, mais aussi à la formation des médiateurs. Les premiers médiateurs membres du CME ont été formés en partenariat avec le Centre de médiation et d’arbitrage de Paris. «Nous avons été agréés par une commission indépendante. Nous organisons régulièrement des formations qui allient la partie théorique et la partie pratique de la médiation.

Celles-ci suivent un processus très structuré en cinq phases», tient à préciser André Robelin, également médiateur agréé du CME. Selon lui, le médiateur, formé aux pratiques de la médiation par un centre nationalement reconnu en la matière, comme l’est le CME, et agréé, doit dans une première phase faire accepter par les parties les règles de la médiation, à savoir à quoi elle sert ainsi que le mode de déroulement de ses réunions. La deuxième phase est celle de «l’exploration du passé» pour comprendre comment les deux parties sont arrivées au blocage nécessitant la médiation. La troisième phase est celle de l’expression du conflit dans les mêmes termes pour recueillir l’acceptation des deux parties. La quatrième phase consiste en l’exploration de toutes les pistes de solutions possibles et des moyens de développer et maintenir la relation entre les deux parties. La cinquième phase consiste en la rédaction de la transaction. «Il n’y a pas de phase plus importante que l’autre.

hacune doit se dérouler complètement», affirme-t-il. S’agissant du temps que dure la médiation, selon l’expérience du CME, elle prend, en moyenne, au maximum, entre 15 et 20 heures de réunions, réparties sur différentes séances. Cependant, la loi et les règlements prévoient un délai maximum de trois mois. «Les actes de médiation se terminent au bout d’un mois, d’autres au bout de deux ou trois séances. Mais, en principe, cela reste beaucoup plus court que si l’on recourt à la justice. 

Le délai légal maximum de trois mois comporte la période pendant laquelle un certain nombre de réunions doivent être organisées pour pouvoir aboutir à une transaction. Au Centre de médiation pour l’entreprise, la durée moyenne est entre 15 et 20 heures, rédaction comprise. En ce qui concerne l’exécution du contenu de la transaction, ce sont les parties qui s’en chargent. En général, cela se fait tranquillement, sans problèmes», explique André Robelin. Pour ce qui est du coût de la médiation, il est facturé à 3.000 dirhams l’heure (hors taxes) en moyenne, à payer en parts égales entre les deux parties.

Ce tarif qui n’est pas majoré, même si, dans le cas du CME, on recourt au principe de la co-médiation (deux médiateurs pour chaque séance) pour offrir aux parties les services de médiateurs qui peuvent être arabophones, francophones, anglophones, des juristes ou des spécialistes de différents secteurs d’activité. 

Une centaine de médiateurs formés par le CME

En 2010, le Centre de médiation pour l’entreprise (CME) a démarré avec huit médiateurs. Aujourd'hui, il en forme une centaine. Un nombre qui sera étoffé avec la formation de cinq jours (les 8-9, 22-23 novembre et le 5 décembre) d’une quinzaine de nouveaux médiateurs. C'est une formation payante, assurée par quatre experts, et qui s’adresse à des professionnels issus du monde économique, juridique et de l’entreprise. Les opérateurs qui recourent à la médiation auprès du CME sont aussi bien des PME-PMI, des multinationales que des particuliers. Les différends traités sont relatifs notamment au secteur bancaire, au droit du travail, aux services, aux sous-traitants, aux assurances, au monde de l’industrie et aux différends entre actionnaires.

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