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Le pouvoir disciplinaire du Conseil de l’Ordre des avocats (2/2)

Par Said Naoui,docteur en droit privé et sciences criminelles, enseignant à la faculté Hassan premier, Avocat agréé à la Cour de cassation

Le pouvoir disciplinaire du Conseil  de l’Ordre des avocats (2/2)

Le rôle exercé par l’avocat, le bâtonnier, le ministère public et la Chambre du Conseil dans la procédure disciplinaire est un rôle spécifique.

 

A- Le rôle de l’avocat dans la procédure disciplinaire
Le rôle de l’avocat dans la procédure disciplinaire est primordial. En effet, la procédure doit être contradictoire, il a le droit d'accès à son dossier pour connaitre les faits qui lui sont reprochés et peut se faire assister par un confrère ou des confrères devant le Conseil de l’Ordre. L’avocat condamné peut interjeter appel devant la Cour d’appel du ressort. L’avocat, puni d’une peine disciplinaire définitive soit un avertissement, un blâme ou la suspension, peut déposer une demande de rétablissement au Conseil de l’Ordre qui statue sur celle-ci dans un mois de sa date. La demande de sollicitation est déposée pour les punitions de l’avertissement et du blâme après l’expiration de trois ans de leurs dates, et après l’expiration de cinq ans pour la punition de la suspension du métier si la durée est moins d’une année ou après dix ans si elle est au-delà d’une année. Le délai commence à courir pour les deux derniers cas à partir de l’exécution de la suspension du métier.

B- Le rôle du bâtonnier et du Conseil de l’Ordre dans la procédure disciplinaire
Le bâtonnier, gardien des intérêts de son barreau, est le chef de l’Ordre et l’agent d’exécution du Conseil, préside le Conseil de l’Ordre, siégeant comme Conseil de discipline, dans la procédure disciplinaire, son rôle doit être un rôle organisateur qui ne lui interdit pas de relever des observations sur la sanction qui va être prononcée contre l’avocat mis en examen. Il ne doit plus participer au vote, ni même au délibéré du Conseil de l’Ordre statuant en matière disciplinaire, puisqu’il est en réalité celui qui déclenche les poursuites. Son rôle dans le Conseil de discipline équivaut à celui d’un ministère public. Il pourra conclure et solliciter la sanction disciplinaire appropriée. Le Conseil de l’Ordre poursuit et réprime, d’office ou sur les plaintes qui lui sont adressées, les infractions et les fautes commises par les avocats inscrits au tableau des avocats ou sur la liste du stage. Il applique, s’il y a lieu, les peines disciplinaires édictées par l’article 62 de la loi n° 08.29 du 20 octobre 2008. Le Conseil de l’Ordre peut classer sans suite ou poursuivre, selon que la plainte lui parait fondée ou non. S’il poursuit, il décide en même temps d’ouvrir une instruction en sauvegardant tous les droits de la défense. C’est ainsi que l’avocat mis en examen doit recevoir communication de toutes les pièces et avoir des délais suffisants.
Aussi, en ce qui concerne le rapporteur de l’audience, son rôle s’apparentera à celui d’un juge d’instruction, en ce sens qu’il aura à instruire à charge et à décharge. Il sera désigné par le bâtonnier en tant qu’autorité de poursuite et ne siégera bien entendu pas dans la juridiction de jugement. Ainsi, les fonctions de poursuite d’instruction et de jugement seront très nettement séparées pour garantir l’impartialité des membres chargés du rapport. Le rapporteur a pour mission de rassembler et de vérifier les documents utiles à l’affaire d’entendre des témoins, d’interroger le prévenu, de procéder à des confrontations. Ce processus trouve sa limite dans les droits de la défense. L’instruction du dossier peut être clôturée soit par une décision de non-lieu, soit par une décision de renvoi. Ces décisions doivent être notifiées, aussi bien à l’avocat, à l’avocat qui en a été l’objet, qu'au ministère public et le plaignant doit en être avisé.
Le client est tenu au courant des poursuites disciplinaires et peut même, dans certaines conditions, être entendu. En effet, il a le droit d’être informé par le sort de la procédure pour contester la décision et exercer son droit de recours éventuel en matière disciplinaire contre cette décision, sans assister à l’audience. Le plaignant conserve le droit de mettre en cause la responsabilité de son avocat devant les tribunaux ordinaires, civils ou pénaux, selon la nature et la gravité de sa faute. La responsabilité de l’avocat est assurée, en cas de faute ou d’erreur, par une assurance responsabilité civile professionnelle souscrite par le barreau.

C- Le rôle du ministère public et de la chambre du conseil dans la procédure disciplinaire
Les organes judiciaires exercent sur les barreaux un pouvoir hiérarchique de surveillance et de contrôle. Ainsi, c’est le procureur général du Roi, gardien de l’ordre public, qui exerce cette surveillance indirecte sur le barreau, il peut faire appel de la décision rendue par le Conseil de l’Ordre des avocats devant la Chambre du conseil à la Cour d’appel. La Chambre du Conseil convoque l’avocat et son assistant pour réexaminer le dossier.
Le recours formé par le Procureur général du Roi est recevable contre une décision du Conseil de l'Ordre statuant sur les modalités d'exécution de sanctions disciplinaires, celui-ci, chargé d'assurer et de surveiller l'exécution des peines disciplinaires et de la suspension provisoire aux termes de l'article 67 de la loi n° 08.29 du 29 octobre 2008, a au surplus, pouvoir de déférer à la Cour d'appel toute délibération ou décision de Conseil de l'Ordre contraire aux dispositions législatives ou réglementaires. L'exercice de l'action disciplinaire par le Conseil de l’Ordre ne met point obstacle aux poursuites que le ministère public ou le plaignant seraient fondés à intenter devant les tribunaux pour la répression des actes constituant des délits ou des crimes.

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