La rente est beaucoup plus répandue qu’on ne le pense
… c’est juste sa nature qui diffère…
Toutefois, nous pouvons isoler deux types de rentes dont les effets sur l'économie sont différents et nécessitent, par conséquent, des approches dissemblables :• La rente acquise ou encore la «rente de situation» est la situation où une entreprise tire profit d’un avantage que lui procure un dysfonctionnement permanent des marchés par action externe. Il s’agit typiquement des situations de monopole ou celles des entreprises évoluant dans des secteurs protégés de toute concurrence ou faisant l’objet d’une entente entre les producteurs. La rente acquise est, dans ces cas, définitive. Les entreprises de cette catégorie, bien que pouvant créer de la valeur pour leurs actionnaires, pénalisent leurs clients et jouissent injustement d’une situation avantageuse à laquelle les autres entreprises n’ont pas droit. • La rente conquise, en revanche, est la situation où les dirigeants arrivent à maintenir un niveau de rentabilité de leur investissement supérieur au coût du capital, grâce à des efforts de gestion. Cette rente conquise est, elle-même, subdivisée en deux sous-catégories. Les rentes conquises de croissance correspondent à des situations où certaines entreprises réussissent, en innovant, à offrir à leurs clients des produits et/ou services supérieurs aux concurrents et pour lesquels ils sont prêts à payer un prix plus élevé. Les rentes conquises d’économie correspondent à des situations où certaines entreprises réussissent, en innovant, à mettre en place des processus efficients de maîtrise des coûts, offrant à leurs clients des produits et/ou services comparables aux concurrents, à des prix moins chers. Dans les deux cas, ces entreprises permettent à leurs actionnaires une rentabilité supérieure au coût du capital, jusqu’à ce que la concurrence rattrape son retard et élimine cette rente. La rente conquise est donc provisoire. Elle est l’expression des dysfonctionnements momentanés des marchés.… et donc le traitement à administrer
Dans le premier cas de rente acquise, cette situation doit être purement et simplement supprimée par l’État. Dans le deuxième cas, en l'absence d'une autorégulation par le marché permettant une réallocation optimale des capitaux et pour éviter que la rente ne soit concentrée entre les mains d'une minorité, générant de grandes inégalités sociales, l'État doit agir pour assurer l'optimisation du circuit économique, à travers deux actions. La première est un contrôle des prix de vente des biens et services pour les ramener à un niveau qui élimine la constitution de la rente, notamment pour les biens de consommation de base, l'immobilier, les médicaments, etc. la seconde est d’imposer fortement celle-ci et injecter le produit directement dans le budget de l’investissement du pays. La rente est par essence mauvaise, car il s'agit d'un Frankenstein de l'économie, un être déformé et maléfique. Ses coûts pour la compétitivité de l'économie nationale et la cohésion sociale dépassent de loin ses «possibles» bienfaits pour quelques actionnaires !Par Nabil Adel Nabil Adel est Chef d'entreprise, chroniqueur, essayiste et enseignant-chercheur à l'ESCA - École de Management.