Le Matin : Quelle lecture faites-vous de l’approche de la régionalisation avancée ?
À votre avis, quels sont les défis qui restent à relever et qu’est-ce qui fait que le chantier de la régionalisation n’a pas encore atteint sa vitesse de croisière ?
Je pense que cela est dû à beaucoup de raisons complexes. Il y a d’abord l’habitude. Il y a un gouvernement et les services administratifs qui y sont rattachés et qui sont essentiellement tous basés à Rabat. Il est vrai que ces services ont des représentations dans les différentes régions, mais celles-ci n’ont pas nécessairement le pouvoir de décision. Il y a également la question de la capacité à décliner ces politiques publiques sur le terrain. En ce sens que l’appareil administratif doit s’imbriquer également avec les élus. En même temps, me semble-t-il, il y a beaucoup d’espace pour faire des progrès, il y a un certain nombre de régions qui ont réussi à faire des choses. Par ailleurs, il est fondamental de garder en tête que l’objectif est le citoyen et que c’est lui (l’individu, son quartier, sa ville) qui doit être au cœur de ce processus de déconcentration. Cela suppose aussi de faire les choses différemment. D’où la nécessité de s’acclimater. Donc les formations sont aussi indispensables. À la fin, je pense qu’il faut créer des espaces pour permettre une certaine forme d’expression de ces politiques publiques en écoutant les populations. C’est là que se feront les innovations. L’idée n’est pas de mettre en place un plan qu’il faut décliner à tous les niveaux. Non, il faut permettre à ces innovations de prendre place au plus proche des citoyens. Qu’ils puissent eux-mêmes imaginer, en collaboration avec leurs élus et les entités de l’administration, le type de politiques publiques qu’ils souhaitent avoir pour leurs villes. Je crois que c’est un peu ça qu’il faut essayer de faire. Ça me semble possible, mais ça demande beaucoup d’efforts, du leadership, de l’abnégation et du militantisme.Vous avez participé au Strategic African Conclave. Quelles idées avez-vous le plus retenues ?
C’était intéressant comme rencontre parce qu’elle a permis de réunir des praticiens (élus, ministres…) avec des gens du monde académique comme c’est le cas de l’OCP Policy Center. Je pense que tout le monde converge vers la nécessité d’aller plus vite, d’être plus efficace, plus à l’écoute… et de décliner ceci de manière opérationnelle. Il est vrai que c’est plus facile à dire qu’à faire, mais je pense qu’on peut aussi tenter des expériences pilotes notamment en créant les espaces dont j’ai parlé tout à l’heure.