À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose célébrée le 24 mars, le ministère de la Santé a organisé, lundi dernier à Rabat, la Rencontre nationale pour l’élaboration du plan d’action multisectoriel pour l’élimination de la tuberculose à l’horizon 2030. Lors de cette rencontre, le ministre de la Santé, Anas Doukkali, a indiqué que son département enregistre près de 30.000 cas de tuberculose chaque année, y compris les nouveaux cas et les cas de rechute. Le taux d’incidence avoisine les 87 cas pour 100.000 habitants, dont la tuberculose pulmonaire représente la moitié, a précisé Anas Doukkali dans son allocution.
Il a relevé que cette maladie affecte les jeunes de 15 à 45 ans, ajoutant que parmi les causes de la propagation de cette pathologie figurent les facteurs socio-économiques, notamment les conditions d’habitat, la pauvreté et la malnutrition. Dans le même sillage, M. Doukkali a indiqué que 70% des malades vivent dans les quartiers marginaux des grandes villes, notant que les dernières statistiques montrent que 86% des cas ont été enregistrés dans six régions, totalisant une moyenne de 78% de la population du Royaume, à savoir Casablanca-Settat, Rabat-Salé-Kénitra, Tanger-Tétouan-Al Hoceïma, Fès-Meknès, Marrakech-Safi et Souss-Massa.
Par ailleurs, le ministre a indiqué que le Maroc a réalisé des résultats significatifs dans la lutte contre la tuberculeuse, concernant le sixième Objectif du millénaire pour le développement, après la régression de la tuberculose entre 1990 et 2015, rappelant que le taux d’incidence estimé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a diminué de 27%, selon les données de l’Organisation et que le taux de mortalité a baissé de 59%. Il a attribué ces résultats à la bonne performance du Programme national de lutte contre la tuberculose, reflétée notamment par les indicateurs de prévalence des cas de tuberculose, qui sont passés de 75 à 85%, ce qui a permis plus de diagnostics et de traitements pour les cas de tuberculose existants, le maintien du taux de réussite du traitement à plus de 86% depuis 1995 et la réduction du taux d’abandon de traitement à seulement 7,9%, tandis que le taux de prévalence de la tuberculose pharmacorésistante est resté très faible, avec 1% de résistance initiale et 11% de résistance secondaire.
Pour limiter la propagation de la maladie, M. Doukkali a ajouté que le ministère s’attelle à assurer un soutien financier annuel qui a plus que doublé, passant de 30 millions de DH en 2012 à 76 millions en 2018, en plus d’un soutien financier important des Conseils des régions et des communes, ainsi qu’un soutien continu du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, estimé à 32 millions de DH entre 2017 et 2021. Il a souligné que le ministère considère la tuberculose comme une priorité stratégique, mobilisant des ressources humaines et matérielles afin de la combattre, la diagnostiquer et la traiter dans le cadre du programme national de lutte contre la tuberculose, et ce à titre gratuit, faisant observer que la prise en charge d’un seul patient coûte de 520 à 1.330 DH, alors que pour un patient atteint de la tuberculose pharmacorésistante, le coût varie de 13.500 à 60.000 DH, sans compter les salaires et les budgets d’infrastructure et d’équipement. Dans ce contexte, le ministère a mis en place un réseau intégré de 26 centres spécialisés dans le diagnostic et le traitement de la tuberculose et des maladies respiratoires, outre les établissements de santé et les cliniques privés dans certains quartiers. Ainsi, des ressources importantes ont été affectées au cours des quatre dernières années pour doter ces centres de méthodes de détection et de diagnostic modernes. Anas Doukkali a ajouté que le Programme national de lutte contre la tuberculose consistait à veiller à l’élaboration du Plan stratégique national pour la période 2018-2021, qui vise à réduire de 40% le nombre de décès liés à la tuberculose d’ici à 2021. Le programme vise en particulier à porter le nombre annuel de cas dépistés à 36.300, à atteindre un taux de réussite du traitement d’au moins 90% d’ici 2021, à augmenter le taux de détection de la tuberculose pharmacorésistante à 75% et à atteindre un taux de réussite du traitement d’au moins 80% d’ici 2021.
De son côté, le directeur de l’épidémiologie et de la lutte contre les maladies au ministère de la Santé a indiqué, dans une déclaration à la presse, qu’un cadre multisectoriel pour l’élimination de la tuberculose sera élaboré d’ici 2030, selon une approche globale, prenant également en considération le volet des droits de l’Homme, afin d’éliminer les facteurs de risque et les facteurs socio-économiques considérés comme un déterminant clé de la propagation de la tuberculose au Maroc et dans le monde. Cette réunion visait à créer un cadre unifié pour un plan national opérationnel, doté de mécanismes permettant de suivre ce plan d’action visant à éliminer la tuberculose d’ici 2030.
Intervenant à cette occasion, la représentante résidente de l’OMS, Maryam Bigdeli, a souligné que la tuberculose est une des dix premières causes de mortalité dans le monde et la première cause de décès due à un agent infectieux unique, ajoutant que le 1/4 de la population mondiale est affecté par le bacille tuberculeux. Elle a, également, affirmé que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 couvre tous les aspects des droits humains, y compris les droits économiques, civils, culturels, politiques, sociaux et le droit au développement. «L’approche des droits humains participe ainsi à une meilleure prémunition de la population contre la tuberculose, à travers une meilleure hygiène de vie, meilleures conditions d’habitat et de travail, et permet de mieux prendre en charge les patients dépistés», a-t-elle dit.
La présidente du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), Amina Bouayach, a indiqué, par la même occasion, que le taux de multi-résistance de cette maladie constitue, non seulement un bon reflet du niveau de développement social et économique dans le pays, mais aussi un indicateur probant de l’atteinte des Objectifs de développement durable. «La célébration de la Journée mondiale de lutte contre la tuberculose est l’occasion pour nous tous, au Maroc et ailleurs, de sensibiliser l’opinion aux caractéristiques et aux effets de cette maladie, mais également un moment d’évaluation, de débat et surtout d’action», a-t-elle poursuivi. Cette rencontre a été marquée par la signature d’une convention-cadre de partenariat entre le ministère de la Santé et le CNDH, en matière des droits humains et de lutte contre la tuberculose.