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Cessez de juger les autres, soyez dans l’écoute !

Dans le monde professionnel, les jugements sont très fréquents. Or les spécialistes en développement personnel ne cessent de le répéter : nos jugements, notamment ceux qui sont négatifs, peuvent avoir des impacts néfastes sur nos relations professionnelles. Comment expliquer cette attitude et par quels moyens peut-on y faire face ? Le point avec Sanae Hanine, formatrice en développement personnel et en communication non violente.

Cessez de juger les autres, soyez dans l’écoute !
«En jugeant les autres, nous augmentons leur résistance à coopérer.»

Conseil : Quels sont les impacts des jugements sur nos relations professionnelles ?

Sanae Hanine
: Je commence par un aphorisme très connu d’Albert Einstein qui dit : «Il est plus difficile d’éliminer un préjugé que de diviser un atome». Il démontre que nos jugements ont vraiment la peau dure et qu’il nous est très difficile de nous en défaire. Ce qu’il faut noter, c’est leur grand impact sur nos relations personnelles et professionnelles et dont la portée peut être très néfaste et peut nous pousser à agir contre notre propre intérêt. Avant de discuter des impacts des jugements dans la sphère professionnelle, comprenons d’abord le processus de formation de nos jugements pour prendre conscience de leurs limites, voire de leurs aberrations. La formation d'un jugement consiste à produire des inférences à partir d'informations, ce qui implique plusieurs étapes de traitement de méta-information au niveau cérébral qui sont autant des sources de biais potentiels. Cependant, il se trouve que les informations sur lesquelles notre cerveau se base pour émettre un jugement ne sont pas toujours factuelles, congruentes et rationnelles. Nos jugements se basent, dans une large mesure, sur les stéréotypes et les préjugés qui les biaisent et les dénaturent. Le deuxième facteur qui renforce la subjectivité des jugements est lié à la valence émotionnelle. Les sentiments positifs ont la grande probabilité de nous pousser à émettre un jugement positif contrairement aux affects négatifs tels que la haine, la peur, la jalousie, etc. Ils conduisent en grande partie à des jugements négatifs. Partant de ces constats, les jugements en milieu professionnel posent la problématique de l'objectivité, de l’impartialité, voire de la rationalité de la prise de décision.

En effet, lorsqu’un supérieur hiérarchique émet un jugement biaisé sur un collaborateur, leur relation s’en trouve affectée certainement et pas pour le meilleur. En fait, les jugements exercent la qualité de filtre qui nous empêche d’avoir une vue d’ensemble des qualités de l’autre et ne nous permettent pas de voir la situation dans sa globalité. Nos jugements émanent de notre modèle du monde, qui n’est pas forcément le même que celui de notre collègue, de notre supérieur hiérarchique ou de nos clients.

Concrètement, comment expliquer cette attitude de coller des étiquettes aux autres ? 

Nos jugements envers les autres expriment paradoxalement quelque chose qui nous est propre et à laquelle nous ne voulons pas faire face. Les émotions comme la peur, l’affection et la haine expliquent la plupart des cas où les gens se départent de leur rationalité et sont prompts à émettre des jugements sur les autres. En effet, l’étiquetage des autres est une manière de les nier. Labelliser les gens qui ne sont pas alignés sur nos valeurs et notre vision du monde est une manière tragique de se comporter avec eux. Au lieu de se focaliser sur les besoins mutuels, les étiquettes donnent lieu à des comportements toxiques : blâmes, insultes, commérages, dénigrements, critiques, etc. En jugeant les autres, nous augmentons leur résistance à coopérer. Le fait de coller des étiquettes aux gens ou de les évaluer est une manière catastrophique de communiquer et réduit grandement, quasiment à zéro, la possibilité d’obtenir ce que nous voulons d’eux. Donc, il faut faire un effort, ne pas répondre aux chants des sirènes et éviter de voir les choses uniquement de notre perspective.

Qu'en est-il de l'auto-jugement ? 

Ce qu’il faut noter c’est que l’auto-jugement est un manque flagrant de curiosité intellectuelle. Plus nous nous jugeons, moins nous nous donnons la possibilité de nous aimer et d’aimer les autres. Nos jugements envers nous-mêmes sont une manifestation tragique d’une distorsion de notre réalité. Plusieurs personnes émettent des jugements très sévères envers eux-mêmes. Ils se croient limités, imparfaits, trop ceci ou trop cela, ce qui engendre une grande souffrance psychique. Il faut renverser cette tendance et voir ce qui est vivant en nous et prendre conscience du potentiel immense que nous enfermons dans notre esprit et notre cœur. S’auto-juger c’est aussi être aveugle aux immenses potentialités dont regorge notre environnement que ce soit au niveau des relations, des opportunités ou tout simplement notre besoin d’«être bien».

Un travail sur soi s'impose-t-il donc pour faire face à cela ?

Exactement, ce travail sur soi commence par une prise de conscience des limites de nos jugements et de leur caractère irrationnel. Il faut être également conscient de leur impact néfaste sur les relations interpersonnelles et leur incidence sur l’atteinte de nos objectifs. 

Il s’agit donc de bien faire attention à la genèse des jugements et essayer de les rationaliser en collectant un maximum d’informations sur une situation donnée. Autre panacée qu’on peut utiliser consiste à toujours chercher la bonne intention chez l’autre. Généralement, il existe derrière chaque pensée, chaque acte une bonne intention dont nous n’arrivons pas toujours à déceler la portée. 

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