Menu
Search
Mardi 19 Mars 2024
S'abonner
close
Accueil next Économie

Le collaborateur hypersensible, un atout pour l’entreprise ?

Par définition, l’hypersensibilité est une sensibilité plus haute que la moyenne détectée chez une personne. Certes, «il ne s’agit ni d’une maladie, ni d’un handicap, mais elle crée une fatigue physique et psychique», clarifie Karima Rihani, psychosociologue et coach de performance en entreprise. Et de préciser que l’hypersensibilité d’un collaborateur peut être un véritable atout pour l’entreprise, encore faut-il la canaliser.

Le collaborateur hypersensible,  un atout pour l’entreprise ?
Il faut choisir les mots et les expressions quand on s’adresse à un hypersensible, car on risque de le perdre en tant que bon élément.

Conseil : Comment définir l’hypersensibilité en milieu professionnel ?
Karima Rihani :
L’hypersensibilité est un trait de personnalité. En effet, quand un collaborateur hypersensible est détecté au travail c’est parce qu’il a des réactions et des attitudes émanant du fait que sa sensibilité est amplifiée. Les mains moites, une timidité, une nervosité… ses réactions montrent qu’il ne se sent pas bien dans sa vie. On se sent ainsi dans cette obligation de le juger, ce qui n’est pas bien du fait que juger une personne c’est lui mettre une étiquette. Or cela n’est pas recommandé dans les relations professionnelles. Notons que l’hypersensibilité, si elle est bien canalisée, peut être un atout incroyable parce qu’elle se base sur des qualités. 

 Outre le fait qu’il s’agit d’un trait de caractère, y a-t-il des facteurs qui peuvent expliquer l’hypersensibilité au travail ? 
Il n’y a pas de facteurs prédéfinis, mais il y a plutôt des traits de caractère qui permettent de reconnaître une personne hypersensible. Je cite, à titre d’exemple, les personnes qui se sentent visées à n’importe quelle remarque émanant du N+1, mais aussi les collaborateurs qui pensent à plusieurs reprises à un mot ou à une remarque précise. Ces personnes doutent d’elles-mêmes et c’est leur estime de soi qui est touchée. C’est vrai que l’hypersensibilité n’est ni une maladie, ni un handicap, mais elle crée une fatigue psychique et physique, ce qui pourrait influencer négativement la santé mentale de la personne concernée. C’est dire que si on se détecte hypersensible, il faut se faire accompagner par une personne qui peut nous aider à canaliser nos émotions. Je tiens aussi à souligner qu’il ne faut pas faire de toute remarque ou de tout geste une affaire personnelle. Il est aussi recommandé de délimiter les champs d’action entre la vie privée et la vie professionnelle. Côté manager, il faut choisir les mots et les expressions quand on s’adresse à un hypersensible, car on risque de le perdre en tant que bon élément.

 Quels sont les impacts de cette attitude aussi bien sur le bien-être du collaborateur que sur le reste de l'équipe ?
L’hypersensible a du mal à travailler en équipe. D’ailleurs, les open-spaces qui sont aujourd’hui à la mode ne constituent pas un espace favorable de travail pour un hypersensible, car il ne s’y retrouvera pas. Cela s’explique par le fait que le moindre bruit, le moindre regard ou le moindre geste pourrait l’affecter et le déstabiliser. L’hypersensible pourrait ainsi avoir des réactions qu’on risque de juger de faiblesse et d’incapacité à gérer les émotions et à travailler en équipe. Ce ne sont que de fausses idées. Je tiens aussi à préciser qu’il y a beaucoup de genres d’hypersensibles : le timide, le nerveux et le collaborateur qui se replie sur lui-même. Le collaborateur hypersensible peut affecter négativement le fonctionnement de l’équipe, mais si cette dernière, avec l’appui du N+1, le prend en charge, il sera un véritable atout pour l’entreprise et aussi un profil créatif. Notons que la créativité, l’intuition et l’empathie sont les clés de l’hypersensible. Une réalité que peu de managers des ressources humaines admettent et intègrent dans leurs pratiques. Plusieurs managers RH continuent de considérer que ce profil n’est pas apte à chapeauter une équipe. 

Comment composer avec un collaborateur hypersensible ?
Il faut d’abord le canaliser. Souvent, on confond le manque de respect et l’hypersensibilité. Qu'est-ce qui fait qu’une personne ne tolère pas la remarque ?   Pourquoi n’accepte-t-elle pas les critiques ? Ce sont des questions qu’un N+1 peut se poser, vu l’attitude d’un collaborateur hypersensible qui a tendance à se replier sur lui-même. Généralement, on se dit qu’il s’agit d’un collaborateur qui ne respecte pas sa hiérarchie et ses collègues, et on oublie qu’il peut être un hypersensible qui a besoin d’être accompagné. 
À mon avis, pour reconnaître un hypersensible, il faut prendre le recul nécessaire afin de l’observer et analyser ses attitudes. Pour composer avec lui, je recommande fortement de l’écouter, de lui donner le champ d’action nécessaire et de ne pas lui faire de la pression. Il faut aussi choisir ses mots et ses expressions et éviter de le blesser. En cas de conflit avec un autre collaborateur, je recommande de l’écouter activement et de l’aider à ne pas prendre les choses à cœur. Je tiens aussi à préciser qu’un hypersensible est quelqu’un qui analyse tout et c’est ce qui crée chez lui de la créativité, ce qui fait qu’il peut être un bon leader, car aujourd’hui, on ne cherche pas des personnes qui gèrent les entreprises de manière ordinaire. On est plutôt en quête des personnes qui gérent une équipe de façon originale.  

Lisez nos e-Papers