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Ces facteurs qui tuent la motivation des collaborateurs !

La démotivation semble gagner du terrain en milieu professionnel. Dans une conjoncture pareille, les collaborateurs ont le moral en berne, n’ont plus cette envie d’accomplir leurs missions et d’être une force de proposition et ne font plus preuve d’innovation. Une situation de morosité qui doit interpeller les managers et les pousser à en identifier, en urgence, les raisons et les pistes pour sortir de cette impasse. Absence d’une stratégie d’évolution de carrière, rémunération, manque de reconnaissance, mode de management, autant d’éléments qui peuvent être à l’origine de ce phénomène qui doit être bien géré d’autant plus qu’il est contagieux !

Ces facteurs qui tuent la motivation des collaborateurs !

L’importance de la motivation des collaborateurs n’est plus à prouver. Face à un environnement rude et concurrentiel, ce sont les collaborateurs motivés et engagés qui peuvent permettre à l’entreprise d’assurer son développement stratégique, à travers leur esprit d’innovation et de créativité. Toutefois et malheureusement, au niveau des entreprises marocaines, la motivation n’est pas toujours au rendez-vous. En témoigne la dernière enquête du portail de l’emploi au Maroc, Rekrute.com, menée auprès de 1.926 profils marocains. L’enquête a permis de ressortir de grandes conclusions, notamment que près de 72% des cadres marocains sont démotivés (contre 60% en 2017). L’enquête a été réalisée, certes, auprès des cadres marocains, mais il faut savoir que la démotivation est un phénomène contagieux et, qu’une fois installée, elle peut embarquer d’autres personnes dans le même navire. Comment faire face à cette situation ? Quels plans prévoir pour redresser le moral des collaborateurs ? Avant de tenter d’apporter des éléments de réponse à ces questions, il convient d’abord de vérifier les causes de ce phénomène. Selon les résultats de l’étude, la rémunération reste le premier facteur de démotivation des cadres marocains, suivi par l’absence d’évolution de carrière et le manque de reconnaissance. Même son de cloche auprès de Hanane Anguer, responsable pôle Recrutement au Groupe Solano-Chrono Interim, qui explique que pour gagner la guerre des talents et pour mieux fidéliser les collaborateurs, il est important de vérifier, entre autres, la rémunération et le plan d’évolution de carrière des collaborateurs. Pour sa part, Samira Aajlane, directeur Transformation RH dans une multinationale, Executive coach et psychothérapeute, «la rémunération insuffisante et l’absence de reconnaissance sont souvent synonymes de démotivation, mais cela ne constitue que la partie visible de l’iceberg». L’experte ajoute d’autres causes telles que la nature du travail accompli par le collaborateur, l’ambiance au bureau ainsi que la surcharge du travail et les conflits avec le manager.

Autres facteurs et non des moindres : la gouvernance, la stratégie de l’entreprise et le mode de management adopté en interne. «Aussi surprenant que cela puisse paraître, mais l’attitude de la direction et la stratégie de l’entreprise restent des facteurs clés de la démotivation des collaborateurs», souligne Samira Aajlane. Un avis qui a été appuyé par Hanane Anguer qui souligne qu’un manager qui compte sur son autorité pour gagner le respect et la confiance de son entourage ne pourra jamais motiver ses équipes ou apporter un changement positif. 

La démotivation, mieux vaut prévenir que guérir

Quelles que soient les raisons de la démotivation, il faut souligner que les conséquences sont très néfastes sur le plan individuel et collectif. «La baisse de productivité, la dégradation de la qualité de service, le sabotage du travail par les collaborateurs démotivés et la baisse de performance individuelle et collective, sont entre autres, les principales conséquences de la démotivation d’un collaborateur», souligne Samira Aajlane. C’est dire que le phénomène n’est pas à prendre à la légère, d’autant plus que «si un collaborateur est démotivé, il devient difficile à gérer et il peut parvenir à la démotivation du reste des équipes en instaurant un climat négatif», ajoute pour sa part Hanane Anguer.          

Afin de gérer ce phénomène, les experts RH contactés par «Management & Carrière» mettent en avant l’importance de multiplier les actions visant à améliorer le bien-être et par conséquent la performance des collaborateurs, notamment les team-builduing, les formations et les plans d’évolution de carrière. Ces experts soulignent également l’importance de prévenir en amont la démotivation des collaborateurs. «Avant d’arriver au stade de la démotivation, le collaborateur commence déjà par donner inconsciemment quelques signes d’essoufflement», indique Samira Aajlane. Les arrêts de maladie répétitifs, le manque d’implication, les sauts d’humeur et l’isolement sont, notamment des signes avant-coureurs chez un collaborateur proche à la démotivation. «Il incombe à sa hiérarchie de les repérer afin de pouvoir gérer cet état tellement contagieux», souligne Samira Aajlane. Et d’ajouter que le chef d’équipe doit adopter la posture du manager coach et un style de management de proximité tout en étant à l’écoute de ses collaborateurs, de leurs besoins, de leurs attentes, mais aussi de leurs contraintes. L’enjeu est de taille, car, rappelons-le, les entreprises opèrent dans une conjoncture difficile et le capital humain reste le seul moyen pour se différencier et grandir. À cela s’ajoute qu’une autre génération dite Z intègre déjà le marché de l’emploi. Elle est différente de celles qui la précèdent et privilégie le bien-être sur le salaire. Pour elle, le bonheur et le plaisir se consomment dans le lien de travail. Le chef d’équipe doit donc de se défaire de son rôle de chef hiérarchique pour se rapprocher de ses collaborateurs en jouant le rôle de mentor de proximité. C’est le seul et unique moyen pour fidéliser ces collaborateurs qui, s’ils sont mis dans de bonnes conditions, donnent de meilleurs résultats. 


Philippe Montant, DG de ReKrute.com

«69% des cadres démotivés le sont toujours principalement à cause d’une absence d’évolution de carrière. Le niveau de motivation est étroitement lié aux perspectives d’évolution au sein de l’entreprise. Étant la première source de motivation des cadres, la rémunération est aujourd’hui très importante et cause la démotivation de 66% des cadres marocains. Le manque de reconnaissance professionnelle démotive 66% des cadres en 2019. La non-reconnaissance au travail peut en effet rapidement devenir un facteur de mal-être et de souffrance. La majorité des entreprises ne prend toujours pas les mesures nécessaires pour améliorer le bien-être des collaborateurs. L’importance du bien-être au travail n’est plus à prouver ! Aujourd’hui, il est essentiel pour l’organisation de multiplier les actions, non seulement pour rendre ses salariés heureux, mais aussi pour augmenter leur performance globale. Par exemple : team building, mise en place de plans de carrière pour les collaborateurs, plans de formations…»


Hanane Anguer, responsable pôle Recrutement au Groupe Solano-Chrono Interim

«Pour regagner la motivation et l’implication des collaborateurs, il faut tout d’abord revoir le rôle du manager et son style de management. En effet, un manager qui compte sur son autorité pour gagner le respect et la confiance de son entourage ne pourra jamais motiver ses équipes ou apporter un changement positif. Il faut donc apporter des changements et travailler son savoir-être et son savoir-faire, car un bon leader finira toujours par gagner la confiance 

et le respect des autres. Je souligne aussi 

que le manager doit être l’exemple pour les autres en respectant les valeurs et les principes de l’entreprise. Autre astuce : savoir déléguer et faire confiance à ses collaborateurs sont des facteurs qui permettent de gagner la motivation des équipes.»


Entretien avec Samira Aajlane, directrice Transformation RH dans une multinationale, Executive coach et psychothérapeute

«L’attitude de la direction et la stratégie de l’entreprise sont, à mon avis, des facteurs clés de la démotivation des collaborateurs»​

Management & Carrière : Quelles sont les raisons qui expliquent la démotivation des collaborateurs en entreprise ?

Samira Aajlane : On parle d’un collaborateur démotivé quand il a perdu toute envie de fournir des efforts ou de continuer de s’investir pour produire dans son travail. Quand elle s’installe, la démotivation devient contagieuse avec des conséquences dangereuses sur l’entreprise et sur les collaborateurs. La liste des raisons de la démotivation est non exhaustive. Nous en citerons les principales, quoique cela reste très relatif puisque tout dépend, notamment du ressenti, du cadre de références, des schémas psychologiques, des croyances de chaque collaborateur. Rémunération insuffisante et absence de reconnaissance sont souvent synonymes de démotivation, mais cela ne constitue que la partie visible de l’iceberg. Grâce aux sondages organisés par des observatoires nationaux et internationaux, l’entreprise a compris que les raisons sont bien multiples et peuvent parfois cacher des aspects complexes dont la négligence ne rend guère service à sa pérennité. Il s’agit, entre autres, du manque de visibilité d’évolution de carrière, de l’insécurité professionnelle, de la nature du travail, de la mauvaise ambiance au bureau, mais aussi de la rivalité au travail. À ces éléments s’ajoutent, la surcharge du travail, les objectifs mal définis ainsi que les conflits avec management et le non-investissement dans la formation et dans le développement des compétences des collaborateurs. Ces raisons ne sont pas citées par ordre d’importance, mais si j’avais à mettre une en tête de cette liste, je mettrais sans hésitation la gouvernance et la stratégie de l’entreprise. Aussi surprenant que cela puisse paraitre, mais l’attitude de la direction et la stratégie de l’entreprise sont à mon avis des facteurs clés de la démotivation des collaborateurs. En effet, le manque (intentionnel ou pas) des instances de gouvernance ou de communication au sein de l’entreprise coupe le lien entre la vision et le collaborateur, ce qui pourrait être fatal. Autre facteur de démotivation : le déséquilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle. Quand le travail empêche le collaborateur de s’épanouir personnellement, un malaise s’installe et le pousse à chercher ailleurs.

Vous avez cité la surcharge du travail comme un élément clé de la démotivation des collaborateurs. Pourriez-vous nous en dire plus ?

La surcharge de travail est un élément qui pourrait être contraignant aussi bien pour le collaborateur que pour l’entreprise. Dès lors que la surcharge du travail s’installe, il est très difficile malheureusement de l’arrêter et de changer le processus. Elle va créer un contexte de pression, ce qui va provoquer un état de fatigue mentale et corporelle conduisant insidieusement au surmenage. Ce dernier pourrait aboutir à des arrêts maladies répétitifs et dont la durée augmente avec le temps. En conséquence, la personne se déconnecte de son milieu de travail. Cette situation génère de la surcharge chez les autres collaborateurs qui doivent rattraper le retard de l’activité, et ce n’est pas fini ! À la reprise du travail, ce collaborateur doit faire face à plusieurs difficultés qui ne font que consolider sa démotivation ; j’en cite :

• Le devoir de rattraper le retard et par conséquent une charge de travail plus importante.

• La nouvelle image aux yeux de sa hiérarchie comme étant un élément faible ayant craqué.

• La non-indispensabilité puisqu’il a pu être remplacé sans citer les soupçons liés aux congés maladies injustifiés.

• Le temps de réadaptation en entreprise qui risque de générer une période de moindre productivité n’étant pas en sa faveur dans un contexte de compétitivité et de rivalité.

comment détecter la démotivation d’un collaborateur en entreprise ?

Avant d’arriver au stade de la démotivation, le collaborateur commence déjà par donner inconsciemment quelques signes d’essoufflement. Il incombe à sa hiérarchie de les repérer afin de pouvoir gérer cet état tellement contagieux. Le collaborateur va commencer par exemple à se replier sur lui-même, à s’isoler, à sentir une fatigue inexpliquée ou un stress qui ne cesse d’augmenter. Dans quelques cas, le collaborateur peut faire preuve d’une irritabilité qui peut mener parfois à des comportements agressifs. Si le collaborateur n’est pas pris en charge et encadré à temps, ces signes pourraient se développer davantage et la situation devient irréversible. Une fois au stade supérieur, les absences deviennent répétées, parfois, sans motif justifié, les erreurs et la négligence au travail s’accumulent. D’autres changements pourraient aussi être observés :

• Manque d’implication, surtout par exemple pour un collaborateur habituellement dynamique.

• Changement inopiné de comportement et d’habitudes.

• Arrêts maladie à répétition.

• Silence inexpliqué qui est souvent un signe de désengagement.

• Impression d’être continuellement préoccupé (la tête ailleurs).

• Désengagement total et manque de sens de responsabilité

• Manque d’attention et de concentration.

• Sautes d’humeur.

On pourrait ajouter à cette liste tous les autres signes d’ordre symptomatique notamment les différents malaises et maladies de nature psychosomatique résultant de démotivation et de stress. Il s’agit, à titre d’exemple, des maladies digestives, des troubles cardiovasculaires, des complications psychiatriques, des troubles dermatologiques et des fragilités immunitaires. Je conseille aux managers de rester attentifs à l’aspect contagieux de la démotivation qui peut embarquer d’autres personnes dans le même navire. Ceci dit, les compétences du «Manager Coach» sont primordiales pour rester à l’écoute de ce qui se passe dans son équipe. En revanche, observer et émettre des hypothèses sont de bonnes attitudes à adopter pour anticiper et gérer les dégâts, mais cela ne doit en aucun cas induire en erreur les managers, car après tout, tout pronostic n’est pas forcément bon ! Tout repli sur soi n’est pas forcément une démotivation, cela peut simplement concerner une personne timide qui pourrait être prise en charge différemment, et une accumulation d’arrêt maladie voudrait dire que le salarié est vraiment malade et il a besoin d’aide. Tout cela, sans que le salarié soit forcément démotivé. La communication et l’écoute active restent les moyens les plus sûrs pour vérifier tout cela.

Quelles actions envisager pour permettre au collaborateur d'être plus motivé ?

Il existe plusieurs leviers sur lesquels l’entreprise devrait se focaliser et s’appuyer pour remotiver ses collaborateurs et aussi anticiper et éviter ce fléau. Ces leviers se divisent en deux catégories : D’abord, des actions à titre individuel. Dans ce sens, l’entreprise doit documenter et communiquer d’une façon exhaustive tout ce qui pourrait concerner le collaborateur d’une façon individuelle, notamment sa mission, ses objectifs clairs et précis, le sens de son travail, l’enjeu que représente son rôle pour l’entreprise, les moyens nécessaires pour accomplir ses missions, mais aussi le sens de son travail et la reconnaissance qu’il mérite. Ensuite, il y a des actions qu’on pourrait mener à titre collectif. Il s’agit, entre autres, de souder les liens entre les équipes, de promouvoir un climat de confiance, de responsabiliser les collaborateurs en favorisant l’autonomie de tous, d’encourager le développement des collaborateurs, mais aussi d’investir dans la formation et de promouvoir le rôle du Manager-Coach. J’insiste aussi sur l’importance d’instaurer la culture du «merci», d’accepter le droit à l’erreur et d’instituer la culture de l’acceptation de l’échec. Ceci dit, il y a des situations qui nécessitent en urgence le recadrage du collaborateur démotivé si ses missions et tâches relèvent d’un caractère risqué et dont la négligence pourrait être fatale et réversible pour l’entreprise. Il est primordial de gérer la démotivation dès que les premiers signes surviennent afin de la désamorcer au plus vite. Pour cela, la meilleure méthode à adopter est d’établir le dialogue. Cependant, il est important de noter que se faire assister par des professionnels d’accompagnement ne peut qu’accélérer la résolution de la situation de démotivation et permettre à l’entreprise de récolter incessamment les fruits de sa performance. 

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