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Fini le management directif, place au leadership d'influence !

Les différentes transformations que connaissent aujourd’hui les entreprises incitent les managers à adopter de nouveaux styles de management basés, entre autres, sur le leadership et le pouvoir d’influence. Or si certains managers sont déjà inscrits dans cette dynamique, d’autres n’y parviennent toujours pas. En cause notamment la difficulté de gérer les relations avec les autres et l’envie de tout contrôler. Conjugués au complexe de Peter Pan, ces facteurs sont à prendre très au sérieux.

Fini le management directif, place au leadership d'influence !

Un bon leader constitue la clé de succès de toute entreprise, quel que soit son secteur d’activité. La règle est valable aussi pour les petites et moyennes entreprises (PME) qui, faute de moyens, se concentrent beaucoup plus sur les objectifs à atteindre à court terme que sur les stratégies de bonne conduite. Dans la pratique, le style managérial 
vertical où l’autorité de gestion est exclusivement réservée au chef hiérarchique a démontré ses limites, place désormais au leadership et à l’autorité d’influence. «Pour une PME, le leadership demeure indispensable afin de mieux fédérer et diriger les affaires», souligne Youssef Guerraoui Filali, président du Centre marocain pour la gouvernance et le management. 
Et de confirmer que la relation patron-subalterne est devenue dépassée et ne permet pas le développement de ce genre d’entreprises. Pour lui, «l’exercice de l’autorité de l’influence basée sur le principe de réalisation d’un but commun et les relations de confiance mutuelle est nécessaire pour piloter l’exécution des actions et la réalisation du profit». 
En d’autres termes, le dirigeant d’une PME doit aujourd’hui être suffisamment influent pour pouvoir motiver son équipe et gagner en termes d’engagement et d’adhésion des collaborateurs. De même, «ce dirigeant est censé donner l’exemple en matière d’ouverture d’esprit afin d’inculquer à ses équipes une culture managériale fondée sur le partage des idées», note Youssef Guerraoui. Toutefois, force est de constater que le manager doit faire tout un travail sur lui-même pour développer ces compétences et être plus influent, mais qu'est-ce qui l’en empêche ? Comme déjà mentionné, le dirigeant d’une PME fait face à de multiples contraintes liées, notamment au financement et à l’accompagnement pouvant limiter le potentiel de développement de son business. Ces difficultés, conjuguées à une conjoncture économique difficile et à une clientèle de plus en plus exigeante, font que le patron de la PME n’arrive pas à se détacher du style managérial vertical pour évoluer vers un de leadership
 influent. 
Ce sont ces mêmes facteurs-là qui expliquent que «le patron de la PME marocaine manque d’audace et de vision stratégique, ce qui l’empêche de se projeter dans l’avenir», souligne-t-il. Il est à noter qu’outre ces facteurs externes, l’attitude de ce manager peut être expliquée par des facteurs internes liés plutôt à la personnalité du manager lui-même.

Quand le complexe de Peter Pan  fait obstacle
Le manque de confiance dans le climat des affaires, l’envie de tout contrôler, la difficulté de gérer les émotions et les relations… Nombreux sont les facteurs qui expliquent l’incapacité d’un patron d’une PME d’évoluer vers un leadership plutôt influent. Autre facteur et non des moindres : la peur de grandir et d’évoluer et c’est ce qu’on peut aussi appeler le complexe de Peter Pan. Un phénomène souvent négligé ou encore méconnu, mais qui peut coûter cher au manager et à son environnement. Largement popularisé par le psychanalyste Dan Kiley, qui en fit le titre d'un ouvrage paru en 1983, ce complexe désigne tout simplement «l’angoisse liée à l’idée de devenir adulte et le désir associé de rester enfant». 
Ce complexe a fait l’objet de plusieurs études, notamment un projet de mémoire de trois étudiants qui l’ont associé à l’évolution de la PME. 
Selon Hanane Anguer, consultante en ressources humaines, «un patron d’une PME qui a le complexe ou le syndrome Peter Pan aura du mal à se projeter dans l’avenir du fait que pour lui, l’évolution n’est pas un objectif de premier plan». Plus concrètement, cette peur de grandir se traduit par une réticence au changement et une incapacité de déléguer et de recruter, ce qui cause une stagnation. «Le complexe de Peter Pan reste un frein à l’évolution des managers des PME, ce qui se répercute sur l’évolution et la performance de ce type d’entreprises», alerte l’experte en RH. Pour sa part, Youssef Guerraoui, estime que le complexe de Peter Pan demeure présent dans l’esprit de la PME marocaine, mais ce n’est pas qu’un inconvénient. «C’est aussi une vigilance exprimée par le manager de la PME au regard des engagements financiers visant l’expansion et le développement, mais à répercussions économiques négatives surtout vis-à-vis de systèmes concurrentiels de plus en plus complexes», explique-t-il. Notons, en guise de conclusion, que le monde change et en conséquence le style de management doit évoluer et suivre le changement. Les managers des PME sont invités à revoir leur style de management et à miser sur la proximité vis-à-vis des collaborateurs. C’est le seul moyen qui leur permettra de gagner en performance et en efficacité dans un monde de plus en plus concurrentiel. 


Hanane Anguer, consultante en ressources humaines

«En management des PME, le leadership est indispensable. Pour gagner la confiance et l'adhésion de ses collaborateurs, le patron d’une entreprise doit développer ses compétences de leadership et doit miser sur l’écoute active et sur la proximité vis-à-vis des collaborateurs. Il doit aussi constituer un modèle pour eux, partant du principe que c’est par le biais de l’influence positive que l’on peut gagner le respect et l’estime des autres. À mon avis, l’un des grands défis pouvant constituer un frein c’est le patron lui-même et sa peur de l’évolution et du changement. Dans ce sens, on peut éventuellement rappeler le complexe de Peter Pan qui a été largement popularisé par le psychanalyste Dan Kiley en 1983. Il s’agit tout simplement de la peur de grandir et de devenir adulte. En management des ressources humaines, cela se traduit par la peur de déléguer et de recruter, ce qui cause une stagnation. Il se considère souvent comme le seul homme au sein de son entreprise. Autres défis : le refus de prendre des risques, d’innover et de sortir de la zone de confort. À mon avis, ce qui peut assurer le succès d’une PME c’est la nature de la relation que développent les collaborateurs avec leur patron. Ce dernier doit ainsi s’inscrire dans une démarche de développement continue.» 


Entretien avec Youssef Guerraoui Filali, président du Centre marocain pour la gouvernance et le management

«Le dirigeant de la PME doit jouer le rôle de motivateur d’équipes et faire preuve d’un sens d’écoute à l’égard de ses collaborateurs»

Management & Carrière : Quelle corrélation entre leadership et performance opérationnelle ?
Youssef Guerraoui Filali
: Tout d’abord, le leadership entrepreneurial consiste en la capacité d’un entrepreneur, supposé être leader, de se créer un espace professionnel dont les autres souhaiteront y appartenir.   Il s’agit de la capacité d’un dirigeant à mettre en œuvre des projets attractifs et créateurs de valeur, en parfaite adéquation avec la stratégie de son organisation et les attentes de ses équipes. Quant à la performance opérationnelle, elle reflète le niveau de mobilisation des efforts des collaborateurs dans un cycle opérationnel donné. De ce fait, la performance opérationnelle des équipes est une résultante de leur niveau d’engagement vis-à-vis du dirigeant «influenceur». Toutefois, il incombe au leader de manager l’action collective des équipes, à travers la motivation phycologique et le pilotage des actions, et ce, dans la perspective d’atteindre les objectifs prédéfinis 
de l’organisation.

Quelle est l’importance du leadership dans la gestion des PME ?
S’agissant de la PME, le leadership demeure indispensable pour mieux fédérer et diriger les affaires. L’atteinte des objectifs reste le point le plus crucial de la PME, considérée comme étant une composante essentielle du tissu économique marocain. La relation patron-subalterne est devenue dépassée et ne permet pas le développement de ce genre d’entreprise. L’exercice de l’autorité de l’influence, basée sur le principe de réalisation d’un but commun et les relations de confiance mutuelle, est nécessaire pour piloter l’exécution des actions et la réalisation du profit. Cependant, le leadership participatif ne doit pas être négligé dans ce genre d’entreprise. Le partage des responsabilités, des risques et des décisions est l'élément susceptible de hausser le niveau de motivation des équipes et, par conséquent, hausser les niveaux de productivité et de rentabilité.

Selon vous, existe-t-il réellement un leadership au sein des PME marocaines ?
Le leadership est la conséquence d’un management participatif par objectif (MPO), or la majorité des entreprises marocaines fonctionnent avec un style managérial vertical où l’autorité de gestion est exclusivement réservée au chef hiérarchique. Par conséquent, ce mode de pilotage bureaucratique ne permet pas à l’entreprise marocaine de s’inscrire dans des chaines de valeur à forte valeur ajoutée. Bien évidemment, d’autres entreprises marocaines, organisées sous forme de holding ou de groupe, sont structurées autour d’un fonctionnement horizontal par segments d’activité. Ce type d’entreprises est marqué par un mode de gestion axé sur le leadership managérial associant le pilotage de la performance à la motivation des compétences pour la réalisation des objectifs. Cependant, il va falloir généraliser ce mode de gouvernance au sein des entreprises marocaines, mais cela ne pourrait être faisable qu’à travers des formations pointues au profit des gérants et managers des entreprises (formation pour formateurs).

Concrètement, quels sont les comportements liés au leadership que le dirigeant d’une PME devrait adopter pour mieux conduire son entreprise vers la performance ?
Le dirigeant de la PME doit jouer le rôle de motivateur d’équipes et faire preuve d’un sens d’écoute à l’égard de ses collaborateurs. Il censé donner l’exemple en matière d’ouverture d’esprit afin d’inculquer à ses équipes une culture managériale fondée sur le partage des idées et la critique constructive. Le manager de la PME doit jouer son rôle d’accompagnateur tout au long de l’exercice de performance. Il doit agir en amant pour cibler des niveaux de performance élevés, et non pas en aval pour critiquer la non-atteinte des objectifs assignés. In fine, il s'agit d’un partage des responsabilités entre le patron «leader» et ses collaborateurs «suiveurs», marqué par un consensus autour de la réalisation des performances, en l’occurrence
 une contractualisation.

Quels leviers utiliser pour développer et améliorer la performance individuelle et collective ?
La mesure de la performance réalisée sur les plans financier et commercial (taux de couverture des charges par les recettes, taux de marge appliquée, chiffre d’affaires réalisé sur une période donnée…) permet de vérifier l’efficacité et la pertinence de la stratégie et de la politique de l’entreprise. Dans cet ordre d’idées, la mobilisation des efforts doit se faire dans le cadre d’un pilotage des activités, permettant l’évaluation des performances individuelles au regard des prévisions arrêtées, afin de mener tout au long du cycle de gestion les actions correctives nécessaires. Quoi que certaines entreprises marocaines, faute de moyens et de compétences, fonctionnement en absence de stratégie claire et d’outils de pilotage de la performance. Dans le même sillage, l’entreprise peut recourir à plusieurs leviers de performance et selon sa taille (petite, moyenne ou grande), tels que le contrôle de la qualité, l’évaluation constante de la cohérence des actions entreprises, la gestion fédérale des activités et des processus de production et l’animation de dialogues de gestion entre opérationnels et dirigeants de l’entreprise.

Quels sont les freins liés à cette démarche et comment les dépasser ?
La PME marocaine est la principale composante de notre tissu économique. Or, elle souffre en matière de trésorerie et ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour former ses dirigeants sur les différentes disciplines corrélées au management stratégique et au leadership. 
Par conséquent, la non-qualification managériale des dirigeants entrave la mise en place de ces modes pilotages contemporains. Pour cela, la promotion des formations «Soft Skills» en faveur des dirigeants et gérants des PME doit être appuyée par des institutions publiques ou privées.

Le complexe de Peter Pan est souvent considéré comme un frein à l'évolution des managers des PME. De quoi s'agit-il et qu'en pensez-vous ?
La PME marocaine est un élément vital pour toute économie, générant des revenus destinés principalement à une population active d’un niveau de vie supposé être moyen ou légèrement en deçà de la classe populaire aisée. 
Le patron de la PME marocaine manque généralement d’audace et de vision stratégique, ce qui l’empêche de se projeter dans l’avenir et bien évidemment d’avoir l’ambition de s’inscrire dans des chaines de valeur mondiales à haute valeur ajoutée. 
En outre, d’autres éléments environnementaux privent le Manager de la PME de prendre la décision de faire grandir son organisation, tels que la pénurie des commandes, le manque de confiance dans le climat des affaires, le portefeuille «clients» limité et bien d'autres. Par conséquent, le syndrome de Peter Pan demeure présent dans l’esprit de la PME marocaine, mais ce n’est pas qu’un inconvénient.  
C’est aussi une vigilance exprimée par le Manager de la PME au regard des engagements financiers visant l’expansion et le développement, mais à répercussions économiques négatives surtout vis-à-vis de systèmes concurrentiels de plus en plus complexes. Pour cela, l’évaluation des risques de croissance des PME doit se faire dans le cadre d’une analyse objective basée sur des études scientifiques, mais aussi des enquêtes de terrain reflétant la réalité économique du marché marocain, les considérations marketing du client et le comportement du consommateur  final. 

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