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L’empathie, une compétence à utiliser avec modération

Très souvent, on associe l’empathie à la capacité de ressentir en communion les émotions des autres. Or dans la pratique, le concept est beaucoup plus profond. L’empathie, si elle est bien raisonnée, constitue une compétence relationnelle indispensable pour bien gérer les relations professionnelles. Elle permet de comprendre les émotions des autres, d’anticiper leurs réactions et surtout d’agir d’une manière adéquate. Le point avec Malgorzata Saadani, coach international ICC.

L’empathie, une compétence à utiliser avec modération

Conseil : Quelle est l’importance de l’empathie dans les relations 
professionnelles ?
Malgorzata Saadani :
L’empathie est une compétence personnelle très importante du point de vue social, y compris en entreprise où les collaborateurs forment une véritable communauté humaine qui obéit aux règles non seulement professionnelles, mais aussi purement sociologiques. Aujourd’hui, il y a une grande prise de conscience de l’importance du facteur humain et de tout ce qui se réfère aux compétences personnelles. À un tel point qu’il y a une véritable confusion sur la compréhension des termes dont on parle : l’assertivité, l’empathie, la cohésion des équipes… Sans entrer dans les détails de toutes ces notions, j’aimerais préciser celle de l’empathie et soulever son interprétation erronée la plus fréquente. L’empathie c’est la capacité de comprendre, d’interpréter et d’anticiper les émotions et les réactions des gens ; et bien sûr d’agir d’une manière adéquate, en en tenant compte afin d’atteindre les objectifs escomptés. Or dans l’opinion globalement répandue, l’empathie est souvent assimilée à la capacité de ressentir en communion les émotions des autres, ce qui est assez inutile et qui peut même s’avérer nocif, psychologiquement parlant.

Comment se traduit-elle en entreprise ?
L’empathie bien calibrée est un puissant outil managérial qui trouve son application pratique d’abord dans la motivation des collaborateurs, et également dans la gestion des conflits, la cohésion des équipes et même dans l’action commerciale. Lorsqu’un dirigeant comprend les sensibilités et les systèmes de valeurs de ses collaborateurs, il a plus de chances d’évoquer les arguments convaincants pour les encourager, chacun d’une manière dédiée. S’il connaît leurs caractères, il comprend mieux l’origine des problèmes interpersonnels pour trouver des solutions acceptables pour tout le monde. Enfin, en connaissant la manière de penser et d’agir des clients, il peut établir une stratégie commerciale efficace basée sur le principe gagnant-gagnant, avec des résultats chiffrés et une fidélisation à la clé.

Quels peuvent être les effets 
indésirables de l’excès de l’empathie ?

Comme toute chose, l’empathie doit être dosée et équilibrée. Premièrement, n’oublions pas que le cadre professionnel demande d’abord un maximum de neutralité et d’objectivité, tout en reconnaissant l’existence et l’importance des émotions. À trop vouloir comprendre comment pense et réagit l’autre, il est facile de perdre de vue les vrais objectifs collectifs et organisationnels, voire sociétaux que l’entreprise s’était fixés. L’excès d’empathie peut aussi mener à des prises de décisions basées sur les préférences personnelles, au détriment des faits. Un autre piège, c’est de prendre une telle confiance en soi en matière relationnelle qu’on se croirait «devin» face aux autres. En ce qui concerne l’empathie, il faut rester humble et avoir conscience qu’on ne peut pas deviner à 100% ce que l’autre personne a dans la tête. Même si nous sommes très expérimentés, nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur de jugement.

Justement, comment la gentillesse peut-elle se retourner contre la personne sympathique ?
La gentillesse et la bienveillance sont toujours appréciées, mais en absence de l’équilibre dont je viens de parler, elles peuvent mener à l’effritement de l’autorité, ou à une confusion des rôles de la part d’un manager. L’excès d’empathie mal comprise que j’ai évoqué précédemment provoque un risque de prendre sur soi et de vivre profondément les problèmes des autres, en oubliant sa propre santé mentale et son propre intérêt économique. Enfin, puisque nous parlons de la nature humaine, il faut être conscient qu’il existe aussi des personnes de mauvaise foi : les menteurs, les manipulateurs ou les paresseux qui en découvrant notre trait humaniste ne se gêneraient pas pour en abuser en vue d’atteindre leurs objectifs personnels. Pour toutes ces raisons, un bon équilibre entre l’émotionnel et le rationnel, et un auto-recadrage à froid sont des postures hautement efficaces et recherchées dans le monde du travail. 

 

Propos recueillis par Nabila bakkass

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