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Le pompier-pyromane, un profil difficile à détecter

Le pompier-pyromane est l’un des profils les plus difficiles à gérer en entreprise. Il apparait comme un sauveur toujours prompt à voler au secours de ses collègues. Mais en réalité, c’est lui-même qui crée des problèmes pour les résoudre par la suite et se faire passer pour un héros. Comment expliquer son comportement et comment se comporter avec lui ? Éléments de réponse avec Sanae Hanine, PHD, experte en communication, coach et formatrice en développement personnel.

Le pompier-pyromane, un profil difficile à détecter

Conseil : Comment définir le syndrome du pompier-pyromane ? 
Sanae Hanine :
Le concept du syndrome du pompier-pyromane, aussi appelé le «complexe du héros» ou le «Chevalier Blanc», provient d’un phénomène décelé chez certains pompiers qui déclenchaient eux-mêmes des feux pour pouvoir ensuite les éteindre et apparaître comme des héros. Contrairement aux véritables altruistes, le but ultime de la personne qui est atteinte de ce syndrome est de combler son grand besoin d’existence et d’appartenance aux yeux des autres. 
Elle est dans la recherche de la glorification, de la toute-puissance, voire de la déification. À son paroxysme, ce syndrome peut présenter un véritable danger puisque la personne qui en est atteinte peut faire un passage à l’acte et mettre en danger la vie des autres. À titre d’exemple, les infirmiers qui sont pompiers-pyromanes risquent d’empoisonner les patients pour les sauver par la suite. De même, certains médecins peuvent mettre fin à la vie de leurs patients. 
Les spécialistes indiquent qu’il s’agit d’une forme indirecte du syndrome de Münchhausen, du nom de ce baron du XVIIIe siècle qui se glorifiait des réalisations donquichottisme. Ce syndrome a pour origine une frustration profonde qui provient d’une image de soi négative ancrée depuis l’enfance. Le besoin de reconnaissance et le narcissisme inassouvi, entre autres, poussent les pyromanes à chercher l’admiration d’autrui à n’importe quel prix notamment en provoquant les situations qui les rendent indispensables. Pour eux, tous les moyens sont permis sans aucune considération à l’éthique et donc aucune limite ne les retient. Le sentiment d’être inutile est un cauchemar pour eux. Les spécialistes avancent qu’ils sont dotés d’une intelligence exceptionnelle et d’une grande force de persuasion qui leur confère un prestige et qui les rend compétents dans un domaine particulier.

Comment se manifeste-t-il en milieu professionnel ?
Faisant partie des personnalités toxiques, ce profil est très difficile à détecter puisqu’il parait gentil et serviable. D’un air empathique et compatissant, il peut compromettre ses supérieurs et ses collègues pour qu’il soit convoqué en sauveur. Faisant partie intégrante du triangle de Karpman, des victimes se prêtent à son jeu, ce qui a poussé les spécialistes à relever quelques balises, notamment : est-ce que la personne dévalue les tâches ou les prérogatives qui lui incombent ? Est-ce que les dossiers dont elle est en charge sont assez souvent sujets de polémiques pour être miraculeusement dénoués après ? Est-ce que la personne vient toujours à la rescousse par une idée ou un tuyau miraculeux ? Ces questions méritent d’être posées, car en tentant d’y répondre, on commence déjà à mieux voir la vérité du pompier-pyromane. Ce qu’il faut noter, c’est le fait que le comportement d’un pompier-pyromane peut être pernicieux pour l’entreprise et il faut donc être très vigilant avec ce profil.

Outre le besoin de reconnaissance, qu’est-ce qui peut justifier le comportement d’un collaborateur qui crée lui-même un problème pour le gérer ? 
À mon avis, les actions d’un collaborateur qui crée un problème pour le gérer et apparaitre en héros sont justifiées, avant tout, par une recherche compulsive d’admiration. D’ailleurs, en entreprise, cela arrive souvent qu’un informaticien crée un virus destiné à détruire le système informatique de son entreprise pour être sollicité en urgence dans la résolution du problème. Pour lui, c’est avec cette manière qu’il peut être admiré par ses collègues et sa hiérarchie.

Comment composer avec lui ?
Soyons clairs, les psychologues affirment qu’on ne guérit pas de ce syndrome. Ceci dit, les actions à entreprendre consistent à avoir une bonne discussion avec ce profil. La première chose à faire, c’est d’en parler avec le collaborateur concerné et de lui faire comprendre que ses petites manigances sont mesquines, qu’on ne peut pas faire cavalier seul et que les gloires sont plus gratifiantes lorsqu’elles se gagent en équipe. Pour l’aider, il est suggéré de lui proposer un accompagnement chez un spécialiste pour travailler sur son estime de soi et sur ses blessures narcissiques. 

Propos recueillis par Nabila Bakkass

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