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La psychosomatisation, quand le stress vous rend malade !

Des troubles digestifs, des douleurs musculaires, un manque de concentration… les manifestions des maladies psychosomatiques sont désagréables. Selon Kawtar Kadiri, psychologue et psychothérapeute, «la douleur est bien réelle, mais demeure absente du corps organique : elle est située dans l’espace émotionnel et ne peut être soulagée par des médicaments». Les raisons de ce type de maladies sont multiples et peuvent être professionnelles liées notamment au stress et au manque de reconnaissance. Le point.

La psychosomatisation, quand le stress  vous rend malade !
Le manque de reconnaissance pourrait constituer une raison de psychosomatisation dans la mesure où la situation est encodée par le psychisme, comme étant menaçante. Ph. Shutterstock

Conseil : La psychosomatisation, de quoi parle-t-on ?
Kawtar Kadiri
: Une maladie est dite psychosomatique lorsqu’elle ne résulte d’aucune cause organique, elle est d’origine émotionnelle. Dans le grec, le «soma» désigne le corps. La psychosomatisation n’a été réellement acceptée qu’après la découverte de l’inconscient par S. Freud qui a soutenu le rapport entre le corps et l’esprit. En effet, lorsque la difficulté morale est passagère, notre esprit peut gérer la situation et parvient à rétablir l’équilibre sans que le psychique en souffre. Dans le cas contraire, l’organisme présente des difficultés à mettre en place des mécanismes de défense, d’où les signaux de détresse émis par le soma. La psychosomatisation est donc l’expression émotionnelle symbolique d’une souffrance refoulée dans l’inconscient par des manifestations corporelles où la douleur est bien réelle, mais absente du corps organique : elle est située dans l’espace émotionnel et ne peut être soulagée par des médicaments, leur seule efficacité serait due à l’effet placebo. Plus concrètement, le corps joue le rôle du fusible qui disjoncte en créant la maladie pour protéger l’unité de l’être.
Concernant les manifestations de la psychomatisation, il est à noter que face aux frustrations et à force d’inhibition des tensions emmagasinées dans le corps, la personne construit au fil des années, de façon inconsciente, une sorte d’armure à la fois physique et psychique pour se protéger afin de diminuer ou de supprimer l’angoisse émanant des frustrations et de l’ambivalence qui en découle. L’ensemble des tensions musculaires devenues inconscientes forme : l’inconscient corporel. La maladie somatique devient dès lors un message symbolique qui s’exprime sous forme de douleur et qui provient d’une difficulté d’adaptation de l’individu à des événements qui génèrent une tension devenant chronique, à la fois physique et psychique découlant d’une façon inadéquate de gérer la pression pendant une durée prolongée. Il est toutefois important de noter que le traitement de l’information au niveau cérébral ne fait pas la différence entre tout ce qui est réel et tout ce qui est imaginaire. En effet, peu importe le type d’agression vécue ou ressentie, il y a une analogie de la réponse physiologique à cette agression, qu’elle soit physique ou psychique. Autrement dit, peu importe l’origine des idées négatives : qu’elles soient issues d’une frustration réelle ou fictive, la réponse physiologique et hormonale reste la même. Cette réponse est : le syndrome général d’adaptation SGA ou «le Stress». C’est une réponse non spécifique de l’organisme à n’importe quelle pression environnemental lorsqu’il se sent menacé et lorsqu’il ne possède pas de réponse immédiate pour réduire une menace. Le stress est d’ailleurs plus présent dans le milieu professionnel où la personne n’a pas toujours pas la main sur les possibilités de résolution de problèmes qui s’offrent à elle, ce qui rend la tâche plus difficile et ce qui favorise le refoulement initialement abordé.

Quelles sont les situations professionnelles qui peuvent conduire à la psychosomatisation ?
Dès lors, nous pouvons parler de toutes les situations professionnelles et des manifestations en lien avec le stress pathologique. Dans ce sens, l’éventail est très large : des maladies cutanées aux attaques de paniques en passant par la dépression, l’exacerbation des phobies et le burn-out, sans parler des maladies chroniques, des troubles digestifs, de la diminution de l’immunité et des douleurs musculaires diffuses. Cela se traduit par des troubles des fonctions supérieures, notamment une saturation de la mémoire, des oublis, un manque de concentration, des troubles attentionnels, une incapacité à achever un travail déjà entamé, une procrastination... La réponse dépendra de la manière dont l’être intègre la souffrance dans les quatre espaces : les émotions, le corporel imaginaire et la pensée. Ceci installe la personne dans une spirale de l’échec qui favorise l’accentuation du stress et par la même occasion l’apparition des maladies somatiques. C’est ainsi qu’en interaction, les facteurs cognitifs, comportementaux et hormonaux favorisent l’installation d’un cercle vicieux conduisant à la maladie. En effet, le dysfonctionnement cognitif, immunitaire et neurovégétatif lié au stress imprime une vision négative et différente du monde, ce dysfonctionnement est une étape de la chaine des événements du stress à la maladie.

Le manque de reconnaissance peut-il être un facteur déclenchant une douleur physique ?
Le manque de reconnaissance pourrait en effet, constituer une raison de psychosomatisation dans la mesure où la situation est encodée par le psychisme, comme étant menaçante, ce qui amène le cerveau par l’intermédiaire du système sympathique à agir sur les surrénales : libération dans le sang d’adrénaline voir même du cortisol. Ces hormones provoquent, notamment l’accélération du rythme cardiaque, la libération du sucre sous forme de glucose (facilement assimilable par le foie), la vasoconstriction des viscères (arrêt de la digestion) ainsi qu’une circulation sanguine importante des muscles squelettiques (ceux du mouvement) et du cerveau. Plus concrètement, il est à noter que la première phase d’alarme permet au cerveau de recevoir l’énergie nécessaire pour choisir la meilleure solution : combattre, fuir ou se figer. Cette phase permet aussi aux muscles d’avoir l’énergie indispensable à l’action. Si le stress et le manque de reconnaissance durent, l’organisme produira alors le cortisol en continu et le syndrome passera à la deuxième phase dite d’adaptation qui est une accommodation à un déséquilibre persistant. Cela nous introduit à la troisième phase d’épuisement : En apparence, tout va bien, néanmoins un inconfort psychologique et une usure prématurée de certains organes se créent, occasionnant des troubles psychologiques, fonctionnels ou lésionnels : risque d’infarctus…

Comment gérer ce phénomène ? Peut-on prévenir en amont cette situation ?
Il faut apprendre à contenir son stress et à canaliser son angoisse. Le but est de permettre à l’organisme d’établir un système de défense capable d’éviter la somatisation. L’objectif thérapeutique est de mettre des mots, des images et de donner sens aux douleurs afin d’accéder à la souffrance sous-jacente. Le travail cognitif, comportemental et corporel transforme le cercle vicieux en cercle vertueux :
• Le travail cognitif consiste à porter un regard sur les événements avec plus de distance (restructuration cognitive), à identifier en quoi le stress actuel rappelle les situations anciennes et surtout à comprendre comment la personne crée elle-même cette situation stressante.
• Le travail comportemental permet, à travers l’affirmation de soi, une communication plus sincère qui exprime les besoins non reconnus par autrui, une expression plus appropriée des émotions et une attitude plus constructive face aux contraintes.

Quelles sont vos recommandations pour mieux gérer cet état de stress ? 
Pour apprendre à gérer cet état, je recommande de :
• Prendre conscience de l’origine des manifestations pour pouvoir anticiper la réaction négative.
• Prendre du recul pour éviter le maintien : quand le stress prend de plus en plus de place, on peut se sentir submergé. Le recul permet de se centrer sur le moment présent, se fixer sur ce qui est réel, non sur des pensées négatives qui sont plus une projection et non pas une certitude. Exemple : «Si j’expose devant mes collègues, je vais avoir un blocage».
• Accepter la contrainte et ajuster les attentes : un conflit avec quelqu’un, un rendez-vous annulé… puisqu’il est impossible dans la plupart du temps d’avoir un contrôle sur toutes les situations que l’ont subi.
• Accepter l’imperfection et se fixer des limites : le perfectionnisme peut conduire à se fixer des objectifs irréalistes, à refuser les erreurs et à ne pas accepter ses faiblesses, ce qui retentit négativement sur l’estime de soi de la personne et sur son rendement professionnel.
• Éviter la procrastination : laisser pour demain ce qui peut être fait le jour même, comme le fait de repousser les décisions, le traitement de certains dossiers… c’est une tendance favorisée par l’accentuation de l’anxiété.
• Prendre des pauses.
• Se faire plaisir.
• Réaliser des efforts phtisiques.
• Ajuster la consommation d’excitants. 

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