Conseil : Comment définir le phénomène de la dispersion en milieu professionnel ?
Sanae Hanine : La dispersion en milieu professionnel correspond à l’incapacité d’une personne à répondre dans un temps très court à plusieurs engagements et sollicitations, que ce soit simultanément ou en mode zapping. En d’autres termes, ce phénomène implique que le collaborateur est arrivé à un état d’attention divisée et à une incapacité à focaliser son attention sur une tâche principale.
Outre la surcharge au travail quels peuvent être les causes de ce syndrome?
L’employé ressemble dans ce cas de figure à Neo, le héros du film Matrix, qui se rebelle contre les machines branchées sur son cerveau. Il est hyper relié à plusieurs inputs, notamment un ordinateur branché à internet, un téléphone portable et un autre fixe ainsi que des agendas électroniques, professionnels et personnels. Ce collaborateur est également intégré à un système de gestion collectif hardware avec une imprimante, une photocopieuse et un fax ou collaboratif, à travers, entre autres, le groupware, le workflow, la téléréunion, etc. Cet exemple reflète d’ailleurs l’impact de la transformation digitale sur notre quotidien. En effet, les dispositifs digitaux dont on dispose actuellement contribuent à rendre les sollicitations quasi permanentes et posent de plus en plus de pression sur les employés. À cela s’ajoute que la surcharge cognitive devienne exacerbée par des facteurs psychosociaux externes à travers, notamment des sollicitations multiples ou une lutte acharnée pour plus de productivité rapide, pour une promotion immédiate ou encore pour une perfection. Cette dernière est d’ailleurs la plus difficile à gérer.Quelles en sont les répercussions sur la vie au bureau ?
Sur le plan personnel, le syndrome de la dispersion engendre l’anxiété, la dysphorie, l’hyper stress et in fine le burn-out. Il est à signaler que certains psychiatres, comme Hallowell, ont assimilé le syndrome de dispersion au Trouble du déficit de l’attention qui est une pathologie liée à un déficit attentionnel.D’ailleurs, la personne qui en est atteinte trouve de très grandes difficultés à s’organiser et à gérer son temps et ses priorités. Sur le plan organisationnel, des études ont montré que passer d’une tâche à l’autre réduit la productivité de 40%, ce qui se répercute sur les résultats de l’entreprise.Est-il facile de gérer ce phénomène ?
Tout est question d’organisation. Avant de commencer une nouvelle activité, il est utile de lister les tâches à réaliser. Puis, il est important d’apprendre à agir en stratège en se concentrant sur une tâche précise pendant 25 minutes sans interruption. Il est aussi utile d’apprendre à se recentrer en prenant des petites pauses régulières de cinq minutes, plutôt que de chercher une concentration systématique, coûte que coûte. C’est ainsi que l’on peut habituer le cerveau à stabiliser son niveau d’attention et à diminuer son anxiété. Autre moyen pour gérer ce phénomène, c’est de bien organiser les réunions qu’on mène quotidiennement en établissant des rendez-vous prédéfinis et un ordre du jour pour chaque réunion. Je tiens à souligner que les entreprises ont un grand rôle à jouer dans la gestion de la dispersion. Un droit à la déconnexion le soir et le week-end doit être accordé aux employés. L’aménagement des espaces de travail est aussi important. Le télétravail peut constituer également une issue qui permettra des gains de temps d’énergie et une meilleure conciliation vie professionnelle-vie privée. Propos recueillis par Nabila Bakkass