Parmi les personnes les plus fragiles face au coronavirus figurent les patients souffrant d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). C’est une maladie chronique et progressive dans laquelle les artères qui fournissent le sang aux poumons se resserrent, entraînant des symptômes tels que l’essoufflement, les palpitations cardiaques, la fatigue et d’autres symptômes.
Durant cette période de crise sanitaire due au Covid-19, ces patients vivent sous la terreur de ce virus. L’Alliance des maladies rares au Maroc (AMRM) affirme que ces personnes vivent recluses actuellement, la peur au ventre, car elles savent que toute contamination par le coronavirus leur serait fatale du fait de la détérioration grave de leurs poumons (une zone d’attaque privilégiée du Covid-19) et de leur cœur.
«Dans l’HTAP, une pression artérielle élevée et persistante dans les artères pulmonaires contraint le côté droit du cœur à travailler trop fort pour pomper le sang, ce qui entraîne une insuffisance cardiaque du côté droit qui est incapable de pomper le sang de manière adéquate. Si la maladie n’est pas repérée à temps, les artères se bouchent entièrement, ce qui peut entraîner la mort. Les personnes atteintes de ce mal au Maroc vivent dans une situation très difficile surtout quand cette pathologie évolue dans une de ses formes les plus graves : l’hypertension artérielle pulmonaire primitive où la survie moyenne de ces malades est de deux à trois ans, certains ne vivant que quelques mois et d’autres des années, selon la sévérité des atteintes, l’effet des traitements et surtout l’accessibilité à ces derniers, souvent coûteux. Durant cette période de crise sanitaire, sur conseils des médecins et des hôpitaux, elles ne se rendent plus aux consultations alors qu’elles ont quand même besoin d’un suivi régulier rapidement. Et l’annonce d’un déconfinement proche n’est pas là pour les rassurer !», a souligné Dr Khadija Moussayer, présidente de l’AMRM. Et d’ajouter que «beaucoup de patients participent à des essais cliniques de nouveaux médicaments dans certains pays pour faire avancer la recherche, et surtout dans l’espoir de la thérapeutique miracle qui leur permettrait de survivre. Or tous ces essais sont actuellement à l’arrêt dans les hôpitaux, d’où leur désespoir. On ne réalise pas à quel point les systèmes de santé sont «gelés» dans la plupart des pays du monde ! D’ailleurs, la Journée mondiale de l’hypertension artérielle pulmonaire, célébrée le 5 mai dernier, s’est passée dans l’anonymat le plus complet (pas de communiqués, d’interventions médiatiques notables…)».
La présidente de l’AMRM a également rappelé que l’essoufflement est le symptôme principal dans plus de 90% des cas, accompagné parfois de douleurs thoraciques. «Ces deux manifestations ne suffisent pas à alerter au début, car elles peuvent être provoquées par bien d’autres maladies. Rapidement, ces difficultés s’accroissent. D’autres symptômes apparaissent : pertes de connaissance (syncopes), malaises avec vertiges, fatigue inhabituelles… puis œdèmes des jambes et des pieds… Le muscle cardiaque s’affaiblit, conduisant à une insuffisance cardiaque», a expliqué Dr Moussayer, précisant que la HTAP concernerait environ 3.500 Marocains, dont moins d’un tiers serait atteint de sa forme primitive la plus grave. Cette dernière touche 1,7 femme pour un homme et son pic de fréquence se situe entre 30 et 40 ans.
Si l’HTAP primitive restait pratiquement sans traitement il y a 15 ou 20 ans, un diagnostic précoce et des thérapies ciblées, visant à élargir les vaisseaux sanguins, permettent maintenant d’atténuer la sévérité des manifestations, même si le pronostic final reste lourd pour une maladie incurable. La transplantation pulmonaire est la seule solution curative dans les cas les plus graves.
«Sans traitement adapté, cette pathologie mène à un décès précoce. C’est encore le cas au Maroc, faute de moyens financiers et des difficultés d’accès à certains produits. Le coût moyen d’un traitement pour la forme la plus sévère, l’HTAP primitive est de 30.000 DH par mois, avec beaucoup de difficultés pour obtenir le remboursement de la part des caisses d’assurances maladie. Le défi mondial est de passer d’une maladie fortement invalidante et mortelle à une maladie chronique», indique Dr Khadija Moussayer.