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Les ingrédients d’une critique constructive dans un contexte de crise

À situation délicate, mode de management différent ! Partant du principe que la critique constructive constitue un enjeu fondamental de développement, aussi bien individuel qu’organisationnel, les managers sont appelés aujourd’hui à revoir leur modus operandi en entreprise quand il s’agit d’émettre des critiques à l’encontre des collaborateurs. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, cet aspect du management trouve tout son intérêt du fait que, crise sanitaire oblige, la plupart des collaborateurs sont en télétravail, ce qui engendre une absence de communication directe. Imane Hadouche, master-coach et comportementaliste, propose quelques ingrédients pouvant constituer un point de repère pour les managers au vu de la crise que nous traversons.

Les ingrédients d’une critique constructive  dans un contexte de crise
«Une critique juste est une critique justifiée. Elle implique des faits précis et concrets.» Ph. Shutterstock

Conseil : Télétravail, mode de travail hybride… la crise sanitaire a radicalement modifié les relations entre les managers et leurs collaborateurs. Quelle place occupe la critique dans cette nouvelle organisation ? 
Imane Hadouche
: Nous avons vécu une transformation majeure, pour ne pas dire un changement de paradigme, pour basculer d’un mode de fonctionnement à un autre, avec toute la difficulté de s’adapter aux changements physiques, dans la matière, mais aussi aux changements d’attitudes, de certaines valeurs et de certaines croyances. Bien évidemment, ceci impacte lourdement les énergies et les dynamiques relationnelles, et malheureusement, pas toujours de la meilleure manière : tout changement implique une résistance, de part et d’autre, et les critiques et reproches peuvent fuser. Le climat général, au quotidien, et dans tous les domaines de vie, étant déjà assez tendu, et très anxiogène, cela peut rapidement conduire à l’escalade.

En l’absence d’une communication directe, toute critique même minime et anodine peut dégénérer en un malentendu plus ou moins grave. Qu’en pensez-vous ? 
C’est totalement vrai, en programmation neuro-linguistique (PNL), on considère que 90% de la communication passe par le para-verbal. Il s’agit, entre autres, de la tonalité, du rythme, des vibrations de la voix ou encore de la respiration. 
La communication passe aussi par le non verbal, c’est-à-dire, entre autres, la gestuelle et le regard. Partant de ce constat, on peut aisément déduire qu’une communication écrite ou virtuelle nous fait perdre une grande partie de ces éléments vitaux pour une communication relativement fluide. En d’autres termes, la même phrase pourrait être perçue comme bienveillante grâce à une gestuelle amicale, un regard rassurant et un ton de voix calme, comme elle pourrait être perçue comme étant agressive sans ces éléments de perception. Aujourd’hui, alors que la plupart des collaborateurs travaillent à distance, les managers doivent prendre en considération ce volet. Cela permettrait d’éviter les malentendus et les conflits et garantir en revanche un climat de travail sain.

Justement, quelles astuces proposez-vous aux mangers qui se voient obligés de gérer au quotidien ce type de situation ? 
Pour répondre à votre question, je dirais que la meilleure approche reste la communication assertive, aussi appelée communication non violente. Les bases de ce type de communication sont simples à adopter puisqu’il il suffit de :
• Vérifier si la critique est juste : une critique juste est une critique justifiée. Elle implique des faits précis et concrets. 
• Utiliser la boussole du langage efficacement : pour cela, il est important d’éviter les négations et d’insérer des adverbes positifs. Par exemple, au lieu de dire : «Tu es toujours en retard sur tes projets» dire plutôt «Tu pourrais être plus en avance sur tes délais», remplacer «Ton rapport n’est pas du tout structuré» par «Tu pourrais structurer davantage ton rapport»… 
• Remplacer la critique par des axes d’amélioration : au lieu de pointer ce qui ne va pas, il est fortement recommandé de proposer un axe d’amélioration. Cela permet de responsabiliser l’autre, de gagner son engagement et de favoriser chez lui le sentiment d’appartenance à l’entreprise.
• Exprimer son ressenti ou donner son avis : comme on ne peut ni nier ni discuter une opinion ou un ressenti, on commence notre critique par «à mon avis» ou «selon ma vision des choses», ou encore «mon ressenti par rapport à ça». La personne en face ne peut donc ni nier ni se sentir agressée, même si elle n’est pas d’accord.
• Présenter une critique fondamentale : ne jamais dépasser trois critiques à la fois et ne jamais non plus critiquer la personne elle-même en utilisant l’auxiliaire «être». Il faut plutôt pointer ce qu’elle fait en utilisant l’auxiliaire «avoir» ou «faire». 
• Favoriser une introduction de 20% du contraire : derrière chaque défaut se cache 20% d’une qualité contraire, il est plus efficace en critique de présenter les 20% de cette qualité contraire avant de présenter ce qui ne va pas. L’exemple le plus simple : une personne analytique prend énormément de temps en réflexion et pourrait être lente et retarder les choses. Au lieu de lui dire : «Tu nous fais perdre du temps en analysant trop», on pourrait lui dire : «Je sais que tu es une personne perfectionniste, mais on ne peut être parfait et efficace à la fois». Ainsi, une personne désorganisée cache une personne créative, une personne synthétique cache une personne active, une personne lente cache une personne calme, une personne hypocrite cache une personne diplomate… 
À mon humble avis, il est bénéfique de pratiquer la communication assertive et de s’y entraîner, non seulement dans le domaine professionnel, mais dans d’autres domaines de vie, quand on souhaite éviter les conflits et aussi pour mettre fin à tout jeu psychologique. 

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