Avec autant d’incertitude que nous impose la conjoncture actuelle, il est difficile pour les gouvernements et les opérateurs économiques de se projeter même dans le futur proche. Une situation qui complique davantage la gestion économique de cette phase de passage du confinement au déconfinement, d’autant plus que cette crise sanitaire a eu un impact double et simultané sur l’offre et la demande. «La sortie de crise dépend d’éléments exogènes. Ce n’est pas la politique économique qui sera capable de nous sortir de cette crise, mais c’est un vaccin ou un traitement du Covid-19», indique M. Adel.
L’endettement : comment et pourquoi !
Bien que la conjoncture soit morose, la réflexion sur les pistes de relance est plus ce que jamais attendue par tous, et certaines évidences semblent se préciser comme le recours à la dette extérieure. Si l’endettement de l’État va permettre de financer la relance économique et préserver les emplois, M. Adel se dit prêt à applaudir, mais la réalité est tout autre selon lui. «L’endettement ne crée pas d’emploi et ne préserve pas un tissu économique. La vieille recette keynésienne qui veut que je vais rembourser la dette par la croissance générée grâce à l’endettement ne fonctionne plus», explique l’invité de L’Info en Face. Le lien entre niveau d’endettement, dépense public et la croissance n’est pas évident», explique-t-il avant de préciser qu’au Maroc, la problématique est double. Et de détailler, «si l’État se met à investir dans de grands projets d’infrastructures pour générer de la croissance économique, mais seule une petite partie de ces projets seront portées par des entreprises marocaines, le reste sera géré par des entreprises étrangères et donc un impact moindre sur la croissance». Mais que cet argent soit directement injecté dans la sphère productive via le système financier, l’analyste dit oui !Industrialisation, oui, mais par l’exportation
Le secteur industriel pèse lourd dans l’économie nationale, bien que le Maroc ne soit pas un pays industrialisé. Il est donc l’un des premiers secteurs qui devront aider à relancer l’économie et qui, de l’avis de plusieurs analystes, sera une priorité pour le gouvernement. «Quand on veut industrialiser un pays, il y a des règles : pour être compétitif, il faut vendre moins cher. Et pour vendre moins cher, il faut une quantité minimale de production pour faire jouer les économies d’échelle et avoir un marché important», explique l’analyste. Selon lui, le Maroc a intérêt à ne pas se limiter au marché local, mais à viser l’international et surtout réfléchir à des produits que l’on pourra produire dans l’immédiat tout en étant compétitif et donc arriver à exporter et toucher le consommateur à l’international. «C’est une des leçons à tirer de cette crise du Covid-19, nous avons pu réaliser cette approche en produisant des masques et en les exportant, c’est sur cela que nous devons travailler pour commencer à industrialiser le pays», indique M. Adel. L’idée que défend l’analyste est donc d’irriguer le marché avec des produits faciles à produire, mais dans le respect de la qualité pour maintenir un niveau de compétitivité, et avec les excédents accumulés, financer des secteurs plus pointus, «vous aurez ainsi installé d’abord le réflexe industriel». Il cite pour cela l’exemple de la Chine. Ce marché international viendra donc s’ajouter au marché local qui reste aussi important, «les industriels marocains produisent déjà pour le marché local, 90% de la formation brute du capital fixe provient de l’industrie et le taux d’investissement représente 30% du PIB. Ce qu’il faut analyser maintenant, c’est la rentabilité de ces investissements». Dans cette même lignée, et dans le cadre de cette approche globale d’industrialisation par l’export, l’expert préconise qu’il faudrait éventuellement repenser la politique monétaire notamment en ayant un taux de change maîtrisé et orienté, momentanément, la monnaie pour donner un coup d’accélérateur à l’industrie exportatrice.