Le ministère de l’Éducation nationale a annoncé, jeudi dernier, que la rentrée scolaire 2020-2021 est prévue pour le 7 septembre prochain. Une rentrée marquée par les incertitudes et les craintes des parents qui s’inquiètent pour la santé de leurs enfants à cause de la propagation du coronavirus et du nombre des cas qui ne cesse d’augmenter chaque jour. Beaucoup d’entre eux ont d’ailleurs décidé de ne pas envoyer leurs petits à l’école quitte à faire une année blanche. Cette situation ne concerne pas uniquement le Maroc mais le monde entier. C’est pourquoi l’Organisation des Nations unies a tiré la sonnette d’alarme affirmant que la pandémie a créé la perturbation la plus grave de l’histoire des systèmes éducatifs mondiaux et qu’elle menace une perte d’apprentissage qui pourrait affecter plus d’une génération d’élèves.
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a lancé une note d’information intitulée «L’éducation à l’époque du Covid-19 et au-delà», qui présente des recommandations sur les moyens d’éviter une catastrophe imminente et dans laquelle l’organisation souligne que les fermetures d’écoles risquent également d’effacer des décennies de progrès. «Nous étions déjà confrontés à une crise d’apprentissage avant la pandémie. Nous sommes maintenant confrontés à une catastrophe générationnelle qui pourrait gaspiller un potentiel humain incalculable, saper des décennies de progrès et exacerber des inégalités bien ancrées», a déclaré Guterres.
Ce dernier a également expliqué que l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) a dirigé la rédaction de la note d’orientation qui contient des contributions de 15 organisations partenaires.
La note appelle les autorités nationales et la communauté internationale à s’unir pour placer l’éducation au premier plan des programmes de relance et protéger les investissements dans l’éducation. Avec cet objectif, l’Unesco convoquera une session spéciale de la Réunion mondiale sur l’éducation avant la fin de l’année.
«Les données de l’Unesco montrent que près de 1,6 milliard d’apprenants dans plus de 190 pays, soit 94% de la population concernée, ont été touchés par la fermeture d’établissements d’enseignement au plus fort de la crise, un chiffre qui s’élève à un milliard aujourd’hui. Pas moins d’une centaine de pays n’ont pas encore annoncé de date de réouverture des établissements», souligne la note d’information qui rappelle les projections de l’Unesco selon lesquelles 24 millions d’apprenants, de l’enseignement pré-primaire à l’enseignement supérieur, risquent de ne pas retrouver le chemin des études en 2020 suite aux fermetures induites par le Covid-19.
Selon l’Unesco, l’enseignement supérieur connaîtra probablement le taux d’abandon le plus élevé avec une baisse prévue de 3,5% des inscriptions, ce qui se traduira par 7,9 millions d’étudiants en moins. L’enseignement pré-primaire est le deuxième niveau le plus touché, avec une baisse prévue de 2,8% des inscriptions, soit 5 millions d’enfants en moins. Selon ces projections, 0,27% des élèves du primaire et 1,48% des élèves du secondaire, soit 5,2 millions de filles et 5,7 millions de garçons des deux niveaux, risquent d’abandonner l’école.
«Ces résultats soulignent l’urgence d’assurer la continuité de l’apprentissage pour tous face à cette crise sans précédent, en particulier pour les plus vulnérables. La note de synthèse appelle à protéger l’investissement dans l’éducation à tous les niveaux et avertit que, selon les estimations de l’Unesco, la pandémie va accroître d’un tiers le déficit de financement nécessaire pour atteindre l’objectif de développement durable de l’éducation (ODD4), convenu au niveau international pour 2030, dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur, à partir du déficit déjà stupéfiant de 148 milliards de dollars», indique Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco.
Afin d’atténuer les conséquences de la pandémie sur l’éducation des enfants dans le monde, la note de synthèse de l’Unesco formule des recommandations dans quatre domaines. L’Organisation appelle tout d’abord à arrêter la transmission du virus et planifier minutieusement la réouverture des écoles. Cela implique des mesures de santé et de sécurité, l’attention portée aux besoins des enfants marginalisés, la planification conjointe et la consultation des enseignants, des parents et des populations, indique-t-on dans la note.
Deuxièmement, l’Unesco demande de protéger le financement de l’éducation et de se coordonner pour un meilleur impact. «Malgré les contraintes en matière de dépenses publiques, les autorités nationales doivent sanctuariser les budgets de l’éducation et inclure l’instruction dans les plans de relance post-Covid. La communauté internationale doit garantir l’aide publique au développement en faveur de l’éducation. L’allégement, le report et la restructuration de la dette des pays à faible et moyen revenu font partie de la solution pour aider les pays à investir dans l’éducation», affirme l’organisation dans son document.
Troisièmement, l’Unesco veut renforcer la résilience des systèmes éducatifs pour un développement équitable et durable. «Le renforcement de la résilience exige de mettre l’accent sur l’équité et l’inclusion, avec des mesures visant à répondre aux besoins des apprenants les plus marginalisés et les plus vulnérables et à garantir que les contraintes économiques et les normes de genre n’empêchent pas les filles de retourner à l’école. Les capacités de gestion des risques doivent être renforcées à tous les niveaux», souligne la même source.
Enfin, l’Unesco appelle à réimaginer l’éducation et accélérer les changements positifs dans l’enseignement et l’apprentissage. «L’ampleur des innovations réalisées en peu de temps pour assurer la continuité de l’apprentissage prouve que le changement peut se produire rapidement. Ces innovations ont préparé le terrain pour reconcevoir l’éducation et construire des systèmes plus tournés vers l’avenir, plus inclusifs, plus souples et plus résilients. Les solutions doivent porter sur les pertes d’apprentissage, la prévention des abandons, en particulier des plus marginalisés, et la garantie du bien-être social et émotionnel des apprenants, des enseignants et du personnel éducatif au sens large. Parmi les autres priorités figurent un meilleur soutien à la profession d’enseignant, la suppression des obstacles à la connectivité, l’investissement dans les technologies numériques et la flexibilité des parcours d’apprentissage», insiste l’organisation.
Il est à souligner que la note d’orientation des Nations unies est lancée parallèlement à #SaveOurFuture, une campagne menée par dix partenaires, dont l’Unesco, afin de sensibiliser à l’urgence de l’éducation dans le monde et d’encourager l’augmentation des investissements pour construire des systèmes éducatifs de meilleure qualité, plus inclusifs et plus solides.