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Prise de décision en temps de crise : Osez passer à l’action !

Doute, inquiétude, incertitude, peur de l’échec… l’incapacité de trancher en temps de crise, ça se comprend ! Toutefois, la prise de décision, avouons-le, ne peut être reléguée au second plan. Crise ou pas, les spécialistes en développement personnel estiment qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise décision. Il y a tout simplement une décision prise dans un contexte précis et dans des circonstances bien définies. Jihane Benslimane, experte en stratégie et management RH et directrice exécutive du cabinet Hera Consulting Group, nous en dit plus.

Prise de décision en temps de crise : Osez passer à l’action !

Conseil : La prise de décision est un acte incontournable, notamment en cette période de crise sanitaire. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire sur ce sujet ?

Jihane Benslimane
: Quand une crise survient, qu’elle soit économique, sanitaire, politique ou autre, tout l’équilibre d’un système nécessite d’être réajusté, et ce brutalement. Et c’est ce que nous vivons tous actuellement en cette période de pandémie mondiale. Depuis son apparition, la pandémie a forcé de nombreux dirigeants, avec l’ensemble de leurs équipes, à prendre en quelques jours des mesures sensibles concernant notamment la fermeture du site et l’organisation du travail à distance. Une telle série de décisions est peu aisée en de telles circonstances, notamment en raison de :

• L’aspect inédit de la crise : celle-ci survient et bouleverse l’ordre habituel des choses. On manque alors souvent de préparation, car la situation est nouvelle ou inédite.

• L’incertitude pendant la crise est parfois plus grande qu’en temps normal. Les décideurs ont donc à disposition moins d’éléments tangibles et fiables pour prendre les décisions rapidement.

• Le manque de temps pour prendre des décisions : durant la crise, nous n’avons pas suffisamment de temps à disposition pour décider et réagir rapidement. 

• Les enjeux sont souvent lourds : les conséquences des décisions prises en situation de crise sont parfois importantes d’un point de vue économique, sanitaire ou social.

Pour faire face à la crise, les dirigeants sont en train de prendre des décisions rapidement, sans nécessairement avoir le temps de vérifier tous les paramètres en amont, sans clarté et surtout avec un environnement incluant des règles qui évoluent en permanence et qui peuvent parfois être totalement contradictoires. Ce mode de fonctionnement intuitif de prise de décision est cependant plus vulnérable aux biais de raisonnement.

On a tendance à chercher à prendre la bonne décision au bon moment. Or plusieurs experts en développement personnel crient haut et fort qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise décision. Qu’en pensez-vous ?

La décision stratégique est un processus cognitif qui fait l’objet de nombreuses représentations. En matière de management d’entreprise, quatre grands modèles de décisions stratégiques sont à citer : le modèle rationnel dit de l’acteur unique, le modèle politique, le modèle organisationnel et le «modèle de la poubelle» (solution et problèmes). Ceci pousse alors à penser qu’il est essentiel de se rattacher tout d’abord à l’identité de l’entreprise. Ceci déterminera, de ce fait, l’optimisation des interactions entre stratégie, structure, décision et identité. Pour répondre à votre question, je dirais qu’effectivement, on cherche très souvent à prendre la décision parfaite, ce qui nous fait perdre, entre autres, du temps et de l’énergie. À mon avis, il est important de passer à l’action au lieu de perdre beaucoup de temps et d’énergie dans la réflexion.

Au vu des circonstances actuelles, qu’est-ce qui pourrait entraver la prise de décision en milieu professionnel ?

Que les prises de décision soient individuelles ou collectives, elles peuvent être entravées par le fait de :

• Ne pas partir de l’objectif commun ou de la vision de l’entreprise.

• Faire des scénarios basés sur son propre jugement.

• Ne pas rester souples, flexibles et réactifs.

• Laisser ses réactions émotionnelles prendre le dessus.

• Persister dans un jugement, ce qui risque de biaiser la  prise de décision.

• Ne pas faire confiance à son intuition basée sur son expérience.

• Ne pas soigner la communication avec ses collaborateurs et les différents acteurs concernés.

• Chercher absolument la perfection ou la meilleure décision possible.

Les crises qui surviennent mettent donc à l’épreuve tout manager ou dirigeant, non seulement dans ses capacités de prise de décision, mais aussi dans ses compétences d’adaptation. Il est primordial de garder en tête ses objectifs finaux pour construire une réponse adaptée à la situation et se projeter sur le long terme.

Quelles techniques préconisez-vous pour pallier à cette situation ?

Je conseille à tout manager ou dirigeant d’utiliser la technique par consensus. Il s’agit d’un modèle efficace de prise de décision, même si celle-ci est effectuée en groupe. Cela ne signifie pas que nous aurons un accord à 100% de l’ensemble des membres de l’équipe, mais du moins, la décision sera acceptée  et soutenue par la suite. Nous avons de même la stratégie du groupe nominal qui est une manière rapide de condenser une longue liste d’éléments à débattre ou de hiérarchiser les priorités par regroupement des données. Nous pouvons nous servir d’outils comme le Design thinking, le Mind Mapping, etc. Nous pouvons également prendre une décision suivant la règle de la majorité. Celle-ci dit que la majorité des membres est en accord avec la décision prise suite à un vote. Il existe aussi la prise de décision par délégation qui implique qu’on délègue à un sous-ensemble de l’équipe, notamment un sous- groupe ou même un individu, la responsabilité de prendre une décision au nom de toute l’équipe. Dans ce cas, nous pouvons faire appel à un expert ou un consultant à qui nous déléguons la décision tout en ayant à l’esprit que l’entreprise ou le groupe est solidairement responsable. Qu’elle que soit la méthode choisie, l’essentiel c’est d’oser passer à l’action. Il est aussi important de mettre en application les étapes suivantes :

• S’assurer de connaître les délais et fixer une date limite.

• Se couper des émotions.

• Prendre des décisions en équipe.

• Lister et noter les avantages et les inconvénients.

• Avoir un plan B, voire C. 


Prendre une décision est une chose,communiquer autour en est une autre...

Dans la majorité des cas, nous rencontrons dans nos missions au Maghreb un dysfonctionnement, non pas dans l’acceptation de la décision, mais surtout dans la manière avec laquelle elle a été communiquée.  Il est fondamental de rappeler qu’un manager ou dirigeant doit assumer son rôle de manager et surtout mettre en avant son courage managérial. Bien en amont de l’annonce, le manager doit avoir préparé, communiqué et partagé toutes les éventualités. Ainsi, lorsque la mauvaise nouvelle arrive, le collaborateur ou l’équipe est déjà préparé. Ensuite, il est important de remettre la décision dans son contexte et d’anticiper les risques et les conséquences. Le manager ou le dirigeant doit choisir le bon moment et le bon endroit pour que la décision soit perçue le mieux possible et ne pas omettre de l’annoncer avec pédagogie.  En annonçant une nouvelle ou une décision, nous devons également nous préparer aux éventuelles réactions : résignation, peur, effondrement, colère. Nous devons laisser le temps aux autres de l’accepter et être à leur écoute. Notre rôle de manager ne se limite pas à l’annonce de la décision, mais nécessite aussi d’accompagner le collaborateur ou l’interlocuteur dans une nouvelle perspective de reconstruction. Enfin, une situation de crise peut être un moyen efficace pour valoriser le meilleur de chacun ou encore mettre en avant certaines opportunités. Il est important de conclure positivement en optimisant la confiance et l’estime de soi de l’interlocuteur en tentant de faire une projection vers l’avenir.

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