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Comment procéder quand le management devient toxique ?

Travailler dans un environnement toxique constitue l’un des grands défis qu’un employé peut rencontrer dans sa vie professionnelle. La situation devient encore plus compliquée lorsque la toxicité émane du manager lui-même. Comment procéder ? Y a-t-il des astuces à envisager avant de décider de tenter sa chance ailleurs ? Voici ce qu’en pense Jihane Benslimane, consultante en stratégie et conduite du changement et DG d’Hera Consulting Group.

Comment procéder quand le management devient toxique ?
Le manager croit toujours avoir raison et garde le pouvoir décisionnel en imposant son point de vue.

Conseil : Quelles sont les particularités du management toxique ?
Jihane Benslimane :
Le management devient toxique quand la façon de faire du manager affecte le bien-être des collaborateurs, le climat de travail et la performance de l’équipe. Il faut savoir que le manager toxique adopte des comportements assez spécifiques. En général, il croit avoir toujours raison et garde le pouvoir décisionnel en imposant son point de vue. Il peut également jouer le rôle de provocateur et n’hésitera pas à mettre des sanctions négatives infondées ou à humilier le collaborateur. Nous pouvons identifier les managers toxiques en cinq points : Il a toujours raison, il se met en avant et s’approprie les réussites de son équipe, il n’hésite pas à harceler ou à utiliser la terreur, il fait du favoritisme en déstabilisant les relations entre les collaborateurs de l’équipe et il ne cesse pas de rappeler aux collaborateurs que leur avenir est entre ses mains. Le management toxique peut faire beaucoup de mal, et parfois la meilleure solution reste la fuite en avant ou le changement de poste.

Comment ce type de management se répercute-t-il aussi bien sur les collaborateurs que sur les résultats 
de l’entreprise ?

Le manager toxique aime diviser pour mieux régner, ce qui se répercute négativement sur l’environnement du travail, et par conséquent sur les résultats de l’entreprise. Il utilise différents moyens pour faire pression sur les autres, notamment les humiliations, le harcèlement, les critiques incessantes, l’agressivité ou encore un manque d’écoute ou de reconnaissance. Ces moyens peuvent conduire à un épuisement psychologique, une souffrance, voire une dépression ou un burn-out chez les collaborateurs. D’ailleurs, lors de nos missions de conseil en entreprise, nous détectons de plus en plus de personnes au bord du burn-out qui nous expliquent qu’elles sont victimes d’un responsable toxique ou d’une culture d’entreprise toxique. Selon mon opinion, il y a une relation certaine entre ces burn-out dits «systémiques» et des managements de type despotiques. En effet, un manager despotique ou tyrannique peut confier à un collaborateur la responsabilité de réaliser un projet ou d’atteindre un objectif, mais sans pour autant lui accorder le pouvoir décisionnel nécessaire. Le manager préfère plutôt conserver l’ensemble des pouvoirs, ce qui crée chez le collaborateur un stress aigu qui, à moyen terme, devient insoutenable. Au fil du temps, les collaborateurs vont être soumis à une pression émotionnelle et seront incapables de réaliser leurs missions.

Quelles sont les différentes causes 
de ce phénomène ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord préciser que la toxicité peut émaner du manager, mais aussi des collaborateurs ou encore de la culture de l’entreprise elle-même. Nous parlons de management toxique plutôt que de manager toxique pour ne pas stigmatiser les personnes. Cela dit, si un manager adopte un style toxique, cela ne veut pas dire systématiquement que c’est une mauvaise personne. En d’autres termes, la toxicité est due à l’incompatibilité entre le comportement du manager dit toxique et ce qui est attendu de lui, de par sa fonction en tant que garant d’un bon climat de travail. La toxicité managériale peut découler du fait que les managers sont pris dans des mécanismes de défense et ne savent pas manager autrement. Très souvent, ces managers ne sont même pas conscients qu’ils sont toxiques.

Comment survivre dans un tel environnement ?
Chacun a sa part de responsabilité :
• La direction qui en est consciente et qui ne fait rien, parce qu’elle préfère aussi «diviser pour mieux régner».
• Les collègues du manager qui se résignent en indiquant que le changement est impossible.
• Le manager toxique lui-même, puisqu’il n’est pas impartial face à ses propres agissements et n’a pas la capacité de prendre du recul.
Il est important de rappeler que la frontière entre manager toxique et harcèlement moral est très proche. Limiter la toxicité c’est remettre l’humain au cœur du management et de l’organisation. La communication, le dialogue, les groupes de paroles, les échanges de pratiques sont des outils indispensables pour conduire un changement face au management toxique. Les entreprises doivent également mettre en place des formations incluant des prises de conscience. De même, l’activité des services doit être organisée le plus possible par des manuels de procédures pour minimiser les risques d’émotions négatives. Il est aussi important pour les collaborateurs de réaliser les tâches tout en évitant une forte implication émotionnelle. Lorsque cela est possible, les collaborateurs doivent s’entraîner à communiquer avec le manager sur leurs responsabilités. Force est de reconnaître que la toxicité est une situation à long terme difficile pour le manager, pour le collaborateur, pour l’équipe et pour l’organisation. Si celle-ci n’évolue pas positivement, mieux vaut en discuter avec sa direction des ressources humaines, appeler un cabinet spécialisé et éventuellement proposer ses services dans une autre structure. 

Propos recueillis par Nabila Bakkass

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