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La résilience en temps de crise ou l’art de transformer les difficultés en opportunités

Crise sanitaire, confinement, manque de visibilité, travail à distance… Difficile de rester positif durant cette période sensible où plusieurs changements s’imposent à nous. Pour ne pas perdre le contrôle sur soi et sur ses émotions, Sanae Hanine, PhD, experte en communication, coach et formatrice en développement personnel, recommande de renouer avec les principes de la résilience. L’idée est d’accepter tous les changements que nous vivons, de se concentrer sur ses compétences et, surtout, de chercher à transformer les difficultés en véritables opportunités de progression.

La résilience en temps de crise ou l’art de transformer les difficultés en opportunités
La résilience implique de puiser dans ses ressources internes et de faire appel à sa créativité et à son ingéniosité pour continuer d’avancer en toutes circonstances. Ph. Shutterstock

Conseil : On entend de plus en plus parler de l’importance de la résilience en temps de crise. De quoi s’agit-il ? 
Sanaa Hanine :
Avant de répondre à votre question, je tiens tout d’abord à préciser que seule une crise produit un réel changement et que nos actions dépendent largement des idées et de l’attitude que nous adoptons vis-à-vis de cette situation. Nous vivons actuellement une crise mondiale due à la propagation du coronavirus (Covid-19) et l’ère VUCA (volatilité, Incertitude, Complexité et Ambiguïté) prend bel et bien sa place. Dans de telles situations, la capacité de développer des aptitudes de résilience émane d’une certaine intelligence et, surtout, d’un savoir-être permettant de mieux réfléchir au lieu de plonger dans une posture défaitiste et nihiliste. Plus concrètement, la résilience est une attitude qui permet de dépasser ses difficultés et de les transformer en une véritable opportunité pour avancer et grandir. Elle implique de puiser dans ses ressources internes et de faire appel à sa créativité et à son ingéniosité pour continuer d’avancer en toutes circonstances. Je tiens aussi à préciser que la résilience matérialise notre capacité de rebondir psychologiquement après des moments de détresse. Il ne faut pas oublier d’ailleurs que l’espèce humaine n’a pu survivre, évoluer et dominer sur cette planète que simplement parce qu’elle est résiliente à toute sorte d’adversité. De plus, les leçons de la nature ont démontré que les animaux et les plantes subissent des changements progressifs ou radicaux dans leur cycle de vie, parfois comme une partie de leur bien-être naturel. À mon humble avis, la résilience est aujourd’hui plus indispensable que jamais, car nous passons par des moments difficiles durant lesquels on a l’impression que le monde est en train de s’effondrer. La résilience doit donc être un rempart contre la peur qui paralyse la réflexion et l’action. Or, pour parvenir aux résultats escomptés, il est important tout d’abord d’accepter la réalité du changement, d’être orienté objectif et, surtout, de se concentrer sur ce qui peut être fait pour rebondir. Il est clair que nous ne pouvons pas échapper aux crises, comme la mort, la tragédie, la perte d’un emploi ou des problèmes financiers, mais on peut tout de même agir lorsqu’on a la possibilité de choisir notre attitude et notre manière de réagir, comme disait Viktor Frankl : «Entre le stimulus et la réponse, il y a un espace. Dans cet espace se trouve notre pouvoir de choisir notre réponse. C’est dans notre réponse que résident notre croissance et notre liberté». Ce qu’il faut noter c’est que la résilience n’est pas un trait de caractère, c’est une intelligence d’être que chacun peut apprendre et développer. Cette intelligence génère un pouvoir de réaliser et d’accomplir des choses extraordinaires tout en étant motivé, persévérant et surtout dotés des compétences nécessaires. La résilience génère aussi la capacité de gérer ses émotions et de résoudre les problèmes avec une vision positive de soi-même et de ses capacités.

Plus concrètement, dans quelle mesure cette résilience permettrait-elle aux entreprises et aux collaborateurs de dépasser l’épreuve de cette crise sanitaire ? 
J’estime que pendant cette pandémie du coronavirus, les entreprises et leurs collaborateurs ont plus que jamais besoin de cette compétence. Le renforcement de la résilience est l’un des meilleurs moyens de gérer la crise, car les personnes et les équipes résilientes sont plus adaptatives, plus flexibles et surtout plus collaboratives. En effet, les équipes sont préoccupées par leur santé, leurs proches, leur sécurité, leur environnement et leur survie dans son ensemble. Ces craintes ont un impact tangible sur l’environnement social et les entreprises doivent exister et inventer des moyens à même d’assurer leur survie. À cet effet, le leadership et la culture d’entreprise sont des vecteurs importants pour implémenter, cultiver et irriguer cette aptitude à la résilience. Il leur incombe la responsabilité de donner des ressources adéquates à leurs équipes afin qu’ils soient eux-mêmes résilients. D’ailleurs, depuis que nous avons commencé à nous intéresser au leadership, nous avons pu conclure que les entreprises résilientes touchent à l’impact puissant du leader sur l’ensemble de l’organisation, y compris la culture et les processus. Être leader, c’est prendre les choses en main et surtout servir d’exemple. Les dernières découvertes dans le domaine des neurosciences montrent que le cerveau est plastique, ce qui lui donne la capacité de s’adapter. Il peut ainsi tout apprendre, généralement plus facilement que nous ne le pensons. Ainsi, lorsque nous réfléchissons au changement, nous imaginons souvent des révolutions, mais le changement est en réalité une question de leader modélisant une série de comportements que le reste de l’entreprise peut suivre. À l’épreuve du coronavirus et surtout avec les mesures de confinement, le leader doit ainsi donner l’exemple en adoptant les facteurs de résilience qui seront utiles aux autres. Le leader doit aussi prendre en considération que durant la crise sanitaire, les inégalités sociales et surtout psychologiques deviennent plus aggravées par le confinement, d’où l’importance de prévoir des activités à mener à distance qui permettront de renforcer le sentiment d’appartenance et l’estime de soi de chacun.

Est-il si facile de renouer avec la résilience alors que l’on est submergé par des informations qui circulent sur les réseaux sociaux et qui ne sont pas toujours rassurantes ? 
Alors que la propagation et les impacts de grande envergure de Covid-19 dominent les nouvelles du monde, nous avons tous été témoins et connaissons la propagation parallèle de l’inquiétude, de l’anxiété et de l’instabilité. En effet, dans une crise, notre état mental ne semble souvent qu’exacerber une situation déjà extrêmement difficile, devenant un obstacle majeur en soi. Même sans un déluge constant de nouvelles mauvaises ou inquiétantes, la tendance naturelle de notre esprit est de se laisser distraire. Une étude récente révèle que 58% des employés ont signalé une incapacité à réguler leur attention au travail. Alors que l’esprit vagabonde, la recherche a montré qu’il est facilement piégé dans des schémas et des pensées négatives. En période de crise – comme celle que nous traversons actuellement –, cette tendance est exacerbée et l’esprit peut devenir encore plus accroché par une pensée obsessionnelle, ainsi que par des sentiments de peur et d’impuissance. 
Ainsi, lorsque l’esprit est coincé dans cet état, une réaction en chaîne démarre. La peur commence à rétrécir le champ de vision et il devient plus difficile de voir l’image plus grande et les possibilités positives et créatives devant vous. Au fur et à mesure que la perspective se rétrécit, notre tendance à se connecter avec les autres augmente également. À l’heure actuelle, la réalité de la propagation du coronavirus peut jouer dans nos pires craintes envers les autres et accroître notre sentiment d’isolement, ce qui ne fait qu’alimenter nos inquiétudes. Certes, il n’est pas toujours évident de faire l’effort sur soi en ces circonstances, mais j’estime qu’il est indispensable de chercher à renouer, coûte que coûte, avec la résilience. Il ne faut surtout pas céder à ses craintes et à ses peurs. 

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