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Télétravail : Le middle manager pris en «sandwich» !

C’est un secret de polichinelle ! Le télétravail n’est pas aisé, surtout pour les middle-managers. S’assurer de la continuité du travail à distance, motiver les équipes, même avec des salaires réduits, gérer un top management hyper stressé… leurs challenges sont de taille. Pour les relever, il faut «se doter d’une arme fatale qui s’appelle la patience», estime Dr Mohammed Benouarrek, directeur du Pôle stratégie, organisation et capital humain à Promamec, expert international en conduite du changement et en gestion des ressources humaines.

Télétravail : Le middle manager pris en «sandwich» !
Rassurer ses équipes sans avoir soi-même la moindre visibilité est aussi un autre challenge que le middle management se voit contraint de relever. Ph. Shutterstock

Conseil : Le middle manager est souvent présenté comme le pivot de l’entreprise. Quel rôle doit-il jouer aujourd’hui dans un contexte de crise sanitaire ?
Mohammed Benouarrek
: Effectivement, le middle management joue un rôle crucial pour l’implémentation des orientations stratégiques au sein d’une entreprise. Il s’agit de la couche managériale qui agit comme relai de transmission de consignes et de motivations. En ces temps de confinement, le fossé se creuse encore plus entre le top management et les opérateurs. Déjà la distance qui existe est bien plus importante qu’en temps normal. Si nous ajoutons à cela la distanciation imposée par l’état d’urgence sanitaire, le risque pour l’entreprise devient énorme, car certains salariés risquent de perdre tout sens d’appartenance à leurs entreprises. Ainsi, une grande partie du poids tombe sur le middle management, et ce pour talonner convenablement leurs équipes et s’assurer de la continuité du travail. Pour cela, ils doivent s’adapter rapidement au mode de gestion sans présence, ce qui requiert une charge de motivation vis-à-vis des équipes des opérations. 
Le manager qui se positionne au milieu à l’obligation de passer les consignes clairement, s’assurer de leur bonne réception, faire le suivi nécessaire sans relâche, motiver ses équipes sans devoir les voir et même dans plusieurs cas avec des salaires réduits vu la crise. C’est très laborieux comme rôle en ces temps particuliers.

Peut-on parler de nouvelles missions pour le middle manager à l’ère du télétravail adopté par les entreprises face à la pandémie du coronavirus ?
Non, je ne le pense pas. Ce qui change réellement est la distribution des priorités et points de focus. Comme je l’ai déjà souligné, le middle management devra mette l’accent sur la bonne compréhension des consignes de travail à distance, ce qui n’est pas du tout évident. Également, ces managers intermédiaires devront injecter une overdose motivationnelle à leurs équipes, qu’ils ne voient plus dans plusieurs cas et qui vivent eux aussi dans un stress dû au confinement et ses répercussions. En ces temps durs, les personnes deviennent irritables pour ne pas dire inflammables à un quart du tour. Le manager intermédiaire se retrouve souvent entre le marteau et l’enclume et devra canaliser la pression de haut (souvent revêtant un caractère urgent et important) vers le bas (qui bouillonne déjà) de la meilleure des manières. Les missions restent les mêmes, mais les priorités changent avec deux axes culminants : la clarté des messages transmis et le leadership motivationnel auprès des équipes opérationnelles. Ces deux dimensions existent toujours, mais elles revêtent un caractère spécial en ces temps de pandémie où le contact et la présence physique ne sont plus possibles.

Quelles sont les difficultés rencontrées aujourd’hui par ces managers intermédiaires ?
Motiver les autres sans l’être forcément soi-même est extrêmement difficile. Rassurer ses équipes sans avoir soi-même la moindre visibilité est aussi un autre challenge que le middle management se voit contraint de relever. Le middle management se voit sandwiché entre un top management hyper stressé et alarmé par les conséquences néfastes de cette pandémie inédite et son impact sur la survie ou non de l’entreprise, d’une part, et les équipes opérationnelles frappées de plein fouet, elles aussi, par la crise et ses ramifications. Les congés négociés, les réductions des heures de travail entraînant les réductions de salaires et les gels des avantages périphériques sont tous des résolutions adoptées largement en ces moments difficiles et qui impactent le moral des salariés toujours en exercice. Dans d’autres cas, le management intermédiaire se voit dans des situations embarrassantes comme devant se défaire d’une partie de ses équipes ou bien annoncer de mauvaises nouvelles au terrain. Ce rôle extrêmement délicat et névralgique leur incombe dans la plupart des cas. Ils doivent faire face au vent.

Justement, l’une des difficultés rencontrées par le middle manager consiste à annoncer les nouvelles décisions à son équipe. Que pouvez-vous nous dire sur ce volet ?
Effectivement, c’est très délicat. La plupart des nouvelles décisions ne sont pas forcément les bienvenues. Entre baisse des heures de travail et des salaires au prorata, congé sans solde ou congés non voulus, protocoles d’entente pour céder des avantages acquis et autres, le middle management n’est guère à l’aise. Il s’agit d’apporter des nouvelles pas très agréables à entendre, les vendre aux équipes pour les accepter dans la douleur et leur demander de continuer à y croire et accomplir leur travail en présentiel ou à distance. Ce n’est pas du tout évident. Chapeau bas ! Quand vous n’avez que de mauvaises nouvelles à apporter, même si le contexte le justifie, vous allez subir vous-même la pression d’être un corbeau.

Quels moyens doit-il se donner pour bien assurer ses missions, rassurer ses équipes et, surtout, les motiver à distance ?
Le manager intermédiaire doit se doter d’une arme fatale qui s’appelle la patience. Il ne s’agit ni d’être médecin ni patient pas plutôt très patient. Aussi, il doit faire preuve de diplomatie et de capacité à négocier au mieux tout en sachant qu’en ces moments tout le monde essaie de limiter les dégâts. C’est vital de savoir négocier au mieux et vendre les nouvelles contraintes. Savoir accepter de céder des acquis et, quand même, trouver en soi la motivation et la force nécessaire pour convaincre ses propres équipes de faire de même est décisoire en ces moments pour gagner la bataille – ou plutôt pour en sortir perdant, mais avec le moins de dégâts possibles. 


Se faire accompagner à distance, c’est important en temps de crise !

Le quotidien d’un middle Manager n’est pas de tout repos pour ne pas dire pénible. Obligé de faire face à plusieurs contraintes en amont et en aval, celui-ci risque de se sentir perdu. D’ailleurs, force est de rappeler, mais aussi de reconnaître qu’un middle manager est avant tout un être humain qui peut ressentir de la peur et de l’inquiétude durant cette période de crise sanitaire que nous traversons tous et qui a bouleversé notre vie. Ainsi, pour ne pas perdre le contrôle sur ses émotions et sur les missions qui lui sont attribuées, le middle manager est appelé à travailler sur lui-même. Certes, les circonstances actuelles ne lui permettent pas de se déplacer pour se faire accompagner en présentiel par un expert, notamment un coach spécialisé en la matière, mais il faut savoir que le travail à distance a bel et bien résolu cette problématique. D’ailleurs, depuis le début du confinement, des coachs, des psychologues ou même des experts RH proposent leurs services en ligne. De même, solidarité oblige, plusieurs experts en la matière partagent des vidéos ou même des articles dans lesquels ils exposent des conseils pratiques qu’un middle manager peut aisément donner durant cette période. La gestion des émotions, la motivation des équipes à distance, l’équilibre vie personnelle et vie professionnelle... sont autant de thématiques qui ont été largement décortiquées par des experts. Pourquoi alors ne pas en bénéficier ? Ce travail sur soi est primordial car, rappelons-le, le middle manager doit toujours montrer l’exemple... même en période de crise.

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