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Douze ans d’efforts pour créer une génération fière et réconciliée avec son environnement

La Fondation Ali Zaoua a célébré le 16 mai son douzième anniversaire. Créé en 2009 par le réalisateur Nabil Ayouch qui a été rejoint ensuite par l’artiste-peintre Mahi Binebine, ce projet utilise l’art et la culture comme outil de réintégration sociale. La Fondation a pu développer un réseau de 5 centres culturels dans le Maroc. Ces infrastructures offrent à la jeunesse marocaine des espaces d’expression, de dialogue et de découverte, afin de leur permettre de se réconcilier avec leur environnement. Les Centres Les Étoiles proposent pas moins de 200 spectacles et événements par an au profit de plus de 40.000 visiteurs.

La Fondation Ali Zaoua a lancé des projets pérennes et ambitieux tels que la Positive School of hip-hop, la Ligue nationale de l’improvisation théâtrale Noujoum, la production originale en musique, en chant et dans les arts plastiques. Actuellement, elle développe un centre de langues, une académie de formation aux métiers de la culture et une plateforme culturelle digitale.

La Fondation Ali Zaoua réussit, aujourd’hui, à réaliser ses objectifs et en tracer de nouveaux grâce à l’engagement des mécènes et des partenaires, mais aussi grâce à un partenariat public-privé solide et fructueux traduit récemment par la signature de nouvelles conventions avec l’INDH (Initiative nationale pour le développement humain).


Entretien avec Nabil Ayouch, fondateur de la Fondation Ali Zaoua

«La Fondation va vers des activités structurantes comme  la création d’une plateforme culturelle digitale et l’Académie de formation des formateurs Ali Zaoua aux métiers de la culture»

Le Matin : Quel bilan faites-vous du travail de la Fondation Ali Zaoua ?

Nabil Ayouch  : Je suis très fier de cette Fondation et du travail effectué par toutes les équipes depuis une dizaine d’années. Les objectifs fixés au départ ont été globalement atteints. Ce sont des objectifs d’épanouissement pour la jeunesse marocaine. Ce sont des objectifs qui n’étaient pas évidents pour tout le monde parce que la notion d’espace culturel à créer dans des quartiers difficiles est un vrai challenge. Sur les quatre, et bientôt 5, centres que nous avons réussi à ouvrir, les fruits de ce travail sont extrêmement visibles.

Peut-on dire que vous avez atteint les objectifs escomptés par la création de la Fondation ?

Oui tout à fait.

Quand on évoque la Fondation Ali Zaoua, on parle toujours de quartiers difficiles, de populations défavorisées... Ne pensez-vous pas que ces termes soient discriminatoires et qu’ils mettent mal à l’aise une classe sociale moyenne souhaitant bénéficier des activités des centres de la Fondation ?

Pas du tout. Quand je parle de ces quartiers, je ne parle pas des personnes qui y vivent. Il faut faire la différence entre les deux. Vous avez tout à fait raison, il y a des classes moyennes qui vivent dans ces quartiers et qui fréquentent nos centres. Il n’y a pas de débat à ce sujet. Après il y a aussi dans ces quartiers des personnes qui sont dans une situation beaucoup plus défavorisée économiquement et qui n’ont aucune offre culturelle à leur disposition parce que la majorité des espaces culturels sont concentrés aux centres-ville.

Est-ce qu’on peut dire que les centres de la Fondation ont réconcilié les citoyens avec les quartiers de la périphérie ?

Complètement ! La plupart du temps, c’est une question de dignité. Nous avons envie d’être fiers de notre pays, de notre ville, de notre quartier, mais pour être fier et pour retrouver cette dimension de dignité, il faut avoir des choses à valoriser. On a constaté que les gens se sont approprié les centres. C’est la plus belle réussite parce que les centres ne sont pas les lieux de la Fondation. Ils appartiennent aux jeunes des quartiers. Ce sont leurs projets et leurs énergies qui feront bouger les choses dans ces espaces. Nous sommes une structure d’accompagnement pour être à leur service et permettre à leur rêve de devenir réalité. Je suis fier parce que les jeunes se sont réconciliés avec leurs quartiers parce que les centres Les Étoiles sont devenus comme leur deuxième maison.

Ces centres sont-ils devenus une pépinière pour les jeunes talents ?

La découverte de talent est une autre dimension du projet. Personnellement, j’ai grandi en banlieue parisienne, j’ai appris à regarder le monde dans un centre culturel comme ceux-ci. J’ai vu la différence entre des jeunes qui sont passés par là et d’autres qui étaient livrés à eux-mêmes dans la rue. Des rappeurs, des chanteurs, des danseurs... ont émergé de ces espaces culturels. Dans nos centres, c’est pareil. On s’est rendu compte que dans ces quartiers, il y avait des jeunes qui avaient des choses à raconter, qu’ils avaient du talent, mais on ne leur donnait pas la chance de briller.

En quelques années, on a vu éclore des profils absolument extraordinaires qui vont nourrir la scène culturelle marocaine. Je crois beaucoup à la notion d’exemplarité.

Notre jeunesse regorge de talent ; il lui faut seulement l’ingénierie culturelle pour mettre en avant ses compétences.

Le travail de la Fondation est de lui redonner confiance en elle.

Comment assurez-vous le financement des différents centres de la Fondation ?

Avec mon ami Mahi Binebine, on se bat du mieux qu’on peut et on a la chance d’avoir des structures étatiques qui nous soutiennent : des entreprises publiques, des wilayas, des communes, des villes et des régions. On a la chance d’avoir le soutien d’entreprises privées, de personnes physiques, parrains et marraines de la Fondation de manière discrète. Grâce à tous ces donateurs, on arrive à chaque fois à réunir les financements nécessaires pour lancer de nouveaux centres et de nouveaux projets. On a la chance d’avoir des gens qui croient en nous et en notre action. Et comme la Fondation est très rigoureuse au niveau de la gestion financière, les comptes sont extrêmement transparents, ceci fait que les mécènes ont confiance en nous. Quand on n’a vraiment plus d’argent, on fait des ventes aux enchères. Nos sources de financement sont diversifiées.

Grâce à ces sources, allez-vous lancer de nouveaux projets ?

On va lancer en octobre un cinquième centre dans un magnifique riad de la médina de Marrakech à deux pas de la Koutoubia et de la place Jamaâ El Fna. Ce sera probablement l’un des plus beaux centres de la Fondation. Mais on ne s’arrête pas à l’ouverture des nouveaux centres, on va vers des activités structurantes comme la création d’une Plateforme culturelle digitale pour permettre l’accès de la culture au plus grand nombre de personnes notamment là où la Fondation n’est pas implantée. Un autre projet important est celui de la formation. Malheureusement, peu de profils sont formés au Maroc. Pour cela, on a décidé de lancer à Casablanca l’Académie de formation des formateurs Ali Zaoua aux métiers de la culture. Les lauréats peuvent travailler dans nos centres ou dans d’autres métiers de la culture.

Avez-vous d’autres projets en cours ?

On travaille à asseoir et pérenniser notre centre de langues parce qu’on pense que la langue est un vecteur essentiel d’ascension sociale. Il y a énormément de jeunes coupés en matière d’emploi et de liens avec le reste du monde à cause des problèmes linguistiques. On a engagé une directrice qui travaille sur le redéploiement de l’enseignement de langues étrangères dans les centres de la Fondation Ali Zaoua. Au-delà du français et de l’anglais, on voudrait s’ouvrir sur d’autres langues comme le mandarin. 


Engagements de la Fondation Ali Zaoua

Social :

• Créer un modèle de développement social.

• Désenclaver les quartiers périphériques.

• Lutter contre la violence et la radicalisation.

Éducatif :

• Développer des activités culturelles en direction des familles en difficulté.

• Accompagner l’offre pédagogique publique ou privée.

• Ouvrir de nouvelles perspectives professionnelles.

Culturel :

• Valoriser le patrimoine culturel marocain.

• Enrichir l’offre culturelle nationale.

• Donner accès aux cultures du monde.

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Objectifs de la Fondation

Nourrir l’espoir :

• Ouvrir de nouvelles perspectives aux jeunes des quartiers déshérités.

• Contribuer à leur inclusion socio-culturelle.

• Démocratiser les arts et la culture.

• Encourager la mixité sociale.

Développer la créativité :

• Révéler et accompagner les talents.

• Offrir un encadrement artistique et culturel de qualité.

• Faire de la culture et des arts un outil d’émancipation et de pacification des relations humaines.

Les aider à prendre leur envol :

• Sensibiliser à la diversité et à l’altérité.

• Enrichir les connaissances culturelles.

• Offrir des formations professionnalisantes

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Publics visés par la Fondation

• Enfants et jeunes de quartiers défavorisés, évoluant dans des environnements complexes.

• Délinquants placés en centres sociaux ou en détention.

• Acteurs de la société civile.

• Jeunes diplômés ou en recherche d’emploi.


Centre culturel Les Étoiles de Sidi Moumen

Quand les jeunes d’un quartier défavorisé deviennent un exemple de réussite

Nous sommes en 2014 à Sidi Moumen, un quartier dépourvu d’infrastructures culturelles. La plupart des jeunes de cette partie oubliée de la capitale économique n’ont jamais suivi de cours artistiques ou assister à un spectacle divertissant et encore moins instructif. En mois de novembre, un ovni culturel naît dans le quartier.

Les premiers curieux découvrent timidement le lieu. Ils sont vite intégrés à des séances de cinéma, des cours de musique, de théâtre, danse, langues étrangères, des débats... Le Centre «Les Étoiles de Sidi Moumen» devient rapidement un espace de vie. Les jeunes entrent et sortent, échangent entre différents workshops et ateliers ludiques. Ils s’approprient les lieux. «On était loin d’imaginer en arriver là un jour», raconte un voisin du centre. Il faut dire que l’aventure est inédite. Dans un quartier périphérique déserté, plongé dans une situation socio-culturelle critique, immerge un lieu d’espoir, de reconnexion avec le monde extérieur.

Aujourd’hui, le Centre Les Étoiles de Sidi Moumen compte plus de 1.000 inscrits provenant des quartiers avoisinants, mais aussi du centre-ville, de Rabat, Mohammedia, Berrechid et Rabat. Des artistes nationaux et internationaux y partagent leurs expériences. Ils viennent aussi admirer les talents des bénéficiaires, assister à des compétitions artistiques comme la graffiti battle ou la Ligue nationale d’Improvisation théâtrale.

Actuellement, des apprentis quittent le centre culturel pour partager leurs talents avec un public plus large ou participer à des projets grandioses. Mais que leur vaut cette chance inouïe ? Ce projet qui propose aux enfants, jeunes et moins jeunes une expérience unique, a été imaginé par la Fondation Ali Zaoua grâce à la dynamique des acteurs culturels Nabil Ayouch et Mahi Binebine.

Avec la complicité de plusieurs partenaires privés et publics ainsi que des acteurs associatifs, le centre de Sidi Moumen rallume chaque jour des étoiles oubliées. Mieux encore, il est le point départ d’un réseau d’infrastructures de réintégration sociale via la culture dans plusieurs villes du Royaume. «Les Étoiles» est un concept de Centres culturels de proximité, en partie inspiré du modèle des «Maisons de la jeunesse et de la culture», créées en 1961 par André Malraux (France) alors ministre des Affaires culturelles. Ce concept est désormais synonyme de lieux d’apprentissage, de découverte, de partage, mais également d’expression.

«Depuis 2014, plusieurs centaines d’enfants et d’adolescents apprennent chaque jour à danser, chanter, peindre, interpréter, exister, se réaliser. Ça se passe sur une île au milieu de HLM, de bidonvilles et de terrains vagues : à Sidi Moumen à Casablanca, à Béni Makada à Tanger, à Hay 

El Farah à Agadir, au cœur de la Médina à Fès. Et bientôt, ça se passera aussi dans la vieille ville de Marrakech. Ces Étoiles brillent grâce aux bonnes fées qui veillent sur elles, notamment ces nombreux artistes qui nous ont fait don de leur talent et de leurs œuvres, grâce aussi à des mécènes nationaux et internationaux», affirme Nabil Ayouch, initiateur de la fondation Ali Zaoua.


Les Étoiles de la Médina à Fès

Installé dans un Riad au cœur de la vieille ville de Fès, le Centre culturel Les Étoiles de la Médina a développé un programme d’activités hors les murs avant même son ouverture en janvier 2020 :

• Lors du Salon du Maroc des arts plastiques de l’association Caméléon, avec l’organisation d’un concours de dessin sur le thème «La ville de vos rêves».

• En direction du Centre de la protection de l’enfance de Ziat et l’Association marocaine de l’éducation de la jeunesse, en partenariat avec des acteurs locaux de la société civile.

C’est ainsi que ce jeune public a déjà bénéficié d’ateliers de dessin animé par Zakaria Msellek (Prix 

Mohammed VI de Zakhrafa) et d’initiation à la calligraphie ; de la projection du film «Tharbat n Wadoo» suivi d’un débat avec la comédienne et réalisatrice Latefa Ahrrare ; et d’une Master Class de théâtre animée par le talentueux Adil Abatorab.

À partir de janvier 2020, ce Centre, comme tous les autres, offre des cours et ateliers artistiques, culturels et linguistiques, ainsi qu’un programme d’activités hebdomadaires pour tous les publics.


Les Étoiles de Jamaâ El Fna à Marrakech

En plein cœur de Marrakech, dans un Riad situé à quelques mètres de la célèbre place Jamaâ El Fna, le Centre Les Étoiles sera le cinquième ouvert par la Fondation Ali Zaoua.

Comme à Agadir, Casablanca, Fès et Tanger, la jeunesse des quartiers de la Médina de Marrakech trouvera à s’épanouir grâce aux arts et à la culture. Ce nouvel espace viendra enrichir l’offre culturelle de la ville ocre.

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