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La pandémie amène de nouvelles inégalités des genres

La pandémie Covid-19 a touché les femmes plus durement que les hommes partout dans le monde. Afin d’évaluer son impact sur la gent féminine au niveau national, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) a mené, en partenariat avec l’ONU Femmes, une enquête qui a analysé la situation économique, sociale et psychologique des ménages durant la période de la crise. Un rapport réunissant les résultats de deux enquêtes réalisées auprès des ménages pendant et à la sortie du confinement a été rendu public mercredi dernier. Intitulé «Analyse genre de l’impact du coronavirus sur la situation économique, sociale et psychologique des ménages», ce document met en exergue la dimension genre dans l’acuité du vécu de la crise et les bénéfices tirés des politiques publiques palliatives implémentées.

La pandémie amène de nouvelles inégalités des genres

L’accès aux services de santé difficile pour les ménages dirigés par des femmes

Parmi les principaux points relevés par le rapport, celui de l’accès aux services de santé qui a été plus difficile pour les ménages dirigés par une femme que pour les ménages dirigés par un homme pendant le confinement décrété suite à la pandémie de la Covid-19. «Avant même de naître, les enfants issus de familles dirigées par des femmes vivent une situation d’inégalité des chances aggravée par la crise. L’écart d’accès aux soins de santé reproductive entre ces ménages est encore plus significatif lorsqu’ils résident en milieu rural : une différence de 46 points de pourcentage (17% pour les chefs de ménages femmes contre 63% pour les chefs de ménages hommes)», estime le rapport. Et d’expliquer : «Les ménages dirigés par les hommes disposent de plus de moyens pour permettre aux femmes qui en relèvent d’être conduites aux dites unités. De même, pour les services de vaccination, une différence de 17 points de pourcentage est constatée, soit respectivement 57% contre 40%». Le rapport souligne, par ailleurs, que lorsqu’on classe les ménages selon le niveau scolaire du chef de ménage, les disparités sont plus aggravées. «Dans la catégorie des ménages où tous les membres n’ont aucun niveau d’études, il y a moins de chances d’accès aux services de santé reproductive pour les membres des ménages dirigés par des femmes (49%) par rapport à ceux dirigés par des hommes (65%)», relève le rapport. L’analyse explicative par référence aux résultats de la modélisation des comportements sanitaires montre que d’autres variables influencent aussi la propension d’accès aux soins. L’existence de femmes actives occupées dans le ménage, par exemple, augmente les chances de bénéficier d’au moins un soin de santé, mais la pertinence du phénomène baisse avec l’accroissement de la proportion des femmes actives occupées. 

Les problèmes financiers concernent les femmes plus que les hommes

La situation financière des femmes s’est détériorée lors de la crise sanitaire en raison de leur situation vulnérable sur le marché de travail. D’après le rapport, les ménages dirigés par les femmes au moment de la crise déclarent les salaires comme source principale de revenus. Ils représentent 18% du nombre total des ménages ayant à leur tête une femme contre 25,5% chez ceux dirigés par les hommes. La différence entre hommes et femmes s’explique par la nature des postes que ces dernières occupent qui sont «moins importants» que ceux des hommes. Ainsi, en situation de crise, elles sont les premières à être sacrifiées, souligne le rapport. «Les disparités entre chefs de ménage femmes et chefs de ménage hommes apparaissent quand on considère les secteurs, dans l’agriculture (17% contre 13%) et dans le commerce (12% contre 6%).

Par catégories socioprofessionnelles, 25% des cadres supérieurs chefs de ménage femmes déclarent avoir une dégradation de leur situation financière contre seulement 21,4% des chefs de ménage hommes. Chez les cadres moyens, 50% des chefs de ménage femmes contre 44,4% des chefs de ménage hommes déclarent que leur situation financière s’est dégradée. Et de noter que pendant la crise, les hommes sont plus nombreux à déclarer puiser dans leur épargne pour faire face à leurs dépenses (26% contre 16% pour les femmes). Ces proportions sont respectivement de 14% pour les chefs de ménage femmes et 23% pour les chefs de ménage hommes, en milieu urbain, et de 30,1 et 21,9% en milieu rural. Pour ce qui est de l’endettement, au niveau global la différence n’est pas significative : 13,3% pour les ménages dirigés par des femmes et 13,6% pour ceux dirigés par des hommes. 

Enseignement distanciel : un vrai calvaire pour les filles

D’après le rapport, les ménages composés de filles seulement qui n’arrivent pas à suivre ou ne suivent que partiellement les cours à distance s’élève à 22,3% au primaire et 22,1% au collège. Ces fréquences sont respectivement de 21,1 et 16% pour les ménages composés de garçons uniquement. Dans les ménages composés à la fois de filles et de garçons, la prévalence de non-suivi (18,8% au primaire et 13,2% au collège) devient plus faible que dans le cas où il n’y a que des filles. «Les écarts constatés sont principalement dus aux canaux utilisés pour le suivi des cours à distance, notamment les réseaux sociaux, les plateformes numériques et les chaînes de télévision», indique le rapport, notant qu’un grand nombre d’enfants appartenant aux ménages dirigés par une femme ne suivent pas les cours à distance. Ainsi, lorsque le niveau d’éducation le plus élevé dans le ménage correspond au collège, 33,7% des enfants inscrits au primaire ne suivent pas les cours dans les ménages dirigés par une femme, 22,4% pour ceux dirigés par un homme. Pour les enfants inscrits au collège, les prévalences du non-suivi des cours sont respectivement de 31 et 21%, précise le rapport. Concernant la raison du non-suivi des cours à distance, près de la moitié (46%) des chefs de ménage femmes déclarent manquer de moyens ou d’outils pour permettre l’enseignement à distance de leurs enfants inscrits au niveau primaire, contre 43,5% pour les chefs de ménage hommes. Du point de vue de la composition des ménages, 79% des ménages composés seulement de femmes expliquent l’irrégularité ou l’absence du suivi des cours par le manque de moyens et d’outils d’enseignement, contre 48,6% lorsque moins d’un tiers du ménage est de sexe féminin. 

Les femmes surchargées par les tâches ménagères durant le confinement

En période de confinement sanitaire, 27% des femmes ont déclaré être surchargées par les tâches ménagères qui concernent tout le ménage, contre 9% des hommes. «La conciliation entre les tâches ménagères et l’activité professionnelle a été plus difficile pour les femmes en raison de la charge accrue des responsabilités au sein du foyer», explique le rapport. Les femmes vivant dans les ménages avec trois enfants sont plus nombreuses à déclarer avoir des difficultés à concilier activité professionnelle et travaux domestiques (31% contre 18% pour les ménages sans enfants), ajoute la même source. Par milieu de résidence, il ressort qu’il a été plus difficile pour les cadres supérieurs en milieu rural, comparés à leurs homologues de l’urbain, de concilier les tâches domestiques avec le travail professionnel (57 et 28%), ainsi que pour les employés (47,5 et 26%). Par contre, pour les exploitants agricoles, les difficultés sont moins accentuées pour la femme rurale, soit un pourcentage de 21%, relève le rapport, expliquant que dans l’exercice de l’agriculture, principale activité en milieu rural, les femmes ont l’habitude de concilier tâches agricoles et tâches domestiques. «Il apparaît donc que malgré le confinement qui a conduit les hommes à rester également à domicile, ceux-ci n’ont en général pas aidé les femmes dont les tâches à exécuter se sont accrues, car les enfants ne vont plus à l’école», fait observer la même source. 

Les effets psychologiques, plus graves chez les femmes

Les femmes chefs de ménages ont souffert, plus que leurs homologues hommes, de l’impact de la crise sanitaire sur leurs relations familiales, leur état psychologique et leur comportement. Les principales conséquences des effets psychologiques de la Covid-19 sur les ménages sont l’anxiété, le trouble du sommeil, la peur et les comportements obsessionnels, précise le rapport d’analyse genre de l’impact de la pandémie Covid-19 sur la situation économique, sociale et psychologique des ménages. Cependant, les femmes chefs de ménage souffrent davantage de comportement obsessionnel (33,3%) que leurs homologues hommes (23,6%), de la peur (46,8% contre 39,5% pour les chefs de ménage hommes) et de trouble du sommeil (26,4% contre 22,9%), fait ressortir le rapport. Par rapport à la rupture des visites familiales, il ressort que les ménages avec un chef de ménage femme (37%) sont plus affectés que ceux des hommes (34%). Cette observation se confirme beaucoup plus dans le milieu rural où l’affectation par la rupture des visites familiales concerne 35% pour les chefs de ménage femmes contre 26% pour les chefs de ménage hommes. Selon le niveau de vie, cet écart entre les femmes et les hommes chefs de ménages est plus prononcé lorsqu’ils appartiennent à la classe moyenne et aisée, révèle le rapport. En liaison avec l’explication de l’état psychologique, le rapport relève des disparités dans les mesures prises sur les lieux de travail pour la protection contre le virus. Globalement, un travailleur sur quatre affirme qu’aucune mesure n’est prise sur son lieu de travail (26%). Cependant, cette proportion est de 25% chez les hommes et 31% chez les femmes. Il semble donc que les femmes exercent des activités (ou dans des secteurs) davantage précaires pour pouvoir disposer de moyens pour prendre des mesures protectrices. Elles ont donc été relativement plus exposées au risque de contracter le virus, ajoute la même source. 

Les femmes ont plus souffert de la promiscuité dans le logement

En période de confinement sanitaire, 21% des femmes contre 16,4% des hommes ont déclaré souffrir plus souvent de la promiscuité dans le logement, selon le rapport. «L’analyse économétrique a permis de confirmer qu’être un chef de ménage femme accroît la possibilité de déclarer subir des conséquences psychologiques ou encore subir des conflits inhérents à la promiscuité», précise le rapport, faisant savoir que l’inquiétude est plus forte lorsque dans les ménages seules les femmes sont des actives occupées. Ainsi habiter en milieu urbain augmente la probabilité non seulement de déclarer subir des conséquences psychologiques, mais aussi celle de connaître des conflits dus à la promiscuité, souligne la même source, relevant qu’il en va de même quand le nombre de personnes par pièce dans le logement est supérieur à 3. La densité de la population urbaine par rapport au milieu rural explique ces résultats, fait remarquer HCP. L’enquête révèle également qu’avoir des difficultés sévères pour honorer ses engagements financiers va avec la déclaration de subir des conséquences psychologiques et accroît le risque d’inquiétude et de vivre des conflits. D’un autre côté, avoir des conflits au sein du ménage accroît la propension à subir des conséquences psychologiques, note le rapport, précisant que ces causalités transitives attestent que les femmes ont plus pâti de la pandémie Covid-19 que les hommes. Par ailleurs, le rapport fait ressortir que les femmes déclarent davantage être «très inquiètes» en cas d’apparition d’une nouvelle vague et le sont plus que les hommes (36,8% contre 31,4%). 

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