Conseil : L’hypocrisie en milieu professionnel, qu’est-ce que vous en pensez ?
Justement, certains collaborateurs avancent qu’il faut être hypocrite pour réussir en milieu professionnel. Êtes-vous du même avis ?
Malheureusement, il faut bien le reconnaître : c’est une technique qui marche. La réalité et même les études démontrent que les personnes qui expriment ouvertement leurs points de vue sont généralement perçues comme négatives et trouvent beaucoup de difficultés à gravir les échelons. L’hypocrisie au travail est instaurée comme une compétence de plus à acquérir. Les gens préfèrent parfois qu’on leur mente plutôt que de les affronter avec des réalités qu’ils sont dans l’impossibilité d’assumer ou d’admettre. L’égotisme ambiant pousse certaines personnes à l’humilité face aux sons de cloche qui ne sont pas les leur. D’autres personnes se murent dans le silence et la passivité due à une fatigue simple et absolue pour se prémunir du Léviathan de l’hypocrisie ambiante. Mon avis personnel est le suivant : l’intégrité fait l’homme, le franc-parler est une vertu, mais dans la mesure où cela ne doit pas blesser ou offenser les autres. Pour moi, un certain dosage entre sa propre réalité et un peu du politiquement correct doivent être savamment agencés pour s’assurer un meilleur bien-être dans l’entreprise. Bien entendu, l’hypocrite invétéré qui blâme son vice secret dans les autres et qui use de ses stratagèmes pour nuire est à bannir. Un hypocrite véritable est plus dangereux qu’un homme malhonnête. Un homme malhonnête trompe et un hypocrite trahit et arnaque. Un hypocrite méprise ceux qu’il trompe, mais n’a aucun respect pour lui-même. Néanmoins, il existe toujours la médaille et le revers de la médaille. Les hypocrites tombent toujours dans des contradictions avec eux-mêmes et finissent par se sentir «sales» dans tous les sens du terme.Ce phénomène peut-il avoir des impacts sur l’engagement des collaborateurs ?
L’hypocrisie a un coût et même très lourd : c’est celui de renforcer la médiocrité et de la maintenir. C’est également un facteur qui engendre et approfondit la souffrance. Je cite l’exemple d’un conflit de valeurs qui peut survenir entre deux personnes de niveaux hiérarchiques identiques ou différents et pourrait découler sur un litige interpersonnel. Le conflit de valeurs occasionne une souffrance due à dissonance cognitive et émotionnelle. La perte d’estime de soi, l’insomnie et divers troubles physiologiques sont occasionnés par cette dissonance tels que l’anxiété, la frustration, la colère ou la culpabilité, voire la dépression. En outre de la souffrance psychologique, le désengagement et la perte de sens sont également une résultante de l’hypocrisie sur le moyen ou le long terme. Cela signifie qu’à force de jouer un rôle qui n’est pas le nôtre et d’affirmer des réalités qui ne sont pas les nôtres, ou prônons des valeurs qui ne correspondent pas à notre idéal, nous devenons moins impliqués et nous nous désengageons pour alléger notre conscience.Quelles sont vos recommandations pour assurer le respect des valeurs morales en entreprise ?
ne certaine sagesse par rapport à cette question. Une certaine clairvoyance vis-à-vis de soi-même est requise pour assurer un équilibre mental. De même, il est important de maintenir un dialogue intérieur avec soi-même afin de se rappeler qui on est réellement et là où on veut aller et à quel prix. Il faut garder à l’esprit les valeurs véritables auxquelles on doit s’arrimer contre vents et marées. Parce qu’en fin de compte, les gens méprisent ceux qui sont connus comme étant hypocrites bien qu’ils leur soient utiles pour une durée déterminée. Vivre conformément à notre éthique est une condition sine qua non pour notre santé mentale contre l’aliénation et la désintégration. Sinon tout cela ne rimerait à rien. Pour l’entreprise, elle doit garantir une cohérence entre sa charte de valeurs et ses véritables pratiques. En effet, les études sur le terrain ont démontré que l’honnêteté paye toujours plus que la tromperie. L’entreprise doit encourager à l’ouverture du dialogue pour canaliser les tensions, et donc la souffrance qui en découle et pour rapprocher les visions divergentes.