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Symbole du libéralisme américain, la Silicon Valley résistera-t-elle à la «tentation» républicaine ?

Une anecdote aux États-Unis disait qu’un républicain, qui s’accroche bec et ongles aux valeurs conservatrices de son parti, aura besoin d’un passeport pour accéder à la Silicon Valley, bastion du libéralisme incarné par le camp démocrate.

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Cœur battant de l’innovation au pays de l’oncle Sam, la Silicon Valley regroupe les géants de l’industrie technologique mondiale qui sont considérés comme les «partisans» de la mondialisation, de la libre entreprise et des libertés individuelles. Des principes érigés en valeurs défendues dans l’arène politique par le parti démocrate et consacrées dans la grande région de Californie comme des marques distinctives de l’identité de cet État de la côte ouest américaine.

Lors des élections présidentielles de 2020, 90% des dons provenant des entreprises de technologie installées dans cette région ont été destinés au camp démocrate pour soutenir le ticket porté par le Président Joe Biden et sa vice-présidente, Kamala Harris face à l’ancien locataire de la Maison-Blanche, Donald Trump et son colistier Mike Pence.

À en croire les statistiques de l’organisation qui traque les données sur les campagnes électorales, Open Secrets, à San Francisco, où se situe la Silicon Valley et fleurissent les grandes compagnies et les méga-donateurs, seulement 9% des électeurs ont voté en faveur du candidat républicain en 2016 contre 13% en 2020. Ces résultats reflétaient, selon les observateurs, l’ancrage des valeurs libérales dans cette partie des États-Unis acquise aux démocrates.

«La Silicon Valley a toujours été considérée comme le bastion du libéralisme, à tel point que la victoire de Donald Trump en 2016 a provoqué le désespoir», écrit le journaliste spécialisé Tabby Kinder, notant que soutenir le milliardaire new-yorkais lors de ces élections présidentielles relevait des sujets tabous.

Cette donne a commencé à changer à la lumière des derniers rebondissements survenus sur la scène politique américaine. Le choix par Trump du jeune entrepreneur J.D Vance qui s’est lancé dans le risque-capital à San Francisco, la tentative d’assassinat contre l’ancien chef de l’exécutif américain, l’exaspération d’un nombre croissant d’investisseurs de la politique de l’administration démocrate notamment vis-à-vis des startups de technologie, et l’ascension inattendue de Kamala Harris à la tête du parti démocrate suite à l’abandon de Joe Biden, sont autant de facteurs qui alimentent ce changement.

«Une partie influente de la richesse et du pouvoir de la Silicon Valley se range désormais derrière Trump pour remporter la course à la Maison Blanche en novembre aux côtés de son vice-président, J. D. Vance, un ancien capital-risqueur qui a vécu à San Francisco pendant près de deux ans», fait observer Kinder dans un article repris par les médias américains.

De son côté, Thom Jensen, journaliste à la chaîne d’information NBC, estime que l’arrivée de Vance, qui a tissé des liens étroits avec les conservateurs les plus riches de la Silicon Valley, fait grandir l’influence du Grand Old Party, notant que lors d’un récent événement de collecte de fonds dans cette partie influente de la Californie, la campagne Trump-Vance a pu recueillir 12 millions de dollars de dons en une journée.

Parmi ces «technologistes» éminents qui soutiennent Trump figure le milliardaire et propriétaire de Tesla et SpaceX, Elon Musk, qui a exprimé, sur sa plateforme sociale X, son appui au ticket républicain immédiatement après la tentative d’assassinat ayant visé l’ancien président lors d’un rassemblement électoral en Pennsylvanie. D’autres investisseurs comme Marc Andreesen et Ben Horowitz, deux «pionniers d’Internet», dont la société de capital-risque vaut quelque 35 milliards de dollars, ont apporté leur soutien au ticket républicain en vue de la présidentielle du 5 novembre prochain.

Pour ces «Trump Boosters» et d’autres entrepreneurs affirmés comme Joe Lonsdale, cofondateur de Palantir Technologies, et Chamath Palihapitiya, un homme d’affaires canado-américain, il est temps de mettre un terme aux politiques «défavorables» mises en place par l’administration démocrate contre les entreprises, notamment les startups.

«Les partisans de Trump dans la Silicon Valley parient sur le fait que l’ancien président réduira leur fardeau fiscal et augmentera les bénéfices de leurs entreprises», commente Tabby Kinder, notant que nombre de ces entrepreneurs cherchent désespérément à éviter le projet de Biden visant à taxer les plus-values latentes à 25% pour les particuliers dont la fortune est supérieure à 100 millions de dollars.

Ces dernières années, des observateurs constatent que les régulateurs de la concurrence ont sévi contre les entreprises technologiques, forçant les grandes compagnies à mettre en veilleuse leurs fusions et acquisitions, et privant les entreprises soutenues par le capital-risque d’accords de sortie lucratifs.

Aux yeux de ces investisseurs, une administration républicaine à la Maison Blanche adoptera une «approche plus amicale» à l’endroit de l’innovation technologique, y compris les domaines émergents de la crypto-monnaie et de l’intelligence artificielle, estimant toutefois qu’un nouveau mandat démocrate incarné par Kamala Harris ne sera pas de bon augure pour leur épanouissement économique.

«Je crois en une Amérique qui donne la pleine mesure de la liberté et du mérite individuels», a lancé Elon Musk dans un tweet. «C’était le cas du camp démocrate, mais aujourd’hui, le pendule bascule vers le parti républicain», a-t-il souligné.

Malgré le soutien conséquent apporté au ticket républicain par des hommes d’affaires de poids, des experts estiment qu’il serait difficile de déloger le parti démocrate de la Silicon Valley. Certes, la candidature de Kamala Harris, originaire de la Californie, ne faisait pas l’unanimité au début, mais sa campagne ne cesse de prendre de l’élan et de gagner en intensité.

Désormais de plus en plus de donateurs se départent de leur incertitude vis-à-vis des chances démocrates lors du prochain scrutin et apportent leur soutien à Harris, commentent plusieurs médias, relevant que cet élan met en évidence l’emprise durable des démocrates sur l’épicentre de la technologie en Californie.

Dans cette partie de l’État doré, «les électeurs ont longtemps été orientés à gauche du centre sur des questions sociales comme le droit à l’avortement et l’immigration, et devraient le faire pendant des années encore», estime Katie Roof dans un article publié sur «Bloomberg News».

Pour les observateurs, seul le scrutin du 5 novembre va déterminer, au vu de la conjoncture politique et économique de l’heure, si la Silicon Valley va demeurer cette forteresse imprenable des démocrates ou si elle va enfin céder à la «tentation» républicaine représentée par le duo Trump-Vance.

Par Karim Aouifia
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