Menu
Search
Samedi 22 Mars 2025
S'abonner
close
Samedi 22 Mars 2025
Menu
Search
lock image Réservé aux abonnés

Bensaïd se lâche : communication du gouvernement, son bilan, ses limites...

La majorité composée du RNI, du PAM et de l’Istiqlal n’est pas au mieux de sa forme, de l’aveu même de Mohammed Mehdi Bensaïd. «Il faut que chacun prenne ses responsabilités en tant que membre de la majorité. Nous avons des défis communs à relever, et cela nécessite une solidarité sincère et non feinte», a déclaré le ministre de la Jeunesse, de la culture et de la communication lors d’une rencontre tenue jeudi à l’initiative de la Fondation Lafqui Titouani. Évoquant la communication gouvernementale, il a reconnu qu’«il y a effectivement des lacunes», soulignant qu’à l’approche de la fin du mandat gouvernemental, «la majorité est sous pression pour démontrer des résultats tangibles».

No Image
«Rien n’est pire qu’une majorité divisée». Mohammed Mehdi Bensaïd, le ministre de la Jeunesse, de la culture et de la communication, s’est voulu ferme dans une déclaration faite lors d’un échange avec des journalistes organisé jeudi dernier par la Fondation Fquih Tetouani. Appelant au renforcement de la solidarité au sein de la majorité, le ministre n’a pas hésité à dénoncer les querelles qui traversent l’équipe aux commandes. Mais derrière les mots, les fractures apparaissent : critiques publiques, ambitions électorales précoces et une opinion publique qui regarde, de loin, une coalition fragilisée.

«Il nous faut une solidarité autant qu’une majorité gouvernementale»

Le point de départ de l’intervention de M. Bensaïd ? Une attaque directe envers d’autres partis de la majorité gouvernementale, avant même que les journalistes ne commencent à poser leurs questions. M. Bensaïd a ainsi voulu répondre aux critiques émises par des membres de la majorité, notamment du Rassemblement national des indépendants (RNI), concernant la gestion du ministère de l’Habitat, dirigé par la pamiste Fatima Ezzahra El Mansouri. «Le problème du PAM, c’est qu’il est clair et direct dans ses paroles et ses alliances. Quand nous sommes solidaires, nous le sommes pleinement, même lorsque nos membres ne sont pas concernés directement par certains dossiers. Mais que ceux qui cherchent à nous attaquer sachent qu’ils nous trouveront toujours unis», a lancé M. Bensaïd dans un avertissement à peine voilé.

Les propos du ministre interviennent après une sortie médiatique remarquée de Mohamed Aujjar, membre du RNI, qui a pointé du doigt la gestion du secteur de l’habitat, critiquant notamment la «bureaucratie et les lenteurs administratives» ayant un impact négatif sur l’emploi. Une attaque frontale qui n’a pas plu au PAM (Parti authenticité et modernité). «Lorsque nous étions dans l’opposition, nous critiquions le manque de coordination dans les gouvernements précédents. Aujourd’hui, nous sommes au pouvoir et nous ne pouvons pas reproduire les mêmes erreurs. Il y a une manière décente et responsable d’exprimer des remarques lorsqu’on est en poste de responsabilité», a insisté M. Bensaïd. Pour lui, ces critiques publiques traduisent une course électorale prématurée au sein de la majorité. «Ce n’est pas encore le moment des surenchères politiques. Il reste encore 15 ou 16 mois avant les élections. Si nous commençons à nous disputer maintenant, nous serons épuisés bien avant l’heure. Quelle image cela renvoie-t-il aux citoyens ?» s’est-il interrogé.

Solidarité ou rivalités ?

Si Bensaïd a tenté de minimiser l’ampleur des tensions, ses propos reflètent toutefois une réalité de plus en plus palpable : les divisions au sein de la majorité sont bien présentes. Tout en appelant à la cohésion, le ministre n’a pas hésité à pointer la responsabilité des autres partis. «Nous devons nous surveiller nous-mêmes, en tant que partis de la majorité, avant de nous soucier des partis de l’opposition», a-t-il affirmé. Un message clair adressé à ses alliés, rappelant que toute division interne affaiblirait leur capacité à répondre aux attentes des citoyens. «Il faut que chacun prenne ses responsabilités en tant que membre de la majorité. Nous avons des défis communs à relever, et cela nécessite une solidarité sincère et non feinte», a souligné M. Bensaïd. Puis, revenant sur l’identité politique de son parti, le PAM, M. Bensaïd a défendu une ligne centriste et sociale, tout en réaffirmant son ancrage dans les valeurs nationales. «Nous sommes un parti centriste, moderniste, mais avec un focus social dans un cadre marocain fidèle à nos traditions. Nous voulons des Marocains libres, fiers de leurs valeurs, tout en respectant la Commanderie des croyants. Le politique ne doit pas interférer dans les croyances religieuses des citoyens», a-t-il déclaré.

Une communication gouvernementale insuffisante

L’un des points centraux de l’intervention de M. Bensaïd a été la critique implicite de la communication gouvernementale. «J’ai toujours insisté auprès de mes collègues sur l’importance de mieux communiquer. Nous avons une responsabilité d’informer les citoyens sur ce que nous faisons. Les critiques envers nos politiques publiques viennent souvent d’un manque de transparence ou de clarté dans notre communication», a-t-il indiqué. Ce constat fait écho aux récentes polémiques, notamment autour de la gestion de la crise de la rougeole ou du retard dans la reconstruction des zones touchées par le séisme. Interpellé par la journaliste Sanae Rahimi de 2M sur l’absence de communication des ministères concernés, M. Bensaïd a concédé : «Il y a effectivement des lacunes. Mais je ne suis pas à la tête de la majorité pour imposer des réponses aux autres ministères.» Une réponse qui illustre la difficulté de la majorité à parler d’une seule voix face aux crises.

La lutte contre la corruption, un effort encore timide

Sur le sujet épineux de la corruption, le ministre a défendu l’action du gouvernement tout en admettant des limites. «La corruption est un frein majeur à l’investissement étranger. Elle nuit à la confiance des investisseurs et, par ricochet, à notre économie nationale. Le système judiciaire agit, et nous avons des institutions comme la Cour des comptes qui jouent un rôle clé», avant de déplorer la réduction du budget de l’Instance nationale de la probité, «ce qui complique sa mission». Le haut responsable a également pris ses distances avec les propositions controversées de Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, visant à limiter le droit des associations à porter plainte pour dénoncer des cas de corruption. «Ces débats doivent être menés avec prudence. Ce qui est certain, c’est que toute réforme doit renforcer la transparence et non la limiter.»

Tensions sur fond de promesses non tenues

À l’approche des élections de 2026, M. Bensaïd n’a pas caché les ambitions du PAM pour l’avenir. «Nous avons la capacité de diriger le gouvernement du Mondial. Mais cela nécessitera une majorité soudée et une action cohérente pour répondre aux attentes des citoyens.» Le ministre a toutefois avoué que la majorité était sous pression pour démontrer des résultats tangibles. Il a reconnu ainsi que certains engagements ne pourraient pas être honorés dans leur totalité. «Atteindre 60% des objectifs fixés lors de l’investiture actuelle serait déjà un succès. Nous devons être réalistes face aux défis économiques et sociaux, tant au niveau national qu’international.» Cependant, les critiques sur la lenteur de la reconstruction post-séisme ou le manque de progrès dans certains secteurs continuent de peser sur l’image du gouvernement. Des vidéos montrant des villages toujours en ruine après le séisme ont circulé sur les réseaux sociaux, alimentant la colère de la population. Interrogé sur ces retards, M. Bensaïd a répliqué : «Nous faisons de notre mieux, mais il faut éviter la désinformation. Les défis sont immenses, mais cela ne signifie pas que nous ne faisons rien».
Lisez nos e-Papers