Le chômage des jeunes, la faible participation des femmes à l'activité économique, la prédominance du secteur informel et la précarité des emplois créés. Ces maux chroniques du marché du travail marocain imposent aujourd'hui «une refonte des politiques de l'emploi pour en faire un pilier central de cohésion sociale, de compétitivité et de soutenabilité». C’est ce qui ressort d’une étude, lancée par l’Institut Royal des études stratégiques. Réalisée par un groupe d’experts et d’universitaires, l’étude se veut une contribution au débat national autour des enjeux de la croissance économique et de la création d’emplois au Maroc.
Un tissu économique caractérisé par une productivité et une inclusivité limitées
L'étude de l'IRES (du moins la partie publique de 170 pages), intitulée «La croissance économique et la création d'emplois au Maroc», dresse un constat sans appel. La faible intensité de la croissance économique en emplois constitue le premier handicap structurel : «un million de dirhams de demande finale ne génère que six emplois directs, niveau largement inférieur à celui observé dans de nombreux pays émergents».
Cette faible performance s'explique par un rendement insuffisant des facteurs de production qui «freine la croissance des entreprises et limite leur capacité à créer des emplois en nombre requis», analysent les rédacteurs du rapport. La structure sectorielle aggrave cette situation, dominée par des activités «relativement vulnérables aux aléas climatiques et aux chocs exogènes» où «une large part de la population active travaille dans l'agriculture, le BTP et les services peu qualifiés, souvent informels et faiblement encadrés».
L'industrie manufacturière, malgré son rôle de «pourvoyeur d'emplois formels et productifs», a une contribution au PIB «n'excédant pas 18%». Cette limitation s'accompagne d'une base exportatrice «relativement peu diversifiée» où «le nombre relativement restreint de produits exportés agit négativement sur la résilience commerciale du Maroc et réduit les débouchés pour l'emploi».
Cette faible performance s'explique par un rendement insuffisant des facteurs de production qui «freine la croissance des entreprises et limite leur capacité à créer des emplois en nombre requis», analysent les rédacteurs du rapport. La structure sectorielle aggrave cette situation, dominée par des activités «relativement vulnérables aux aléas climatiques et aux chocs exogènes» où «une large part de la population active travaille dans l'agriculture, le BTP et les services peu qualifiés, souvent informels et faiblement encadrés».
L'industrie manufacturière, malgré son rôle de «pourvoyeur d'emplois formels et productifs», a une contribution au PIB «n'excédant pas 18%». Cette limitation s'accompagne d'une base exportatrice «relativement peu diversifiée» où «le nombre relativement restreint de produits exportés agit négativement sur la résilience commerciale du Maroc et réduit les débouchés pour l'emploi».
La persistance de l’économie informelle
Le secteur informel révèle lui aussi l'ampleur du défi. Selon les données du Haut-Commissariat au Plan citées dans l'étude, ce pan de l'économie «constitue près de 30% du PIB et emploie près de 60% de la population active». Un phénomène aux racines profondes, «valorisé pour son autonomie, sa flexibilité et sa solidarité communautaire», mais qui «échappe toutefois aux cadres de régulation et de protection». Parallèlement, la mortalité élevée des entreprises s'explique «en partie par la carence des dispositifs d'accompagnement post-création pourtant cruciaux pour garantir la pérennité entrepreneuriale et stabiliser les emplois générés», souligne le document de l'IRES. Cette fragilité entrepreneuriale coexiste avec «une persistance de l'économie de rente au détriment de l'investissement productif».
Formation et marché du travail : un dialogue difficile
Le deuxième nœud identifié par l'Institut concerne l'inadéquation chronique entre le système de formation et les exigences du marché du travail. La «faible valorisation des compétences transversales (Soft skills) dans les approches pédagogiques» constitue un handicap majeur, la «focalisation sur les savoirs techniques» réduisant «l'adaptabilité des jeunes et leur capacité à s'intégrer dans un marché en mutation rapide». Cette déconnexion s'accentue par «une implication très partielle des professionnels dans la conception des programmes de formation, entraînant une inadéquation avec les réalités sectorielles et les évolutions technologiques».
Le rapport pointe également «l'absence de mécanismes d'alternance et de reconversion» où «l'inexistence de dispositifs efficaces de reskilling, d'upskilling et de formation en alternance freine l'insertion professionnelle». Le paradoxe marocain réside dans un tissu productif «qui reste dans sa grande majorité peu demandeur de profils de l'enseignement supérieur», la «plupart des petites et moyennes entreprises (PME)» ne possédant «pas les services nécessitant un niveau de formation supérieur, tels par exemple le marketing et la recherche & développement».
Les freins socioculturels persistent
Le troisième dysfonctionnement structurel touche aux dynamiques sociétales. Les «freins socioculturels persistants à l'inclusion économique des femmes» demeurent prégnants : «le harcèlement professionnel, la répartition inégalitaire des responsabilités familiales et certaines normes sociales restreignent leur accès au marché du travail, en dépit des avancées juridiques et institutionnelles».
L'étude révèle également «un attrait marqué pour la fonction publique», préférence «motivée par la recherche de stabilité» qui «éloigne de nombreux jeunes de l'initiative privée et des parcours entrepreneuriaux». Cette tendance s'accompagne d'une «perte de confiance dans les dispositifs d'appui à l'emploi» où «une grande partie des jeunes s'en détourne, réduisant leur recours aux mécanismes d'insertion disponibles». Plus préoccupante encore, la perception d'un avenir plus prometteur à l'étranger intensifie la fuite des cerveaux, incitant une part croissante des jeunes diplômés à s'expatrier, privant l'économie nationale d'un capital humain nécessaire à sa transformation structurelle, déplore l’étude.
L'étude révèle également «un attrait marqué pour la fonction publique», préférence «motivée par la recherche de stabilité» qui «éloigne de nombreux jeunes de l'initiative privée et des parcours entrepreneuriaux». Cette tendance s'accompagne d'une «perte de confiance dans les dispositifs d'appui à l'emploi» où «une grande partie des jeunes s'en détourne, réduisant leur recours aux mécanismes d'insertion disponibles». Plus préoccupante encore, la perception d'un avenir plus prometteur à l'étranger intensifie la fuite des cerveaux, incitant une part croissante des jeunes diplômés à s'expatrier, privant l'économie nationale d'un capital humain nécessaire à sa transformation structurelle, déplore l’étude.
Une gouvernance fragmentée
Le quatrième nœud concerne la gouvernance du marché de l'emploi où l'analyse a identifié «plusieurs insuffisances institutionnelles ayant des retombées défavorables sur les politiques publiques». En première ligne, «la rigidité et l'obsolescence du Code du travail», en vigueur depuis 2004, qui «ne permet pas de réguler les formes d'emploi émergentes ni d'accompagner les transformations du marché du travail». Cette obsolescence juridique s'accompagne d'une «carence des systèmes d'information» où «le manque d'outils fiables et adéquats limite le pilotage, le suivi et l'évaluation des politiques de l’emploi». L'IRES signale également «une coordination institutionnelle inappropriée» avec «la dispersion des actions et le déficit d'articulation entre programmes» qui «nuisent à l'efficacité des politiques publiques».
Le diagnostic pointe enfin un manque d'intelligence territoriale où l'incapacité à analyser avec précision les besoins locaux empêche la mise en place de réponses ciblées et adaptées aux spécificités régionales du marché du travail. Le document de l’IRES indique, par ailleurs, que depuis le début des années 2000, le Maroc a multiplié les réformes économiques – diversification industrielle, développement des métiers mondiaux, promotion des exportations – et lancé diverses initiatives pour élargir l'accès au financement et encourager la formalisation des entreprises. Des dispositifs comme Idmaj, Tahfiz ou les mesures post-Covid ont amélioré l'employabilité «sans pour autant générer d'effets durables sur le marché du travail», constate l'IRES. La nouvelle Charte de l'investissement, qui oriente les flux vers des secteurs à fort potentiel, les territoires sous-dotés et les activités créatrices d'emplois, commence néanmoins à produire des résultats concrets en matière d'emploi.
Le diagnostic pointe enfin un manque d'intelligence territoriale où l'incapacité à analyser avec précision les besoins locaux empêche la mise en place de réponses ciblées et adaptées aux spécificités régionales du marché du travail. Le document de l’IRES indique, par ailleurs, que depuis le début des années 2000, le Maroc a multiplié les réformes économiques – diversification industrielle, développement des métiers mondiaux, promotion des exportations – et lancé diverses initiatives pour élargir l'accès au financement et encourager la formalisation des entreprises. Des dispositifs comme Idmaj, Tahfiz ou les mesures post-Covid ont amélioré l'employabilité «sans pour autant générer d'effets durables sur le marché du travail», constate l'IRES. La nouvelle Charte de l'investissement, qui oriente les flux vers des secteurs à fort potentiel, les territoires sous-dotés et les activités créatrices d'emplois, commence néanmoins à produire des résultats concrets en matière d'emploi.
Quatre mutations à transformer en opportunités
Face à ces dysfonctionnements, l'Institut Royal des études stratégiques identifie quatre dynamiques structurelles que le Royaume doit anticiper : le vieillissement démographique, le progrès technologique, le changement climatique et les nouvelles formes d'organisation du travail. Le vieillissement de la population marocaine, avec une part des personnes âgées de 60 ans et plus passée de 9,4% en 2014 à 13,8% en 2024 et qui devrait atteindre 23,2% à l'horizon 2050, selon les données du Haut-Commissariat au Plan, «ouvrirait des perspectives en matière de développement de nouveaux gisements d'emplois». L'économie du soin, les services à la personne et la santé à domicile représentent autant de secteurs porteurs, selon l’IRES.
Le progrès technologique, notamment l'essor des technologies avancées telles que l'intelligence artificielle, l'internet des objets, la réalité virtuelle, la robotique, constitue une opportunité pour l'économie marocaine aussi. Toutefois, «l'automatisation alimentée par l'intelligence artificielle est de nature à déséquilibrer en profondeur le marché du travail national». Sur le plan environnemental, malgré la forte vulnérabilité climatique du Maroc qui constitue un risque majeur pour la résilience économique et l'emploi, le Royaume dispose d'un important potentiel de création d'emplois inhérents aux métiers verts qui «représente une véritable chance pour réduire le chômage, spécifiquement chez les jeunes».
Enfin, les nouvelles formes d'organisation du travail, telles que l'auto-entrepreneuriat, les coopératives, les groupements d'employeurs, pourraient progressivement transformer les dynamiques d'insertion professionnelle au Royaume en offrant «une flexibilité accrue» et en facilitant «l'inclusion des publics sous-représentés, notamment les femmes et les jeunes».
Le progrès technologique, notamment l'essor des technologies avancées telles que l'intelligence artificielle, l'internet des objets, la réalité virtuelle, la robotique, constitue une opportunité pour l'économie marocaine aussi. Toutefois, «l'automatisation alimentée par l'intelligence artificielle est de nature à déséquilibrer en profondeur le marché du travail national». Sur le plan environnemental, malgré la forte vulnérabilité climatique du Maroc qui constitue un risque majeur pour la résilience économique et l'emploi, le Royaume dispose d'un important potentiel de création d'emplois inhérents aux métiers verts qui «représente une véritable chance pour réduire le chômage, spécifiquement chez les jeunes».
Enfin, les nouvelles formes d'organisation du travail, telles que l'auto-entrepreneuriat, les coopératives, les groupements d'employeurs, pourraient progressivement transformer les dynamiques d'insertion professionnelle au Royaume en offrant «une flexibilité accrue» et en facilitant «l'inclusion des publics sous-représentés, notamment les femmes et les jeunes».
