Menu
Search
Samedi 28 Décembre 2024
S'abonner
close
Samedi 28 Décembre 2024
Menu
Search
lock image Réservé aux abonnés

Comment le gouvernement compte booster l’action des inspecteurs du travail

Piliers du chantier de généralisation de la protection sociale, les inspecteurs du travail jouent un rôle crucial dans la transformation du paysage socio-économique marocain. Garants du respect des droits fondamentaux des salariés, ces agents assurent le contrôle de l'inscription des entreprises à la CNSS, l'enregistrement des employés et la déclaration des salaires... Malgré des avancées notables, le dispositif d'inspection fait face à des défis de taille, notamment un manque de ressources humaines et une complexification croissante des missions. Focus sur les réalisations, les obstacles et les solutions pour renforcer ce maillon essentiel de l'édifice social marocain.

Hicham Sabiry, secrétaire d'État chargé de l'Emploi.
Hicham Sabiry, secrétaire d'État chargé de l'Emploi.
Au Maroc, les inspecteurs du travail se trouvent aujourd'hui au cœur d'une véritable révolution sociale. Acteurs incontournables de la mise en œuvre du Chantier Royal de généralisation de la protection sociale, ils veillent au quotidien à faire respecter les droits élémentaires des travailleurs. «L'inspection du travail constitue un des rouages essentiels visant à assurer la dignité des citoyens, lutter contre la précarité sociale et améliorer les conditions de vie des Marocains», souligne Hicham Sabiry, secrétaire d'État chargé de l'Emploi. Une mission d'autant plus importante qu'elle participe activement à la concrétisation de la vision Royale d'un État social juste et inclusif.

Des prérogatives élargies pour une meilleure protection des salariés

Investis d'un large spectre de compétences en vertu du Code du travail, les inspecteurs s'assurent en premier lieu de l'affiliation des entreprises à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS). Ils contrôlent également l'enregistrement effectif des employés ainsi que la déclaration de leurs salaires réels. «Durant les neuf premiers mois de 2024, les inspecteurs du travail ont adressé 7.219 observations liées à la sécurité sociale, 590 portant sur l'affiliation des sociétés, 5.048 sur l'immatriculation des salariés et 1.581 sur la déclaration des rémunérations», détaillait, il y a quelques jours, le secrétaire d'État dans une réponse aux questions orales à la Chambre des représentants.



Au-delà de cette mission fondamentale, ils sont habilités à vérifier le respect de l'ensemble de la législation sociale au sein des unités de production, pour garantir à la fois la préservation de la paix sociale, la promotion des relations professionnelles et l'amélioration de la santé-sécurité au travail. Autant de leviers indispensables pour consolider le dialogue social et développer la négociation collective.

Une modernisation des outils pour gagner en efficacité

Conscient des enjeux, le ministère de l'Inclusion économique, de la petite entreprise, de l'emploi et des compétences a engagé d'importants chantiers pour renforcer les capacités opérationnelles de l'Inspection du travail. «Nous avons déployé un système d'information intégré baptisé “choghlcom” qui couvre et unifie l'ensemble des activités des inspecteurs, favorisant ainsi la fluidité des données entre les différentes composantes du ministère», précisait Hicham Sabiry. Cette digitalisation s'accompagne de la dotation des agents de tablettes électroniques connectées pour une plus grande réactivité sur le terrain.

En parallèle, un projet global de restructuration des services déconcentrés est à l'étude, avec pour objectifs d'optimiser la couverture territoriale, notamment à l'échelle régionale, de mieux répondre aux attentes des usagers et de stimuler la performance des inspecteurs. «Cette réforme offrira à l'Inspection du travail les moyens d'accomplir ses missions avec l'efficacité et l'efficience requises», assure le secrétaire d'État.

Des effectifs renforcés pour faire face à l'ampleur de la tâche

Autre axe prioritaire : la consolidation des ressources humaines. Ces cinq dernières années, le corps des inspecteurs s'est étoffé de 262 nouvelles recrues, portant le total à 596 agents. Parmi eux, 28 administrateurs ont intégré le corps en 2019, suivis de 22 inspecteurs de deuxième grade la même année. En 2020 et 2021, ce sont respectivement 82 et 100 inspecteurs qui ont rejoint les rangs. «Pour 2024, 10 inspecteurs de 2e grade et 20 de 3e grade ont été recrutés», ajoutait Hicham Sabiry.

Un effort conséquent, mais qui demeure insuffisant au regard de l'étendue des missions et de la pression croissante qui pèse sur les inspecteurs. En 2023, ces derniers ont ainsi réalisé 52.580 visites de contrôle, formulé près d'un demi-million d'observations (dont 124.052 liées aux salaires), traité 54.588 conflits individuels et géré 993 conflits collectifs. Un rythme difficilement soutenable sans un renforcement plus marqué des effectifs.

Cap sur la montée en compétences des inspecteurs

Pour relever ces défis, le ministère mise également sur le développement continu des compétences, en particulier pour les nouvelles recrues. «Nous accordons une importance stratégique à la formation afin de valoriser notre capital humain. Nous veillons à adapter les modules aux besoins métiers des inspecteurs, en utilisant des techniques pédagogiques interactives», insistait le secrétaire d'État. À titre d'exemple, les inspecteurs fraîchement intégrés ont bénéficié en novembre-décembre 2022 d'un cycle intensif d'un mois, axé sur les spécificités du ministère, les soft skills et le renforcement des compétences techniques.

Une démarche appelée à s'inscrire dans la durée. «La Direction des ressources humaines planche sur un programme de formation pluriannuel, élaboré de manière participative à partir d'une compréhension fine des besoins», soulignait Hicham Sabiry dans le même cadre. Une enquête a ainsi été diligentée auprès de l'ensemble des fonctionnaires pour identifier les axes prioritaires du plan 2024. De quoi insuffler un nouvel élan à ce corps en première ligne de la justice sociale.

Dialogue social et coordination : les clés d'une inspection du travail renforcée

Au-delà des aspects RH et organisationnels, le département de l'Emploi engage une réflexion de fond sur le statut des inspecteurs du travail. «Nous avons élaboré un projet de révision que nous enrichissons via des consultations internes poussées et un dialogue social soutenu avec les représentants syndicaux», ajoutait le secrétaire d'État. L'objectif est d’aboutir à un texte ambitieux répondant aux aspirations légitimes de ce corps de contrôle. Cette concertation s'inscrit dans une dynamique plus large d'ouverture et de synergie institutionnelle. Ainsi, une convention de partenariat a été signée avec la CNSS pour renforcer la coopération sur les volets clés du contrôle, de l'échange d'informations, du traitement des plaintes, mais aussi de la formation et du partage d'expertises. Une convergence des efforts indispensable pour muscler l'efficacité globale du dispositif.

À la croisée des chemins entre progrès social et performance économique, les inspecteurs du travail veillent à l'application rigoureuse du droit social, contribuant ainsi activement à la stabilité des relations professionnelles, gage d'une compétitivité durable des entreprises. Ce rôle fait d'eux des acteurs pivot de l'émergence d'un modèle de développement alliant justice sociale et efficacité productive, et appelle, à ce titre, une mobilisation sans faille des pouvoirs publics pour leur donner les moyens d'être à la hauteur de cette responsabilité éminente.
Lisez nos e-Papers