Mohamed Habib Khammali, vice-président de TIZI (Tariq Ibnou Ziyad Initiative) et consultant en stratégie des politiques publiques, a livré une analyse percutante sur la communication institutionnelle au Maroc, lors de son passage sur le plateau de «L’Info en Face» de Matin TV. Pour cet acteur engagé de la société civile, il devient urgent de repenser la manière dont l'État parle à sa jeunesse, au risque de laisser une génération entière en marge des grands chantiers du Maroc à l’horizon 2030.
L'entretien a été l'occasion de dresser un constat sans détour : la communication autour des politiques publiques demeure largement déconnectée des attentes et des usages des jeunes. Des dispositifs comme le «Pass Jeune» ou la feuille de route pour l’emploi souffrent, selon lui, d’un déficit criant de visibilité. Une carence d’autant plus regrettable que ces programmes, souvent ambitieux dans leur contenu, peinent à rencontrer leur public cible, faute d’un déploiement stratégique adéquat.
L'entretien a été l'occasion de dresser un constat sans détour : la communication autour des politiques publiques demeure largement déconnectée des attentes et des usages des jeunes. Des dispositifs comme le «Pass Jeune» ou la feuille de route pour l’emploi souffrent, selon lui, d’un déficit criant de visibilité. Une carence d’autant plus regrettable que ces programmes, souvent ambitieux dans leur contenu, peinent à rencontrer leur public cible, faute d’un déploiement stratégique adéquat.
Un échec de visibilité plus qu’un échec de conception
«Comment imaginer que des jeunes puissent adhérer à des politiques dont ils ignorent jusqu’à l’existence ?» interroge M. Khammali, en évoquant le Pass Jeunes, qui donne accès à une quarantaine d’avantages – réduction sur les transports, accès à la culture, soutien à l’insertion professionnelle. Pour lui, le problème n’est pas tant dans le contenu que dans l’incapacité à en assurer une communication efficace. Il cite en contrepoint le programme Forsa, dont la notoriété tient justement à une campagne de communication bien menée, mêlant clarté des procédures, relais sur les réseaux sociaux et mobilisation d’influenceurs. Ce succès d’audience, bien que discuté sur le fond, prouve selon M. Khammali qu’une information bien pensée peut changer la donne.
Mais cette stratégie a ses limites. Si les influenceurs peuvent jouer un rôle, M. Khammali avertit contre une dépendance excessive à leur égard. «Les médias institutionnels doivent garder un rôle structurant. Reléguer les canaux officiels au second plan nuit à la crédibilité des politiques publiques», souligne-t-il, appelant à un équilibre entre les formats numériques et les médias classiques.
Mais cette stratégie a ses limites. Si les influenceurs peuvent jouer un rôle, M. Khammali avertit contre une dépendance excessive à leur égard. «Les médias institutionnels doivent garder un rôle structurant. Reléguer les canaux officiels au second plan nuit à la crédibilité des politiques publiques», souligne-t-il, appelant à un équilibre entre les formats numériques et les médias classiques.
Pour une professionnalisation de la communication publique
Pour l’invité de Matin TV, une réforme profonde est indispensable. Il appelle à structurer l’écosystème de la communication publique autour de deux piliers : l’investissement stratégique et l’encadrement des intervenants. Il plaide pour la création d’un statut officiel pour les influenceurs associés aux campagnes publiques, assorti d’un code de déontologie. L’objectif, faire émerger des relais fiables et crédibles, capables de porter les messages de l’État sans les dénaturer. «La communication ne peut plus être considérée comme une dépense secondaire. Elle est un levier stratégique pour l’efficacité de l’action publique», insiste M. Khammali, ajoutant que cette revalorisation passe aussi par une meilleure formation des élites technocratiques aux enjeux de transmission, d’écoute et de pédagogie.
Une jeunesse entre désenchantement et loyauté
Plus largement, Mohamed Habib Khammali appelle à une reconfiguration du lien entre les institutions et les jeunes. Il pointe un paradoxe structurant : alors que la majorité des jeunes Marocains affiche une défiance envers les structures politiques classiques, leur attachement à l’identité nationale et au destin du pays reste profondément enraciné. Ce socle de loyauté constitue, selon lui, un capital précieux qu’il faut mobiliser dans une logique de co-construction. Il appelle donc à l’émergence d’une élite politique renouvelée, capable de porter les aspirations de la jeunesse, tout en respectant les exigences de rigueur et de transparence. «Le Maroc de 2030 ne pourra être pensé avec les outils d’hier. Il faut des visages nouveaux, mais aussi des méthodes nouvelles», affirme-t-il.
Cap sur 2026 et 2030 : TIZI en ordre de marche
À la tête de TIZI, Mohamed Habib Khammali projette déjà l’action de son organisation dans la perspective des prochaines échéances électorales de 2026. TIZI prévoit ainsi un cycle de rencontres avec les leaders politiques afin d’éclairer les jeunes sur les programmes électoraux et encourager une participation citoyenne plus consciente.
Un livre blanc, intitulé «Vision TIZI pour le Maroc 2030», est également en préparation. Il dressera les priorités de la jeunesse marocaine dans différents secteurs (emploi, éducation, climat, mobilité...), avec l’objectif d’en faire un document de référence pour les partis politiques en quête de renouvellement. Enfin, TIZI veut renforcer l’éducation civique à travers des campagnes de vulgarisation sur le fonctionnement des institutions et l’importance du vote. «Comprendre les rouages de l’action publique, c’est le premier pas vers une citoyenneté active», estime M. Khammali.
Un livre blanc, intitulé «Vision TIZI pour le Maroc 2030», est également en préparation. Il dressera les priorités de la jeunesse marocaine dans différents secteurs (emploi, éducation, climat, mobilité...), avec l’objectif d’en faire un document de référence pour les partis politiques en quête de renouvellement. Enfin, TIZI veut renforcer l’éducation civique à travers des campagnes de vulgarisation sur le fonctionnement des institutions et l’importance du vote. «Comprendre les rouages de l’action publique, c’est le premier pas vers une citoyenneté active», estime M. Khammali.
Un appel à dépasser les blocages
Au fil de son intervention, Mohamed Habib Khammali a aussi posé une question politique de fond : faut-il tenter de régénérer les partis traditionnels ou ouvrir la voie à de nouvelles forces capables de porter les aspirations des jeunes ? Sans trancher, il appelle à un sursaut collectif pour dépasser les logiques partisanes stériles et ouvrir un dialogue stratégique sur le Maroc de demain. «Le pays ne peut pas se permettre de tourner en rond. Nous avons besoin de dirigeants capables d’écouter, d’unir et d’agir avec cohérence», conclut-il.
