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Crise des Facultés de médecine : voilà comment le climat de défiance s’est installé

Les Facultés de médecine et de pharmacie sont toujours paralysées par la grève des étudiants, qui ont choisi d’intensifier leur mouvement de protestation contre la rupture du dialogue avec le gouvernement. Ce dernier a affirmé mercredi dernier à la Chambre des représentants qu’il ne ferait pas de concessions supplémentaires, estimant que l’offre présentée aux étudiants était «exceptionnelle» et répondait à la plupart de leurs revendications. De leur côté, les étudiants, qui ont boycotté les examens et comptent en faire de même avec les sessions de rattrapage, tiennent mordicus à leurs doléances, en tête desquelles le rétablissement d’un cursus de formation de 7 années au lieu de 6. Tout en se disant disposés à reprendre le dialogue, ils se défendent contre les accusations portées contre eux et qui leur prêtent l’intention de bloquer la réforme du secteur de la santé. Dans ce climat délétère, la défiance s’est installée progressivement, rendant tout retour au dialogue quasi impossible. Invité de l’Info en Face, Yasser Derkaoui, membre de la commission nationale des étudiants en médecine, en médecine dentaire et en pharmacie et président du bureau des étudiants de la Faculté de médecine de Rabat, revient sur l’évolution de cette crise et comment on en est arrivé là.

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Bien que décidés à poursuivre leur boycott des examens, notamment les examens de rattrapage, les étudiants en médecine, en médecine dentaire et en pharmacie se disent toujours disposés à poursuivre le dialogue avec le gouvernement en vue de trouver une solution définitive à cette crise qui paralyse les Facultés depuis plus de 7 mois. Cette volonté a été de nouveau réaffirmée mardi par le membre de la commission nationale des étudiants en médecine, en médecine dentaire et en pharmacie et président du bureau des étudiants de la Faculté de médecine de Rabat, Yasser Derkaoui.

S’exprimant dans le cadre de l’émission «L’Info en Face» produite par Groupe Le Matin, M. Derkaoui a indiqué que le boycott des examens par les étudiants et la poursuite des protestations ne devaient pas être interprétés comme un signe de défiance ou une tentative de mettre la pression sur le gouvernement. C’est plutôt, a-t-il précisé, un cri de détresse lancé par des étudiants qui souffrent après avoir épuisé tous les recours pour faire entendre leur voix et défendre leurs revendications. Ils ont bon espoir de pouvoir rétablir le dialogue et sauver ainsi l’année universitaire. «Les deux ministères (Santé et Enseignement supérieur, ndlr) font accroire que les étudiants veulent aller vers une année blanche. Au contraire, ces derniers sont disposés à passer les épreuves des examens, même au mois d’août, si un consensus est trouvé avec le gouvernement autour des principales revendications, notamment l’annulation de la réduction du nombre d’années de formation de 7 à 6 ans», a-t-il expliqué.

La durée de formation : la pomme de discorde

Cette revendication qui se heurte au refus catégorique du gouvernement est jugée légitime par M. Derkaoui, qui explique que la septième année représente l’année de la professionnalisation par excellence. «Officiellement, les futurs médecins effectuent au cours de cette année plus de 600 heures de stage, alors qu’en réalité, ils y effectuent plus de 1.800 heures de stage réparties entre les gardes de nuit et les stages de jour. Cette année ouvre par ailleurs la voie à la spécialisation, comme c’est le cas dans de nombreux pays à travers le monde», a argumenté l’invité de «L’Info en Face».
Et de renchérir : «Il n’existe aucun modèle de formation dans le monde qui adopte une durée de six années d’étude pour former des médecins, y compris le modèle canadien et américain. La durée moyenne pour former un médecin reste entre sept et huit années. Par ailleurs, ceux qui disent que les étudiants tiennent à une durée d’étude de 7 années en vue de pouvoir poursuivre leur spécialisation à l’étranger ont tout faux. Car il est possible de poursuivre ses études à l’étranger même avec un cursus à 6 années». Cela étant précisé, le président du bureau des étudiants de la Faculté de médecine de Rabat a affirmé que si le gouvernement souhaitait garder ses cadres médicaux, il n’aurait qu’à améliorer l’attractivité du secteur public, comme l’a déjà souligné le ministre de la Santé précédemment.

Revenant sur les raisons du non-aboutissement de la dernière proposition formulée par le gouvernement et qui a été encadrée par le Chef du gouvernement, M. Darkaoui a justement évoqué le point relatif à la durée des études qui cristallise la divergence entre les deux parties. Il a également déploré la rétractation du gouvernement qui est revenu, selon lui, sur plusieurs propositions formulées lors d’une première réunion tenue début juin en présence du ministre de l’Enseignement supérieur.

Crise de confiance entre les étudiants en médecine et le gouvernement

Dès lors, la confiance a été rompue, rendant difficile toute reprise du dialogue. «Les étudiants avaient bien accueilli l’initiative gouvernementale visant à relancer le dialogue. Mais face à la rétractation des responsables sur plusieurs points cruciaux, portant notamment sur la réintégration des étudiants exclus ou encore la signature d’un procès-verbal contenant tous les points validés, les étudiants ont pris la décision du boycott. Pourtant, ces points et bien d’autres avaient été validés par les responsables gouvernementaux qui avaient donné leur accord de principe lors des premières réunions de dialogue», a expliqué M. Derkaoui, précisant que cette défiance ne date pas d’aujourd’hui.
Selon lui, le ministère est revenu plusieurs fois sur ses engagements, faisant fi de l’avis des premiers concernés. D’abord, il a choisi de faire cavalier seul et de mener la réforme du cahier des normes pédagogiques relatif au troisième cycle (6e et 7e années), alors qu’il était censé impliquer les étudiants. Et ce n’est pas tout, rappelle l’invité de «L’Info en Face» : «Le ministère, qui avait annoncé en 2022 ramener le cursus à 6 ans et y ajouter trois années de formation pour créer la spécialité de médecin de famille au lieu de médecin généraliste, a fini par faire marche arrière, à cause du coût élevé de cette réforme. Mais c’est la promulgation en mars 2023 du décret relatif à la suppression de la septième année de formation sans crier gare qui a consacré la rupture du dialogue».

Pour toutes ces raisons, la défiance s’est installée durablement poussant les étudiants demander à chaque fois des garanties pour le respect des engagements pris, a expliqué notre interlocuteur. C’est pourquoi d’ailleurs ils insistent pour que tout accord soit sanctionné par un PV dûment signé. Or cette exigence a été rejetée par le gouvernement, ce qui a envenimé davantage les rapports entre les deux parties, rendant encore plus difficile le retour à la table des négociations. «Il n’y a pas de bras de fer entre les étudiants et le gouvernement. Un bras de fer nécessite un rapport de force, qui n’existe pas dans ce cas. Les étudiants sont le maillon faible. Ils sont juste des gens sérieux qui cherchent à améliorer les conditions et la qualité de leur formation», a-t-il conclu.
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