Le climat social est tendu dans le secteur de la santé. La Coordination syndicale nationale du secteur de la santé a annoncé le lancement d’un programme de protestation progressif couvrant l’ensemble des établissements de santé à l’échelle nationale. Cette décision intervient en réaction aux récentes mesures prises par le gouvernement, notamment l’annonce de la mise en œuvre des décrets relatifs aux groupements sanitaires territoriaux «sans évaluation préalable ni concertation avec les professionnels concernés». La Coordination composée de six formations syndicales dénonce dans ce sens ce qu’elle qualifie de «passage en force gouvernemental dans la conduite de la réforme du système de santé».
Un calendrier de mobilisation à l’échelle nationale
Dans un communiqué publié en fin de semaine dernière, la coordination syndicale détaille un programme de mobilisation structurée en plusieurs étapes. Celui-ci prévoit l’organisation de sit-in de protestation dans l’ensemble des établissements de santé dès demain mercredi, suivis d’un rassemblement national et d’un sit-in devant le Parlement à Rabat le samedi 20 décembre, sachant qu’à compter du 22 décembre, les syndicats annoncent la suspension de leur participation aux programmes de santé, ainsi que le boycott de toutes les réunions avec le ministère de la Santé et les institutions qui lui sont rattachées. Le mouvement culminera avec une grève nationale dans toutes les structures de santé, à l’exception des services d’urgence, prévue pour le jeudi 8 janvier 2026.
Accusations de passage en force et de «fuite en avant»
À l’origine de cette colère, la non-implication des syndicats dans l’élaboration des décrets d’application. La coordination syndicale accuse ainsi le gouvernement et le ministère de la Santé d’avoir fait adopter les décrets en Conseil du gouvernement «dans une logique de fuite en avant», visant à imposer le fait accompli aussi bien aux citoyens qu’aux professionnels du secteur. Une démarche qui, selon les syndicats, plonge le système de santé et ses travailleurs dans une incertitude préoccupante quant à leur avenir.
Une expérience prématurément qualifiée de «réussite»
Réagissant aux déclarations du porte-parole du gouvernement qualifiant de «réussie» l’expérience du groupement sanitaire territorial de la région de Tanger, la coordination s’est interrogée ainsi dans le même communiqué sur les indicateurs ayant permis d’aboutir à une telle conclusion, rappelant par la même occasion que cette expérimentation n’avait pas encore cinq mois d’existence et qu’aucune évaluation sérieuse n’avait été menée, ni pour cette expérience ni pour celles des agences concernées. Le communiqué rappelle à ce titre qu’aucune réforme ne saurait être généralisée avant d’avoir fait l’objet d’une évaluation rigoureuse, d’autant plus que ni les citoyens ni les professionnels, note la coordination, n’ont constaté, à ce stade, le moindre signe tangible de réussite.
Des services toujours défaillants et un malaise croissant
L’organisation syndicale souligne qu’au contraire, la population continue de souffrir de la faiblesse des services de santé, tandis que les professionnels expriment un profond mécontentement et une inquiétude croissante quant à leur avenir professionnel. Elle pointe un climat marqué par la confusion, l’improvisation, le manque de visibilité et l’absence d’efficacité dans la gestion du secteur depuis le lancement de cette réforme. Pour les syndicats, les décisions prises n’ont aucun lien avec la satisfaction des besoins sanitaires réels des citoyens. Elles s’inscriraient plutôt dans une logique d’agenda partisan, visant à faire passer, par l’intermédiaire du gouvernement, des choix politiques afin de renforcer le contrôle sur le secteur de la santé. La coordination dénonce également l’abandon de l’approche participative par le gouvernement et le ministère de la Santé, accusés de décider unilatéralement sans associer ni les professionnels ni les citoyens. Elle leur reproche en outre de se soustraire à la mise en œuvre des engagements issus de l’accord du 23 juillet 2024 et de ne pas avoir adopté les décrets promis.
Des textes réglementaires toujours en attente
Le communiqué souligne enfin le retard persistant dans la publication des textes d’application de la loi relative à la fonction publique sanitaire. Sont notamment cités le décret urgent sur la mobilité, la part variable du salaire, les indemnités liées aux zones difficiles ainsi que les nouvelles indemnités annoncées. Face à ce qu’elle considère comme une dérive préoccupante, la coordination syndicale appelle l’ensemble des professionnels du secteur à unir leurs efforts et à participer massivement aux actions de protestation annoncées, dans l’objectif de «redresser le système de santé public et de défendre les droits des travailleurs comme ceux des citoyens».
