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PLF 2026 : le Maroc muscle sa stratégie de l’eau face à la pénurie

Face au stress hydrique et à la variabilité climatique, le Projet de Loi de Finances 2026 traduit une montée en puissance de la politique de l’eau au Maroc. Le texte met l’accent sur la construction de nouveaux barrages, l’interconnexion des bassins, le développement du dessalement, la modernisation de l’irrigation et la réutilisation des eaux usées, tout en consolidant la gouvernance du secteur.

Le Maroc engage une nouvelle étape de sa politique de l’eau avec le Projet de Loi de Finances 2026. Dans un contexte marqué par le stress hydrique et la variabilité climatique, le Royaume consolide ses infrastructures, accélère le dessalement et renforce la gouvernance du secteur.

Grands barrages et interconnexions hydrauliques

Le Royaume dispose actuellement de 156 grands barrages totalisant une capacité de 20,8 milliards de m³. En 2025, le barrage Rhiss à Al Hoceïma, d’une capacité de 93 millions de m³, a été mis en service, tandis que trois autres ouvrages — Koudiat Borna, Béni Azimane et Sidi Abbou — viendront ajouter 256 millions de m³ de capacité supplémentaire.

Les travaux se poursuivent sur douze grands barrages représentant une capacité additionnelle de 4,55 milliards de m³, et deux nouveaux barrages seront programmés en 2026.

Le PLF 2026 prévoit également la poursuite du projet d’interconnexion entre les bassins de Sebou et de Bouregreg, conçu pour transférer un débit de 15 m³/s vers la zone Rabat-Casablanca, pour un coût total de 6 milliards de dirhams. D’autres transferts interrégionaux sont à l’étude, notamment la connexion entre Oued Laou-Larache, Loukkos et Oum Er-Rbia, permettant la valorisation d’environ 1 milliard de m³ d’eau auparavant perdue dans la mer.

Dessalement de l’eau de mer

La feuille de route nationale du dessalement de l’eau de mer, élaborée conformément aux Hautes Orientations Royales, prévoit la mobilisation de 1,7 milliard de m³ par an d’ici 2030. À terme, plus de la moitié des besoins en eau potable du pays seront couverts par le dessalement, tout en contribuant à l’irrigation agricole. Parmi les principaux projets :
  • Grand Casablanca : 200 millions de m³/an dès 2026, puis 300 millions de m³/an à l’horizon 2028 ;
  • Oriental : 300 millions de m³/an ;
  • Tanger : 150 millions de m³/an ;
  • Souss-Massa : 350 millions de m³/an ;
  • Rabat : 300 millions de m³/an ;
  • Dakhla : 37 millions de m³/an.
Ces projets, financés en partenariats public-privé (PPP), permettront de renforcer la résilience hydrique et de limiter la dépendance aux ressources conventionnelles.

Approvisionnement en eau potable

Le PLF 2026 consolide les programmes de sécurisation de l’alimentation en eau potable initiés entre 2020 et 2024, dont le coût global dépasse 18 milliards de dirhams : 8,72 MMDH pour les mesures d’urgence 2020-2022 ; 6,13 MMDH pour le programme 2023 et 3,19 MMDH pour celui de 2024.

Ces investissements couvrent des opérations prioritaires comme :
  • Transfert d’eau vers le Grand Tanger (840 MDH) ;
  • Alimentation des zones rurales de Safi, El Youssoufia et El Jadida via dessalement (669 MDH) ;
  • Distribution rurale par camions-citernes (515 MDH) ;
  • Adduction d’eau dessalée entre Jorf Lasfar et Daourat (1,17 MMDH) ;
  • Réseaux d’alimentation du sud-ouest de Casablanca (171 MDH) ;
  • Acquisition de stations monoblocs de potabilisation (2,34 MMDH) ;
  • Poursuite du programme de dépollution du Sebou (400 MDH).

Irrigation et agriculture

Le PLF consacre un effort soutenu à la modernisation de l’irrigation et au renforcement de la résilience des territoires ruraux. Déjà en 2024, 274.498 hectares ont été équipés en irrigation localisée, portant à 867.000 hectares la superficie modernisée depuis 2020. Les réseaux collectifs ont été réhabilités sur 48.000 ha, tandis que 42.000 ha supplémentaires sont en chantier. Deux projets structurants mobilisent à eux seuls 60 000 ha :
  • Le projet Saïss (30 000 ha), dont la première tranche de 10 000 ha est achevée et la seconde (20 000 ha) affiche 81% d’avancement.
  • Le projet du Gharb sud-est (30 000 ha), inscrit au PLF 2026 et financé via un accord avec la JICA, démarrera l’année prochaine.
Le volet social n’est pas en reste. Dans le cadre du PNAEPI 2020-2027, l’approvisionnement en eau potable (AEP) rurale bénéficie d’un budget global de 28,26 milliards de dirhams, dont 4,31 milliards pour la période 2022-2024. En 2025, 70 centres ruraux et 10 428 douars ont été raccordés à l’eau potable, et 1,32 milliard de dirhams supplémentaires sont programmés au titre de 2026 pour poursuivre ce chantier.

La gestion de la demande progresse également : 282 projets d’autonomie des réserves (3,26 Mds DH, 58% d’avancement) et 964 projets d’amélioration du rendement des réseaux (10,52 Mds DH, 54% d’avancement) visent un taux de rendement national de 78% d’ici 2027.

Assainissement et réutilisation de l’eau

Pour 2026, 1,3 milliard de dirhams sont programmés pour financer les nouveaux projets du PNAM, dans une logique de valorisation et de durabilité. Ce programme affiche déjà des progrès notables. Fin 2024, le taux de raccordement en milieu urbain atteint 84%, et le taux d’épuration 58%. Le Maroc dispose de 206 stations d’épuration, dont 8 émissaires en mer, couvrant 475 villes et centres. Le volume d’eau réutilisée s’élève à 52,6 millions de m³, dont 20,5 millions destinés à l’arrosage des terrains de golf.

Une gouvernance renforcée

La mise en œuvre de ces projets s’appuie sur le Comité interministériel de l’eau, garant d’une coordination institutionnelle renforcée. Les agences de bassins hydrauliques poursuivent la planification régionale et la gestion équilibrée des ressources, en lien avec la Charte nationale de l’environnement et du développement durable. Le PLF 2026 s’inscrit également dans la dynamique du Budget sensible au climat et de la fiscalité environnementale, confirmant l’intégration de la question hydrique dans l’ensemble des politiques publiques.

À travers ces dispositions, le PLF 2026 consolide la stratégie nationale de l’eau autour de trois priorités : sécuriser l’accès à la ressource, moderniser les infrastructures et promouvoir une gestion durable et équitable.
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