« Et si le 17 décembre devenait la Journée nationale de lutte contre la désinformation au Maroc ». C’est l’une des propositions formulées lors de la première rencontre nationale consacrée à la lutte contre les fake news, organisée à Rabat par le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication. La rencontre a réuni responsables institutionnels, régulateurs, professionnels des médias et experts, avec pour objectif d’aboutir à des recommandations opérationnelles pour anticiper la propagation des contenus trompeurs et renforcer les mécanismes de prévention, de régulation et de vérification de l’information.
Dans son allocution inaugurale, le ministre de la Culture, Mohamed Mehdi Bensaid, a expliqué que les fausses informations ne relèvent plus d’erreurs ponctuelles ou de dérives isolées. Elles se sont organisées en « une industrie à part entière », fondée sur la captation de l’attention, la monétisation de l’audience et la capacité d’influence sur l’opinion publique. Il a rappelé que le droit à l’information, garanti par la Constitution, constitue un pilier de la démocratie et un levier du développement, tout en soulignant que ce droit se trouve fragilisé par un environnement numérique marqué par la vitesse de diffusion, la concurrence entre contenus et la recherche permanente de visibilité.
Dans ce contexte, a poursuivi le ministre, l’information peut être instrumentalisée à des fins de manipulation et de désinformation, avec des répercussions directes sur la confiance dans les institutions et sur la cohésion sociale. Mehdi Bensaid a insisté sur un principe qu’il a présenté comme central, affirmant que « la meilleure réponse à la fausse information reste l’information juste, fiable et accessible ». Cette exigence suppose, selon lui, de renforcer la capacité des médias à produire et diffuser des contenus vérifiés dans des délais compatibles avec les rythmes du numérique, mais aussi de développer une communication institutionnelle plus transparente et plus réactive afin de réduire les espaces laissés aux rumeurs.
Pour étayer cette analyse, le ministre s’est appuyé sur l’expérience des crises récentes, notamment la pandémie de Covid-19. Il a rappelé que les périodes d’incertitude ont confirmé le rôle du journalisme professionnel comme référence informationnelle, vers laquelle les citoyens se tournent lorsque les rumeurs et les fausses informations se multiplient. Il a indiqué que cette confiance doit être consolidée par un travail constant sur la qualité, la crédibilité et la transparence de l’information, tout en soulignant que la lutte contre la désinformation repose sur « un effort collectif » impliquant institutions, médias, plateformes numériques et société civile.
Dans ce cadre, Latifa Akharbach a décrit l’évolution des pratiques informationnelles au Maroc, marquées par la multiplication des plateformes, la diversification des sources et la sophistication croissante des techniques de manipulation.
Pour étayer l’analyse, il a été fait référence aux vagues de rumeurs et de théories complotistes observées durant la crise sanitaire, aux contenus trompeurs diffusés lors des élections de 2021, ainsi qu’à la circulation de faux communiqués officiels, de rumeurs économiques, au recyclage d’images anciennes et à la diffusion de vidéos falsifiées ou sorties de leur contexte.
Dans le même registre, l’existence de campagnes de désinformation coordonnées a été évoquée, reposant sur des statistiques fabriquées, des cartes géographiques manipulées et des déclarations faussement attribuées à des États ou à des organisations internationales, souvent amplifiées par des comptes automatisés ou anonymes. La numérisation de l’espace public, a-t-elle souligné, n’a pas créé la manipulation, mais en a accru la portée, la vitesse et la capacité d’influence.
Ces constats ont été étayés par des données issues de travaux nationaux et internationaux. Selon le rapport national sur les usages des technologies de l’information et de la communication de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications, la télévision demeure une source d’information importante, avec 63,3 % des citoyens déclarant y recourir. Toutefois, le Digital News Report 2025 du Reuters Institute de l’Université d’Oxford montre que plus de 70 % des internautes marocains accèdent désormais à l’information via les réseaux sociaux, principalement YouTube et Facebook.
Ce déplacement des usages a, selon la présidente de la Haca, des conséquences directes sur la circulation de l’information. Elle a expliqué que, si la télévision conserve un statut de référence, les réseaux sociaux sont devenus le principal point d’entrée vers l’actualité, exposant les citoyens à des contenus qui échappent fréquemment aux mécanismes éditoriaux de vérification, de hiérarchisation et de mise en contexte. Elle a également souligné que, dans cet environnement, les plateformes exercent un pouvoir de sélection à travers des algorithmes dont les critères restent largement opaques, rappelant que l’information constitue « un bien public » et qu’elle doit répondre à des principes de responsabilité, de pluralisme et de transparence, dans le respect de la liberté d’expression.
Les chiffres présentés ont permis d’expliquer concrètement pourquoi la désinformation progresse plus vite que l’information vérifiée. Il a été indiqué qu’une information fausse se diffuse jusqu’à six fois plus rapidement sur les réseaux sociaux, en raison de sa construction souvent émotionnelle et sensationnaliste. Les contenus trompeurs ont ainsi environ 70 % de chances supplémentaires d’être partagés, car ils suscitent peur, colère ou indignation. Il a également été souligné que près de 80 % de ces contenus ne font l’objet d’aucun signalement, car ils ne sont pas toujours identifiés comme trompeurs au moment de leur diffusion, reposent souvent sur des éléments partiels ou sortis de leur contexte et atteignent leur pic de viralité avant toute détection ou intervention des mécanismes de modération. Cette dynamique met en évidence un décalage structurel entre la vitesse de propagation des fake news et la capacité de réaction des institutions, des médias et de la justice, dont les interventions obéissent à des procédures plus longues. Face à cet écart, les intervenants ont souligné l’importance d’intervenir en amont, en misant sur la prévention, la formation et l’éducation aux médias, considérées comme des leviers indispensables pour limiter l’impact de la désinformation, en complément des cadres juridiques existants.
Sur le plan opérationnel, la commission a préconisé la création d’une plateforme nationale de référence dédiée à la vérification de l’information, associant médias, institutions de formation, universités et acteurs de la société civile, avec pour mission de produire et diffuser des outils de fact-checking accessibles et réactifs. Elle a également recommandé le déploiement de programmes de formation continue à destination des journalistes et des créateurs de contenus, ainsi que l’équipement des rédactions en outils de veille et de détection des manipulations, y compris celles reposant sur les technologies de deepfake. La généralisation de l’éducation aux médias et au numérique auprès des jeunes et des publics vulnérables figure également parmi les priorités, tout comme le soutien aux initiatives citoyennes de vérification et l’instauration d’un label national destiné à distinguer les médias engagés dans des pratiques de vérification rigoureuses et de transparence des sources.
Dans son allocution inaugurale, le ministre de la Culture, Mohamed Mehdi Bensaid, a expliqué que les fausses informations ne relèvent plus d’erreurs ponctuelles ou de dérives isolées. Elles se sont organisées en « une industrie à part entière », fondée sur la captation de l’attention, la monétisation de l’audience et la capacité d’influence sur l’opinion publique. Il a rappelé que le droit à l’information, garanti par la Constitution, constitue un pilier de la démocratie et un levier du développement, tout en soulignant que ce droit se trouve fragilisé par un environnement numérique marqué par la vitesse de diffusion, la concurrence entre contenus et la recherche permanente de visibilité.
Dans ce contexte, a poursuivi le ministre, l’information peut être instrumentalisée à des fins de manipulation et de désinformation, avec des répercussions directes sur la confiance dans les institutions et sur la cohésion sociale. Mehdi Bensaid a insisté sur un principe qu’il a présenté comme central, affirmant que « la meilleure réponse à la fausse information reste l’information juste, fiable et accessible ». Cette exigence suppose, selon lui, de renforcer la capacité des médias à produire et diffuser des contenus vérifiés dans des délais compatibles avec les rythmes du numérique, mais aussi de développer une communication institutionnelle plus transparente et plus réactive afin de réduire les espaces laissés aux rumeurs.
Pour étayer cette analyse, le ministre s’est appuyé sur l’expérience des crises récentes, notamment la pandémie de Covid-19. Il a rappelé que les périodes d’incertitude ont confirmé le rôle du journalisme professionnel comme référence informationnelle, vers laquelle les citoyens se tournent lorsque les rumeurs et les fausses informations se multiplient. Il a indiqué que cette confiance doit être consolidée par un travail constant sur la qualité, la crédibilité et la transparence de l’information, tout en soulignant que la lutte contre la désinformation repose sur « un effort collectif » impliquant institutions, médias, plateformes numériques et société civile.
Plus de 70 % des internautes marocains accèdent à l’information via les réseaux sociaux
Cette lecture institutionnelle a été prolongée par une approche complémentaire portée par la présidente de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA), Latifa Akharbach. Prenant la parole à la suite du ministre, elle a expliqué que la désinformation ne doit pas être appréhendée comme un phénomène isolé, mais comme « un symptôme » révélateur de déséquilibres plus profonds affectant les systèmes médiatiques contemporains. Ces déséquilibres, a-t-elle précisé, sont liés à la transformation rapide des usages, aux pressions économiques exercées sur les médias et à l’affaiblissement des mécanismes de régulation dans l’espace numérique.Dans ce cadre, Latifa Akharbach a décrit l’évolution des pratiques informationnelles au Maroc, marquées par la multiplication des plateformes, la diversification des sources et la sophistication croissante des techniques de manipulation.
Pour étayer l’analyse, il a été fait référence aux vagues de rumeurs et de théories complotistes observées durant la crise sanitaire, aux contenus trompeurs diffusés lors des élections de 2021, ainsi qu’à la circulation de faux communiqués officiels, de rumeurs économiques, au recyclage d’images anciennes et à la diffusion de vidéos falsifiées ou sorties de leur contexte.
Dans le même registre, l’existence de campagnes de désinformation coordonnées a été évoquée, reposant sur des statistiques fabriquées, des cartes géographiques manipulées et des déclarations faussement attribuées à des États ou à des organisations internationales, souvent amplifiées par des comptes automatisés ou anonymes. La numérisation de l’espace public, a-t-elle souligné, n’a pas créé la manipulation, mais en a accru la portée, la vitesse et la capacité d’influence.
Ces constats ont été étayés par des données issues de travaux nationaux et internationaux. Selon le rapport national sur les usages des technologies de l’information et de la communication de l’Agence nationale de réglementation des télécommunications, la télévision demeure une source d’information importante, avec 63,3 % des citoyens déclarant y recourir. Toutefois, le Digital News Report 2025 du Reuters Institute de l’Université d’Oxford montre que plus de 70 % des internautes marocains accèdent désormais à l’information via les réseaux sociaux, principalement YouTube et Facebook.
Ce déplacement des usages a, selon la présidente de la Haca, des conséquences directes sur la circulation de l’information. Elle a expliqué que, si la télévision conserve un statut de référence, les réseaux sociaux sont devenus le principal point d’entrée vers l’actualité, exposant les citoyens à des contenus qui échappent fréquemment aux mécanismes éditoriaux de vérification, de hiérarchisation et de mise en contexte. Elle a également souligné que, dans cet environnement, les plateformes exercent un pouvoir de sélection à travers des algorithmes dont les critères restent largement opaques, rappelant que l’information constitue « un bien public » et qu’elle doit répondre à des principes de responsabilité, de pluralisme et de transparence, dans le respect de la liberté d’expression.
Quand le faux va plus vite que le vrai !
Ces analyses ont trouvé un prolongement opérationnel lors d’un panel réunissant responsables de médias, représentants des instances de régulation, acteurs du numérique et magistrats. Les échanges ont porté sur le fonctionnement concret de la désinformation et sur la clarification des responsabilités de chaque acteur. Les intervenants ont rappelé que la fake news ne se limite pas à une information factuellement fausse, mais recouvre plusieurs niveaux, allant de la rumeur non vérifiée à la manipulation de contexte, à la réutilisation de documents ou d’images falsifiés, jusqu’à des stratégies de désinformation structurées. Le stade le plus avancé correspond aux contenus de type deepfake, produits à l’aide de l’intelligence artificielle.Les chiffres présentés ont permis d’expliquer concrètement pourquoi la désinformation progresse plus vite que l’information vérifiée. Il a été indiqué qu’une information fausse se diffuse jusqu’à six fois plus rapidement sur les réseaux sociaux, en raison de sa construction souvent émotionnelle et sensationnaliste. Les contenus trompeurs ont ainsi environ 70 % de chances supplémentaires d’être partagés, car ils suscitent peur, colère ou indignation. Il a également été souligné que près de 80 % de ces contenus ne font l’objet d’aucun signalement, car ils ne sont pas toujours identifiés comme trompeurs au moment de leur diffusion, reposent souvent sur des éléments partiels ou sortis de leur contexte et atteignent leur pic de viralité avant toute détection ou intervention des mécanismes de modération. Cette dynamique met en évidence un décalage structurel entre la vitesse de propagation des fake news et la capacité de réaction des institutions, des médias et de la justice, dont les interventions obéissent à des procédures plus longues. Face à cet écart, les intervenants ont souligné l’importance d’intervenir en amont, en misant sur la prévention, la formation et l’éducation aux médias, considérées comme des leviers indispensables pour limiter l’impact de la désinformation, en complément des cadres juridiques existants.
Prévention, régulation et vérification au cœur des recommandations
C’est sur cette base qu’ont été formulées les recommandations issues des travaux de la commission mise en place lors de la rencontre nationale, qui a élaboré une douzaine de propositions visant à adapter la réponse publique aux enjeux de la désinformation à l’ère numérique. Parmi les axes structurants figure la révision du cadre juridique afin d’y intégrer explicitement les enjeux liés au numérique, notamment en matière de responsabilité des plateformes, de transparence algorithmique et d’encadrement des activités d’influence, en particulier les contenus sponsorisés et les réseaux automatisés.Sur le plan opérationnel, la commission a préconisé la création d’une plateforme nationale de référence dédiée à la vérification de l’information, associant médias, institutions de formation, universités et acteurs de la société civile, avec pour mission de produire et diffuser des outils de fact-checking accessibles et réactifs. Elle a également recommandé le déploiement de programmes de formation continue à destination des journalistes et des créateurs de contenus, ainsi que l’équipement des rédactions en outils de veille et de détection des manipulations, y compris celles reposant sur les technologies de deepfake. La généralisation de l’éducation aux médias et au numérique auprès des jeunes et des publics vulnérables figure également parmi les priorités, tout comme le soutien aux initiatives citoyennes de vérification et l’instauration d’un label national destiné à distinguer les médias engagés dans des pratiques de vérification rigoureuses et de transparence des sources.
