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Mendicité : l’ampleur du phénomène et les solutions selon le CESE

Le phénomène de la mendicité a été exacerbé par la Covid-19 et ses répercussions économiques. C’est ce qui ressort de l’avis rendu public mercredi dernier par le Conseil économique, social et environnemental. Par ailleurs, le Conseil révèle, selon une consultation publique qu’il a réalisée, que 98% des citoyens interrogés ont déclaré considérer la mendicité comme un phénomène social dangereux «portant atteinte à la dignité des personnes».

Les conclusions du Conseil économique, social et environnemental concernant la situation de la mendicité au Maroc sont pour le moins inquiétantes. Selon le président de cette institution, Ahmed Reda Chami, qui intervenait dans le cadre d’une rencontre de communication organisée mercredi à Rabat pour présenter son avis «Pour une société cohésive, exempte de la mendicité», ce phénomène a pris des proportions alarmantes.

En effet, malgré l’absence d’études, à part une enquête datant de 2007, certaines recherches de terrain ont dévoilé l’augmentation et l’aggravation de cette pratique, notamment après la crise sanitaire de Covid-19 et ses répercussions sur l’économie, l’emploi, le pouvoir d’achat et sa contribution à l’élargissement de la base de la pauvreté et de la précarité (plus de 3 millions de personnes supplémentaires sont tombées dans la précarité entre 2021 et 2022).

À ces facteurs circonstanciels s’ajoutent des facteurs de risque qui jetteraient les gens dans le fléau de la mendicité, tels que l’abandon de la famille, le divorce ou la perte du soutien de la famille pour les femmes, le faible niveau d’éducation et de formation, le déclin des valeurs de solidarité familiale, la dégradation de l’état de santé (santé physique et mentale) et le handicap.

>>Lire aussi : Le CESE lance une consultation citoyenne sur la mendicité

Ainsi, malgré l’importance des efforts déployés par les autorités publiques concernées pour faire face au phénomène de la mendicité, selon une approche qui combine la dimension préventive, l’accompagnement social et l’intervention judiciaire, le CESE constate que les mesures prises restent limitées en termes d’efficacité, d’efficience et de résultats. Et pour cause, explique M. Chami, la difficulté d’identifier et de cibler les catégories concernées par la mendicité, la multiplicité et la dispersion des programmes d’accompagnement social et de lutte contre la pauvreté, ainsi que la faiblesse des moyens financiers et humains alloués.



Pourtant, note le même responsable, il existe une prise de conscience générale des répercussions néfastes de ce phénomène sur la société. Car selon les résultats de la consultation publique lancée par le CESE sur la plateforme «Oucharikou.ma» afin de recueillir les perceptions, les avis et les recommandations des citoyens marocains (65.440 interactions, dont 4.780 ont répondu au questionnaire), plus de 98% des citoyens interrogés ont déclarés considérer la mendicité comme un phénomène social dangereux «portant atteinte à la dignité des personnes».

Par ailleurs, 69,5% des personnes interrogées ont exprimé leur espoir que la mendicité soit complètement interdite et, en retour, elles ont suggéré la mise en place d’aides aux groupes les vulnérables via des associations collectant des dons pour les en faire bénéficier ou à travers des programmes sociaux élaborés par l’État et les collectivités territoriales. S’agissant des raisons motivant les personnes qui acceptent d’aider les mendiants, l’analyse de l’interactivité du public fait ressortir que 72% d’entre elles le fait soit par compassion, soit par conviction religieuse ou morale, tandis que 16,6% le fait par peur.

Des recommandations pour contrer le phénomène de la mendicité

Pour éradiquer ce fléau, le Conseil économique, social et environnemental formule une série de recommandations. Parmi elles, l’élimination de toutes les formes de mendicité des enfants, en renforçant les mécanismes de protection de l’enfance au niveau territorial (unités de protection de l’enfance) et en fournissant les ressources humaines et matérielles nécessaires, ainsi qu’en renforçant les sanctions contre ceux qui exploitent les enfants et les trafiquants.

Le Conseil recommande aussi de protéger les personnes en situation de vulnérabilité contre l’exploitation sous la couverture de la mendicité, en renforçant les sanctions prévues dans le Code pénal contre certaines pratiques, notamment par les réseaux criminels qui exploitent les femmes, la mendicité des personnes âgées et des personnes handicapées, et l’avancement des politiques connexes. Le CESE propose en outre d’apporter la protection et l’assistance aux personnes handicapées et aux personnes âgées, et l’intégration sociale et économique des migrants exposés à la mendicité.

Enfin l’instance présidée par Reda Chami préconise la «réhabilitation et la réinsertion des personnes en situation de mendicité», ce qui nécessite avant tout d’œuvrer pour la «dépénalisation de la mendicité», compte tenu de la difficulté de déterminer ses véritables raisons, étant donné que les délits individuels ou collectifs associés à cette pratique sont punissables dans de nombreuses dispositions du Code pénal.
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