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Peines alternatives : ce qu’il faut savoir sur la nouvelle loi

Le Maroc vient de franchir une nouvelle étape dans le processus de renforcement de l’État de droit et de protection des droits de l’Homme. Avec l’adoption, lundi dernier, par la Chambre des représentants, du projet de loi n°43.22 relatif aux peines alternatives, le Royaume a mis à jour son arsenal juridique pour garantir la correspondance entre les délits commis et les sanctions prononcées. En vigueur dans plusieurs pays du monde, les peines alternatives ont prouvé leur efficacité. Il faudra bien sûr attendre quelque temps après leur application au Maroc pour commencer à voir les premiers résultats. Toutefois, avec l’adoption du texte de loi, la voie semble ouverte pour aller vers un système judiciaire moderne. Quelles sont ces nouvelles peines, quel sera leur champ d’application et qui seront les personnes concernées ? voici les détails d’une loi attendue depuis plusieurs années.

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Le très attendu projet de loi n°43.22 relatif aux peines alternatives a enfin franchi le cap du Parlement et sera promulgué dès sa publication au Bulletin officiel. En effet, la Chambre des représentants a adopté ce texte à la majorité, en seconde lecture, lundi dernier. Le projet, qui s’inscrit dans le cadre de la réforme pénale, a pour principal objectif de lutter contre la surpopulation carcérale. Il propose ainsi des solutions aux délits mineurs selon une approche de réhabilitation et d’intégration en dehors du cadre carcéral, dans le but d’inculquer l’esprit de citoyenneté, de devoir et d’engagement.

Le texte garantit également le respect de la dignité des condamnés lors de l’application des peines alternatives, leur vie privée et la situation de certaines catégories spéciales telles que les femmes, les mineurs, les personnes âgées et les personnes handicapées, en établissant un cadre juridique complet pour les peines alternatives, conformément aux règles matérielles du droit pénal relatives à la punition et en établissant des mécanismes et des contrôles procéduraux au niveau du Code de procédure pénale destinés au suivi et à l’exécution de ces peines. Quelles sont donc ces peines alternatives proposées dans le cadre de cette loi ? L’article premier du premier chapitre de la loi répond d’emblée à la question. Quatre peines alternatives seront mises en place. Il s’agit des travaux pour intérêt général, de la surveillance électronique, de la restriction de certains droits ou l’imposition de certaines mesures de contrôle et finalement l’amende journalière.

Qui seront les personnes concernées ?

Néanmoins ces peines ne seront pas accessibles à toutes les personnes condamnées. La loi précise qu’elles seront soumises bel et bien à certaines conditions. En effet selon les dispositions du texte (article 2 du chapitre 1), une peine alternative ne peut être prononcée que dans les affaires où la peine de prison prononcée ne dépasse pas 5 ans ferme. Cette mesure n’est pas envisageable non plus en cas de récidive et est également exclue pour les infractions graves. Il s’agit des crimes portant atteinte à la sécurité de l’État, le terrorisme, la traite des êtres humains, la corruption, l’abus de pouvoir, la dilapidation de l’argent public, le blanchiment d’argent, les crimes militaires, le trafic de drogues et de psychotropes, le trafic d’organes ou encore l’exploitation sexuelle des mineurs et des personnes en situation de handicap.

Trois heures de travaux au lieu d’une journée en prison

S’agissant des peines alternatives, le législateur a veillé à détailler et cadrer chaque peine afin de combler toutes les lacunes. Ainsi pour ce qui est du travail pour l’intérêt général, la loi exige que le détenu condamné à cette peine soit âgé de plus de 15 ans et qu’il dispose des capacités intellectuelles et physiques nécessaires à l’accomplissement du travail en question. Quant au travail lui-même, il n’est pas rémunéré et sa durée globale se situe entre 40 et 3.600 heures au maximum et il doit être réalisé en faveur des services de l’État, des établissements publics, des collectivités locales et des établissements de charité (article 6, chapitre 2). Le texte tient à préciser que trois heures de travail d’intérêt général sont l’équivalent d’une journée de détention en prison.

Surveillance électronique : un bracelet au poignet ou à la cheville

Pour ce qui est du placement sous surveillance électronique, la loi indique que cette mesure consiste à libérer le condamné tout en le soumettant à un certain nombre d’obligations, notamment la restriction des déplacements et la surveillance de leur mise en œuvre par voie électronique à distance, à l’aide d’un bracelet fixé au poignet ou à la cheville de l’individu concerné. Selon la loi, c’est le tribunal qui fixe la durée et le lieu de surveillance électronique en tenant compte de la gravité du crime, des conditions personnelles et professionnelles du condamné, ainsi que la sécurité des victimes et des droits personnels des personnes qui sont autour de lui (article 10, chapitre 3).

La restriction des droits comme mise à l’épreuve

Pour ce qui est du troisième type de peines alternatives, le texte propose la restriction de certains droits avec imposition de mesures de contrôle de traitement ou de qualification. D’après l’article 11 du chapitre 4, l’objectif de ces peines est de mettre le condamné à l’épreuve afin d’examiner sa capacité à corriger son comportement et sa disposition à réintégrer la société. S’agissant des restrictions prévues par la loi, elles concernent notamment :

• L’obligation du condamné d’exercer une activité professionnelle bien définie, une formation ou une activité de réhabilitation.

• L’obligation du condamné de demeurer dans un lieu fixe et bien défini (assignation à résidence) que ce dernier ne devra pas quitter ou qu’il ne pourra quitter que selon un horaire bien défini. Le condamné peut également être assigné à ne pas accéder à certains lieux, soit dans l’absolu, soit à certaines heures.

• L’individu condamné à cette peine alternative pourra également se retrouver dans l’obligation de se présenter périodiquement auprès de l’administration pénitentiaire, de la police, de la gendarmerie ou d’un bureau d’assistance sociale au tribunal (pointage).

• Il pourra également être assigné à suivre une cure de désintoxication ou une thérapie.

• Le condamné peut être amené à s’engager à ne plus entrer en contact avec ses victimes et à réparer les dégâts occasionnés par son infraction.

L’amende journalière conditionnée par l’abandon des poursuites par les victimes

S’agissant de la quatrième peine alternative, cette dernière consiste en une amende journalière variant entre 100 et 2.000 dirhams (article 14, chapitre 5). Néanmoins, le législateur conditionne l’accès à cette peine par la renonciation aux poursuites de la part des victimes et leur indemnisation éventuellement. Dans ce sens, le condamné devra présenter un justificatif prouvant la renonciation aux poursuites de la part de la victime ou ses ayants droit, ainsi qu’un justificatif de leur dédommagement. Le montant exact de l’indemnité et les personnes éligibles relèvent du pouvoir discrétionnaire du juge qui tient compte de la situation financière du condamné, de la gravité du crime ainsi que des dommages causés.

Le condamné est par ailleurs appelé à s’acquitter du montant de l’amende dans un délai qui ne doit pas dépasser six mois, sachant que le délai pourra être renouvelé une fois. Notons que le montant total de l’amende journalière devra être payé en une seule fois. Toutefois, le juge de l’application des peines peut autoriser l’échelonnement du paiement selon les délais fixés. Ainsi, le juge peut ordonner la libération du condamné en état de détention à condition qu’un premier acompte équivalent à la moitié de la somme à payer soit versé. Il convient de souligner qu’en cas de non-respect d’une peine alternative, le condamné se trouve confronté à l’application de la peine initiale (peine d’emprisonnement), avec une prise en compte de la durée de la peine effectivement effectuée.
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