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Pénurie d'eau : la Cour des comptes pointe le retard des projets hydrauliques

Le rapport annuel de la Cour des comptes pour 2022-2023 pointe un certain nombre de retards et de contraintes qui plombent la conduite du Plan national de l'eau et qui expliquent à bien des égards la situation critique qui sévit actuellement en matière de ressources hydriques. Détails.

Zineb El Adaoui, première présidente de la Cour des comptes.
Zineb El Adaoui, première présidente de la Cour des comptes.
La situation critique de pénurie d'eau est imputable à une succession d'années de sécheresse. Toutefois, elle aurait pu être atténuée si des projets de construction de grands barrages, d'interconnexion de bassins hydrauliques ou d'amélioration du rendement des réseaux de distribution d'eau potable avaient été menés à bien dans les délais. C'est ce qui ressort du rapport de la Cour des comptes pour 2022-2023, qui souligne qu'en raison de ces retards, des quantités considérables d'eau continuent d'être perdues, alors même qu'on est confronté à un grave déficit pluviométrique, lequel implique un usage excessif des eaux souterraines.

Le taux de réalisation des grands barrages prévus pour la période 2010-2020 ne dépasse pas 53%

Le programme de construction de grands barrages pour la période 2022-2023 a pris du retard par rapport aux prévisions établies, étant donné que sur la trentaine de grands barrages prévus, seuls 16 ont été construits, ce qui représente un taux de réalisation ne dépassant pas 53%. Ce retard s'explique, d'après la Cour des comptes, par plusieurs facteurs, notamment la lenteur du déclenchement de la procédure d'expropriation pour libérer le foncier nécessaire à la construction de ces ouvrages et la nécessité de recourir à des marchés complémentaires en raison du fait que le volume des travaux s'est avéré plus conséquent que ce qui avait été prévu. De plus, souligne la Cour, les barrages construits au cours de la période 2010-2020 ont fait passer la capacité globale de stockage d'eau de 17 à 19,1 milliards de mètres cubes, ce qui ne représente que 30% de l'objectif de 7 milliards de mètres cubes de capacité additionnelle d'ici à 2030.

S'agissant de la construction des petits barrages, le rapport indique que l'on est très en deçà des objectifs ambitieux de la Stratégie nationale de l'eau (SNE) 2009-2030, puisque seuls 75 petits barrages ont été construits sur les 500 prévus, ce qui représente un taux de réalisation ne dépassant pas les 15%.

Les études sur les projets d'interconnexion des bassins hydrographiques ont pris 10 ans de retard

Pour les projets d’interconnexion des bassins hydrauliques, adoptés dans le cadre de la SNE, la réalisation des études y afférentes a enregistré un retard de plus de 10 ans. En effet, la première phase de ces projets de transfert d'eau du nord au sud devait être achevée à la fin de l'année 2020, ce qui aurait permis de transférer 400 millions de mètres cubes par an. Toutefois, les études ont démarré en 2007, mais demeurent toujours en cours d’exécution jusqu’à septembre 2023, alors que leur achèvement était prévu en 2013. Cette situation, ainsi que la non-prise de mesures concrètes pour la mobilisation du financement, estimé à 30 milliards de dirhams, ont retardé le lancement de ces projets, souligne la Cour des comptes dans son rapport.

Par ailleurs, des modifications ont été apportées aux projets initiaux d'interconnexion des bassins hydrauliques, à la suite des études préparatoires du Plan national de l'eau 2020-2050, pour tenir compte de l'impact du changement climatique. Le nouveau plan prévoit, selon le rapport, la réalisation de grands projets d'interconnexion des bassins hydrauliques : le premier concerne l'interconnexion des bassins du Sebou, du Bouregreg et de l'Oum Er-Rabia, avec un volume total des eaux transférées compris entre 500 et 800 millions de mètres cubes, et le second consiste en l'interconnexion des bassins côtiers ouest-méditerranéens avec les bassins côtiers est-méditerranéens et celui de la Moulouya, dans le but de transférer 500 millions de mètres cubes par an.

Les objectifs d'amélioration du rendement des réseaux de distribution d'eau potable n'ont pas été atteints

En ce qui concerne l'amélioration du rendement des réseaux de distribution d'eau potable, le rapport note que la moyenne nationale est de 76%, ce qui signifie que 24% de l'eau potable se perd dans ces réseaux. Ce rendement, est-il souligné, reste bien inférieur à l'objectif fixé dans la SNE, à savoir 80% comme moyenne nationale en 2020. Toutefois, le rapport note que ce rendement a quand même progressé depuis 2006, où il était de 67%.

D'autre part, la Cour constate que le rendement des réseaux de distribution d'eau potable, tant ceux gérés par l'Office national de l'électricité et de l'eau potable que ceux gérés par les autres gestionnaires de réseaux de distribution, tient toujours à une simple déclaration et n'est soumis à aucun contrôle externe, ce qui ne garantit pas la crédibilité du rendement déclaré.

Le rapport souligne également que le ministère de l'Intérieur, dans sa réponse à la Cour des comptes, a fait savoir qu'il avait imposé à toutes les régies de distribution d'eau potable et aux sociétés de gestion déléguée de procéder à des audits par des cabinets indépendants ainsi qu'à des audits internes de leur côté. Le ministère a également appelé toutes les régies et sociétés de gestion déléguée à assurer le suivi et la mise en œuvre des recommandations issues des opérations d'audit ayant pour objet le renouvellement et l'entretien des réseaux de distribution.
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