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Pénurie d'eau, Défense, Croissance, Sécurité... les atouts et défis du Maroc selon l’IRES

Le Maroc affiche des performances contrastées dans son positionnement international, selon le nouveau Tableau de bord stratégique publié par l'Institut Royal des études stratégiques (IRES) en octobre 2024. Cette 12e édition, qui analyse 189 indicateurs stratégiques, révèle une amélioration notable dans des domaines comme la paix et sécurité internationales et la connectivité maritime, mais pointe aussi des faiblesses persistantes, notamment sur le plan économique et social. Le document met en lumière les défis majeurs auxquels le Royaume fait face, particulièrement en matière de souveraineté alimentaire, de disponibilité des ressources en eau et de développement du capital humain, dans un contexte mondial marqué par des mutations profondes.

Le secteur de la sécurité est emblématique des progrès accomplis par le Maroc.
Le secteur de la sécurité est emblématique des progrès accomplis par le Maroc.
Une croissance économique en berne, une dépendance alimentaire croissante, des ressources en eau qui s'amenuisent dangereusement : le diagnostic établi par l'IRES dans son dernier Tableau de bord stratégique (il s’agit de la 12e édition) sonne comme un avertissement. En l'espace de deux décennies, le Maroc a vu son taux de croissance économique chuter de 4,3% à 1,5%, tandis que sa dépendance aux importations de céréales a bondi à plus de 64%. Plus alarmant encore, les ressources en eau renouvelables par habitant ont chuté à 600 m³ en 2022, frôlant le seuil critique de pénurie absolue fixé à 500 m³.

Une méthodologie rigoureuse pour un diagnostic sans concession

Pourtant, tout n'est pas sombre dans ce panorama exhaustif du positionnement international du Royaume. Le pays réalise des percées remarquables dans certains secteurs stratégiques, se hissant notamment à la 25e place mondiale en matière de sécurité et confirmant sa position de leader africain dans la connectivité maritime. Un contraste saisissant qui illustre les défis complexes auxquels le Maroc doit faire face pour maintenir sa trajectoire de développement. La méthodologie adoptée par l'IRES pour cette édition 2024 s'appuie sur cinq piliers fondamentaux : la gouvernance, l'approche centrée sur l'humain (human-centric), l'aspect environnemental (nature-centric), la planétarisation et l'exponentialité. Le rapport compile des données provenant de multiples sources nationales et internationales, offrant ainsi une vision holistique de la position du Maroc sur l'échiquier mondial.

Un leadership régional confronté à des défis migratoires et économiques

Le secteur de la sécurité est emblématique des progrès accomplis par le Maroc. Le Royaume est doté «d'un positionnement exceptionnel en tant que leader mondial en ce qui concerne la promotion de la paix et de la sécurité internationales. Cette prééminence se manifeste principalement par le nombre important de troupes de maintien de la paix déployées par le Royaume au sein des missions des Nations unies ainsi que par ses performances en matière de cybersécurité», comme le souligne l'IRES dans son Tableau de bord stratégique. Le Royaume occupe désormais la 25e place mondiale à ce niveau. Une évolution positive du classement du Maroc, qui figure désormais parmi les 25 pays les plus sûrs à l'échelle mondiale et qui occupe la première place en Afrique.
Cette montée du Royaume dans le classement, entre 2019 et 2023, est expliquée principalement par sa stabilité politique et sécuritaire. Toutefois, le think tank «Fund For Peace» nuance ce tableau en pointant certains défis persistants. Le rapport souligne notamment que le positionnement intermédiaire du Maroc reste contrarié par plusieurs facteurs structurels, dont l'accroissement des flux migratoires, la fuite des cerveaux et les inégalités de développement économique. Ces éléments constituent autant de points de vigilance pour maintenir et améliorer la position du Royaume sur l'échiquier sécuritaire international.

Des avancées significatives dans certains secteurs stratégiques

Dans le domaine maritime, le Maroc confirme sa position de leader africain en matière de connectivité, se hissant à la 20e place mondiale en 2021. «Cette progression spectaculaire est le fruit d'investissements massifs dans les infrastructures portuaires. Le Maroc, champion de la connectivité maritime en Afrique, a gagné plus de 50 places, entre 2004 et 2021, dans le classement international au titre de cet indice. La création, en cours, de méga-ports à l'instar de Dakhla Atlantique et de Nador West Med devrait placer le Royaume, dans un avenir proche, dans le top 10 des nations ayant la meilleure connectivité maritime», analyse l'IRES dans son rapport.

Une montée en puissance significative des capacités militaires du Royaume

Le secteur de la défense n'est pas en reste, avec un classement favorable (61e sur 145 pays) en termes de puissance militaire, et se positionne à la 7e place au niveau africain. «Par ailleurs, la mise en place en cours par le Royaume de sa propre industrie militaire devrait renforcer sa souveraineté en la matière», souligne le document. Une progression qui témoigne des efforts substantiels déployés pour la modernisation des forces armées. Plus impressionnant encore, le Maroc se distingue particulièrement dans le domaine naval. «Le Royaume occupe la 25e position mondiale et la 4e place au niveau africain en termes de puissance militaire maritime», souligne le rapport. Cette performance s'appuie sur une flotte de 121 navires militaires, comme le précise la plateforme américaine «Wisevoter». Toutefois, l'IRES recommande de «développer l'arme sous-marine dans le cadre de l'implémentation de l'Initiative Royale pour l'Afrique Atlantique».

Les investissements dans le secteur de la défense reflètent cette ambition stratégique. Le rapport indique que les dépenses militaires du Maroc se maintiennent à un niveau significatif, atteignant 3,64% du PIB sur la période 2012-2023. «Ces dépenses importantes sont motivées par la nécessité de poursuivre la modernisation ainsi que le renforcement des capacités de défense du Maroc, de défendre son intégrité territoriale et de contrer les menaces potentielles, dans un contexte régional instable», explique le document.

Un changement majeur s'opère également dans la stratégie d'acquisition d'armements. Si les importations d'armes ont progressé dans un passé récent, atteignant 352 millions de dollars en 2022, le Royaume a amorcé un virage stratégique vers plus d'autonomie. «Le Maroc a lancé, récemment, le développement d'une industrie militaire et de défense», note l'IRES, soulignant que cette initiative s'inscrit dans «le nouveau paradigme de souveraineté stratégique.

Des défis persistants à relever

Cependant, le tableau n'est pas uniformément positif. Le rapport pointe plusieurs domaines où des progrès substantiels sont nécessaires. La croissance économique s'est considérablement ralentie, passant d'une moyenne de 4,3% sur la période 1999-2008 à seulement 1,5% entre 2019 et 2023. Plus préoccupant encore, le document met en lumière la vulnérabilité du pays face aux enjeux climatiques et hydriques. Les ressources en eau renouvelables par habitant ont chuté à 600 m³ en 2022, s'approchant dangereusement du seuil de pénurie absolue fixé à 500 m³.

Face à ces constats, l'IRES préconise une série de réformes structurelles. «Le Maroc doit accélérer sa transition vers une économie plus résiliente et inclusive», insiste le rapport, qui fait plusieurs recommandations. En effet, face à ces défis multiples, l'IRES préconise une approche globale et ambitieuse de transformation. Le rapport souligne l'urgence d'un renforcement substantiel du capital humain, qui doit passer par une refonte complète du système éducatif marocain.

Un impératif de transformation pour l'avenir

Cette réforme doit s'accompagner d'une accélération marquée de la transition énergétique et écologique, devenue impérative dans un contexte de changement climatique. En parallèle, le document insiste sur la nécessité d'une modernisation plus poussée de l'administration publique, couplée à un développement accéléré de l'économie numérique. Ces transformations, selon l'IRES, constituent les piliers fondamentaux sur lesquels le Maroc doit s'appuyer pour améliorer son positionnement international et assurer un développement durable et inclusif dans les années à venir. «L'édification de l'État social en cours devrait permettre de corriger certaines disparités».

«Dans le but d’améliorer sensiblement à l’avenir son positionnement international, le Maroc devrait engager des réformes d’envergure dans les domaines relevant du capital immatériel, notamment le capital humain, le capital social, le capital “savoir et technologie” et le capital institutionnel. Le Royaume devrait, également, prendre sérieusement en considération les nouveaux paradigmes de souveraineté hydrique, alimentaire, sanitaire et énergétique, dans un contexte international et national marqué par l’accélération du réchauffement climatique», note Mohammed Tawfik Mouline dans le liminaire de présentation de ce riche document de 260 pages, tout en soulignant l'importance d'une approche intégrée pour relever ces défis.
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