Ils rythment, depuis des siècles, la vie des campagnes marocaines et représentent bien plus que de simples lieux de commerce. Véritables places publiques et espaces de socialisation, les souks hebdomadaires constituent un patrimoine vivant au cœur de l'identité rurale du pays. Pourtant, ces institutions millénaires traversent aujourd'hui une période de transition critique. Entre disparitions annoncées et promesses de modernisation, l'avenir de ces marchés traditionnels suscite autant d'inquiétudes que d'espoirs parmi les milliers de «soukiers» qui en dépendent économiquement et socialement.
Des fermetures qui inquiètent les commerçants
Des souks hebdomadaires emblématiques, au retentissement national et même international, sont menacés de disparition. C'est déjà le cas du Souk Had Louizia, dont la dernière ouverture au public a eu lieu le dernier dimanche de l’année 2024, le 29 décembre 2024. Les commerçants et exposants d'autres marchés hebdomadaires, comme celui de Had Swissra, dans la localité rurale de Sidi-Moussa-Ben-Ali, ou de Sbit dans la province de Tit Mellil, craignent de subir prochainement le même sort.
Les professionnels concernés évoquent une stratégie de la grande wilaya de Casablanca – dont ils ont entendu parler – visant à recaser et moderniser ces entités économiques. Toutefois, interrogé sur le sujet, le pôle économique de la wilaya de Casablanca ne confirme pas cette information et précise que «la gestion des souks hebdomadaires n'est pas du ressort de la wilaya, mais relève de la responsabilité de chaque préfecture».
Les professionnels concernés évoquent une stratégie de la grande wilaya de Casablanca – dont ils ont entendu parler – visant à recaser et moderniser ces entités économiques. Toutefois, interrogé sur le sujet, le pôle économique de la wilaya de Casablanca ne confirme pas cette information et précise que «la gestion des souks hebdomadaires n'est pas du ressort de la wilaya, mais relève de la responsabilité de chaque préfecture».
Une feuille de route nationale en préparation
Dans ce contexte d'incertitude, une récente réponse du ministre de l'Intérieur à une question écrite du chef du groupe parlementaire haraki (Mouvement populaire) apporte un éclairage nouveau. Cette réponse détaille les actions gouvernementales entreprises pour améliorer le fonctionnement des collectivités territoriales et annonce la mise sur pied d'une feuille de route nationale pour la modernisation des souks hebdomadaires.
Dans sa réponse officielle, Abdelouafi Laftit, ministre de l'Intérieur, explique : «Dans le cadre de l'accompagnement des collectivités territoriales pour la modernisation des installations locales à caractère commercial, notamment les abattoirs de viandes rouges, les marchés de gros de fruits et légumes et les marchés hebdomadaires, le ministère travaille à l'élaboration d'une feuille de route nationale.»
Cette initiative est menée par la Direction générale des collectivités territoriales, en partenariat avec les ministères de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts ainsi que de l'Industrie et du commerce. Le ministre rappelle qu'en 2024, son département a lancé des appels d'offres pour réaliser l'étude relative à cette feuille de route.
Dans sa réponse officielle, Abdelouafi Laftit, ministre de l'Intérieur, explique : «Dans le cadre de l'accompagnement des collectivités territoriales pour la modernisation des installations locales à caractère commercial, notamment les abattoirs de viandes rouges, les marchés de gros de fruits et légumes et les marchés hebdomadaires, le ministère travaille à l'élaboration d'une feuille de route nationale.»
Cette initiative est menée par la Direction générale des collectivités territoriales, en partenariat avec les ministères de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts ainsi que de l'Industrie et du commerce. Le ministre rappelle qu'en 2024, son département a lancé des appels d'offres pour réaliser l'étude relative à cette feuille de route.
Une stratégie nationale avec un financement conséquent
Selon M. Laftit, cette nouvelle feuille de route constituera «un outil stratégique pour suivre la réforme de ces installations économiques, en identifiant les nouveaux projets à réaliser ou les sites à réhabiliter, à déplacer ou à fermer dans chaque région». Ces transformations suivront «un calendrier précis et une structure institutionnelle et financière convenue avec toutes les parties concernées».
Parallèlement, un programme national de réhabilitation des marchés hebdomadaires est en préparation, élaboré dans un cadre participatif avec les départements de l'Agriculture et du Commerce. «Ce programme vise à organiser les espaces d'activités économiques au sein de ces installations, à améliorer l'attractivité des territoires, à renforcer la compétitivité et le développement durable, à créer des opportunités d'emploi et à améliorer les conditions de travail pour les commerçants, artisans et usagers des marchés», a précisé le ministre.
Pour financer ce programme ambitieux, une enveloppe d'un milliard de dirhams sera mobilisée. Ce budget sera financé conjointement par trois ministères : l'Intérieur via la Direction générale des collectivités territoriales (500 millions de dirhams), l'Agriculture (250 millions de dirhams), et l'Industrie et commerce (250 millions de dirhams). Cette initiative gouvernementale soulève désormais la question de la coordination entre cette stratégie nationale et les décisions locales qui semblent déjà affecter certains souks historiques.
Parallèlement, un programme national de réhabilitation des marchés hebdomadaires est en préparation, élaboré dans un cadre participatif avec les départements de l'Agriculture et du Commerce. «Ce programme vise à organiser les espaces d'activités économiques au sein de ces installations, à améliorer l'attractivité des territoires, à renforcer la compétitivité et le développement durable, à créer des opportunités d'emploi et à améliorer les conditions de travail pour les commerçants, artisans et usagers des marchés», a précisé le ministre.
Pour financer ce programme ambitieux, une enveloppe d'un milliard de dirhams sera mobilisée. Ce budget sera financé conjointement par trois ministères : l'Intérieur via la Direction générale des collectivités territoriales (500 millions de dirhams), l'Agriculture (250 millions de dirhams), et l'Industrie et commerce (250 millions de dirhams). Cette initiative gouvernementale soulève désormais la question de la coordination entre cette stratégie nationale et les décisions locales qui semblent déjà affecter certains souks historiques.
État des lieux des souks hebdomadaires selon le HCP
D'après les dernières données du Haut-Commissariat au Plan (HCP), le Maroc compte 1.022 souks hebdomadaires actifs répartis inégalement sur l'ensemble du territoire national. La région de Marrakech-Safi arrive en tête avec 16,5% des marchés ruraux, suivie de Souss-Massa (13,5%), Béni Mellal-Khénifra (13,0%), Fès-Meknès (12,9%), Tanger-Tétouan-Al Hoceïma (9,9%) Casablanca-Settat (8,3%) et Rabat-Salé-Kénitra (7,1%). À l'opposé, certaines régions comme Laâyoune-Sakia El Hamra ne représentent que 0,1% du total national et Guelmim-Oued Noun (2,0%), selon les statistiques du HCP.
Ces marchés traditionnels sont majoritairement implantés en milieu rural. Environ 71% d'entre eux se situent dans des zones rurales, avec une concentration particulière dans la région de Marrakech-Safi qui totalise 169 marchés, soit 16,5% de l'ensemble national. La région de Souss-Massa arrive en deuxième position avec 138 marchés, représentant 13,5% du total.
L'analyse de l'état des équipements révèle des lacunes importantes en matière d'infrastructures. Selon le HCP, parmi ces 1.022 souks, seuls 66,6% disposent de murs de clôture, 57,4% sont équipés d'un abattoir et 56% bénéficient d'un raccordement au réseau électrique. La situation est encore plus préoccupante concernant l'accès à l'eau potable (53,2%), les voies d'accès adéquates (52,1%), et les aires de stationnement (29,8%). Le taux le plus alarmant concerne l'assainissement liquide, avec seulement 15,7% des souks raccordés à un réseau d'évacuation. Ces chiffres mettent en lumière les défis considérables auxquels font face ces espaces commerciaux traditionnels, alors même qu'ils jouent un rôle économique et social essentiel pour les populations rurales.
Ces marchés traditionnels sont majoritairement implantés en milieu rural. Environ 71% d'entre eux se situent dans des zones rurales, avec une concentration particulière dans la région de Marrakech-Safi qui totalise 169 marchés, soit 16,5% de l'ensemble national. La région de Souss-Massa arrive en deuxième position avec 138 marchés, représentant 13,5% du total.
L'analyse de l'état des équipements révèle des lacunes importantes en matière d'infrastructures. Selon le HCP, parmi ces 1.022 souks, seuls 66,6% disposent de murs de clôture, 57,4% sont équipés d'un abattoir et 56% bénéficient d'un raccordement au réseau électrique. La situation est encore plus préoccupante concernant l'accès à l'eau potable (53,2%), les voies d'accès adéquates (52,1%), et les aires de stationnement (29,8%). Le taux le plus alarmant concerne l'assainissement liquide, avec seulement 15,7% des souks raccordés à un réseau d'évacuation. Ces chiffres mettent en lumière les défis considérables auxquels font face ces espaces commerciaux traditionnels, alors même qu'ils jouent un rôle économique et social essentiel pour les populations rurales.
L'importance historique des souks et l'appel du CESE à leur modernisation
Les souks hebdomadaires au Maroc ne sont pas de simples espaces commerciaux, mais de véritables institutions socio-culturelles enracinées dans l'histoire du pays. Comme le souligne le Conseil économique, social et environnemental (CESE) dans son avis intitulé «Pour une politique de rénovation et de développement des souks hebdomadaires en milieu rural», ces espaces constituent «une plateforme commerciale, socio-économique et culturelle importante mais insuffisamment exploitée». Un avis exprimé dans le cadre d’une auto-saisine décidée lors de la 113e session ordinaire du CESE tenue le 27 aout 2020.
Selon le CESE, les souks hebdomadaires représentent un «service public de proximité et une composante essentielle du développement du milieu rural». Ils jouent un rôle de «baromètre de la vie rurale et du bien-être des populations rurales» et constituent «un élément essentiel de l'organisation de l'espace rural et un véritable patrimoine local, régional et national».
Dans son rapport, le CESE appelle les pouvoirs publics à «accorder aux souks hebdomadaires ruraux toute l'attention et l'intérêt qu'ils méritent et à entreprendre des actions stratégiques et opérationnelles en faveur de ce lieu de vie important». Le Conseil ambitionne notamment que les souks deviennent «un levier de développement, d'intégration des politiques publiques nationales et territoriales et de gestion participative et concertée». Le CESE recommande l'élaboration d'une vision ambitieuse incluant des mécanismes de mise à niveau et de modernisation, tout en respectant les spécificités culturelles et territoriales de chaque région.
Selon le CESE, les souks hebdomadaires représentent un «service public de proximité et une composante essentielle du développement du milieu rural». Ils jouent un rôle de «baromètre de la vie rurale et du bien-être des populations rurales» et constituent «un élément essentiel de l'organisation de l'espace rural et un véritable patrimoine local, régional et national».
Dans son rapport, le CESE appelle les pouvoirs publics à «accorder aux souks hebdomadaires ruraux toute l'attention et l'intérêt qu'ils méritent et à entreprendre des actions stratégiques et opérationnelles en faveur de ce lieu de vie important». Le Conseil ambitionne notamment que les souks deviennent «un levier de développement, d'intégration des politiques publiques nationales et territoriales et de gestion participative et concertée». Le CESE recommande l'élaboration d'une vision ambitieuse incluant des mécanismes de mise à niveau et de modernisation, tout en respectant les spécificités culturelles et territoriales de chaque région.
