Au regard des chiffres publiés par le HCP, le Maroc compte 148.152 résidents étrangers en 2024, contre 84.001 en 2014, soit une hausse de 76,4 % en dix ans. Ils représentent désormais 0,4 % d’une population totale estimée à 36,8 millions d’habitants. La recomposition des nationalités est marquée par la montée en puissance des ressortissants d’Afrique subsaharienne qui représentent désormais près de 60 % de l’ensemble des étrangers, alors qu’ils n’étaient que 26,8 % en 2014. Les Européens poursuivent leur déclin relatif pour ne constituer plus que 20,3 %, contre 40 % dix ans plus tôt. Le Sénégal occupe la première place avec 18,4 % des résidents étrangers, suivi de la Côte d’Ivoire avec 17,3 % et de la France avec 13,8 %, trois nationalités qui rassemblent à elles seules près de la moitié du total.
Les motivations migratoires confirment ce basculement avec le travail qui demeure le premier levier d’installation pour 53,3 % des migrants, attirés par les opportunités offertes dans le bâtiment, les services, l’agriculture et le tissu informel. Le regroupement familial représente 20,8 % des motifs et les études 14 %, dans un contexte où les universités marocaines gagnent en visibilité internationale. Les migrations forcées restent limitées, avec seulement 2,5 % liées aux conflits ou aux situations d’insécurité.
La dimension territoriale met en lumière le rôle central des grandes métropoles, où près de 95 % des étrangers choisissent de s’installer en milieu urbain. Casablanca-Settat concentre 43,3 % des résidents étrangers, contre 35,1 % en 2014. Rabat-Salé-Kénitra suit avec 19,2 %, malgré un recul par rapport aux 29 % enregistrés lors du précédent recensement. Marrakech-Safi progresse de 4,5 % à 9,2 %, tout comme Souss-Massa qui passe de 3 % à 9,4 %. La région de l’Oriental connaît une nette diminution à 1,9 %, tandis que Dakhla-Oued Eddahab confirme son attractivité croissante avec 4,2 %, contre 2,2 % dix ans auparavant.
Le profil démographique révèle une population majoritairement jeune, puisqu’entre 15 et 64 ans se situent 80,1 % des étrangers, contre 13,9 % pour les moins de 15 ans et 6 % pour les 65 ans et plus. La répartition par genre indique 56 % d’hommes et 44 % de femmes, avec une prédominance féminine pour certaines nationalités comme les Philippines ou la Côte d’Ivoire. L’état matrimonial se répartit entre 49,4 % de célibataires, 45,5 % de personnes mariées, 2,8 % de divorcés et 1,5 % de veufs. Le niveau de formation se distingue par une forte proportion de diplômés du supérieur, soit 38,9 %, et 28,2 % de personnes ayant atteint le secondaire.
L’intégration économique s’exprime à travers un taux d’actifs occupés de 53,8 %. Les élèves et étudiants représentent 17,5 % et les chômeurs 4,6 %. Parmi les actifs, 65,8 % travaillent dans le secteur privé, 7,9 % comme indépendants ambulants, 4,9 % comme indépendants disposant d’un local, 3,6 % comme travailleurs à domicile et 5,8 % comme employeurs.
Les données relatives aux ménages témoignent d’une installation diversifiée, puisque sur les 71.761 foyers comptant au moins un résident étranger, 69,3 % sont des ménages mixtes réunissant Marocains et étrangers tandis que 30,7 % sont composés exclusivement d’étrangers. Les conditions d’habitation confirment une forte urbanité, avec 57,9 % des étrangers installés dans des appartements, 24,6 % dans des maisons modernes et 13 % dans des villas. Au total, 62,3 % des ménages sont locataires contre 32,3 % de propriétaires.
Selon le HCP, cette configuration confirme que le Maroc s’affirme désormais comme un espace migratoire structuré, où l’installation de populations jeunes, actives et diversifiées redessine progressivement les équilibres démographiques du pays. L’essor des flux subsahariens, la centralité des grandes métropoles et la montée des ménages mixtes annoncent l’émergence d’une nouvelle géographie humaine. Le défi, souligne l’institution, résidera dans la capacité à accompagner cette dynamique par des politiques d’intégration et d’aménagement à la hauteur, afin de transformer cette progression continue en moteur de cohésion, de développement et d’ouverture.
