Alors que la relation entre les élèves et leurs enseignants devrait incarner un modèle de respect mutuel, de collaboration et de renforcements positifs, elle est malheureusement de plus en plus ternie par des actes de violence qui défient ces attentes et normes fondamentales. En effet, derrière les portes closes des salles de classe, plusieurs enseignants font face à des moqueries, des insultes, des menaces, voire des agressions physiques, transformant leur vocation en un parcours semé d’embûches. «Les enseignants sont souvent victimes de violence verbale. Il arrive souvent que l’élève offense son enseignant directement et l’insulte en classe parce qu’il est contrarié. L’enseignant peut aussi entendre des propos injurieux alors qu’il tourne le dos ou écrit au tableau. Il peut aussi être victime d’agression physique», confie Issam Boukria, enseignant et membre de la Coordination régionale de Fès des enseignants de secondaire qualifiant. «Parfois, certains élèves attendent leurs enseignants, en dehors des établissements scolaires, accompagnés de leurs amis, pour les insulter, les menacer voire les agresser physiquement. Ces agressions peuvent inclure des coups à main nue, des jets de pierres, ou encore l’utilisation d’arme blanche», affirme notre interlocuteur.
Rien qu’en 2024, plusieurs cas de violence physique contre les enseignants ont été médiatisés dans différentes villes, ne représentant que la partie visible de l’iceberg. En février dernier, un lycéen dans la province de Fahs-Anjra avait gravement blessé son enseignant, le contraignant à se rendre aux urgences pour recevoir des soins médicaux. Un autre professeur à Casablanca a été conduit aux urgences le mois dernier après avoir été agressé par un de ses élèves. De même, le cas de la mère d’un lycéen qui a violemment attaqué une enseignante sous les yeux de tous les élèves et du personnel d’un établissement scolaire à Taza avait également suscité une vive réaction médiatique en mars dernier...
Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSFRS) a souligné dans son rapport sur les violences scolaires, publié en 2023, que la catégorie de violence à l’égard des enseignants est considérée comme la limite la plus importante de la violence scolaire, dans la mesure où elle peut miner la relation élève-enseignant et toucher aux conditions d’exercice et à l’autorité du personnel éducatif. Selon le rapport, cette forme de violence place l’enseignant en situation extrêmement compliquée, car son rôle consiste à maîtriser, à la fois, la classe et la situation. De son côté, le ministère de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports, estime que les cas de violence envers les enseignants restent très limités dans le temps et dans l’espace. «L’instance nationale d’évaluation relevant du Conseil national de l’éducation de la formation a mené une dernière enquête quantitative réalisée à la fin du premier trimestre de l’année scolaire 2021-2022, auprès de 260 établissements représentatifs à l’échelle nationale, avec la participation de 13.884 élèves représentant les trois cycles de l’enseignement (primaire, secondaire collégial et qualifiant), ainsi qu’une enquête qualitative menée dans 27 établissements. Les deux enquêtes ont conclu que la majorité absolue des cas de violence signalés sont exercés par les élèves contre les élèves. Tandis que la violence exercée sur les cadres pédagogiques représente un très faible pourcentage. Ce faible pourcentage n’exclut pas la volonté et l’engagement du ministère de maximiser les efforts pour éradiquer la violence exercée sur les cadres administratifs et pédagogiques», déclare au journal «Le Matin» Abderrahim Ayadi, directeur de la vie scolaire au ministère de l’Éducation nationale.
• Le renforcement du cadre normatif, à travers la publication de plusieurs notes et textes juridiques, la dernière en question est la note 146.24 du 1er avril 2024 concernant la lutte contre la violence en milieu scolaire.
• L’ancrage des valeurs de citoyenneté, de démocratie, de civisme et de vivre ensemble via le curriculum qui, à travers ses contenus et ses méthodes d’enseignement, véhicule différentes valeurs tolérantes nationales. Les activités de la vie scolaire renforcent également ces valeurs et permettent aux apprenants et apprenantes d’acquérir les différentes compétences, stratégiques, méthodologiques, culturelles, communicatives, technologiques et autres. Elle développe également leurs compétences de vie et stimule leurs créativité et excellence. On note actuellement plus de 33.000 clubs éducatifs qui offrent des activités variées pour les élèves dans ce sens.
• La prévention contre la violence en milieu scolaire et la prise en charge des cas enregistrés, à travers le renforcement des mécanismes de détection et de signalement au niveau des établissements scolaires et à travers la coordination avec les autorités locales, notamment les services du ministère de la Santé, la Sûreté nationale et la Gendarmerie Royale.
• Le renforcement du rôle des structures de lutte contre la violence en milieu scolaire, notamment les cellules d’écoute au niveau des établissements scolaires et qui ont un rôle d’écoute, d’orientation et d’accompagnement psychologique des élèves. On compte actuellement plus de 8.000 cellules d’écoute. Ces cellules seront dotées de cadres spécialisés en sociologie pour améliorer leurs interventions.
Rien qu’en 2024, plusieurs cas de violence physique contre les enseignants ont été médiatisés dans différentes villes, ne représentant que la partie visible de l’iceberg. En février dernier, un lycéen dans la province de Fahs-Anjra avait gravement blessé son enseignant, le contraignant à se rendre aux urgences pour recevoir des soins médicaux. Un autre professeur à Casablanca a été conduit aux urgences le mois dernier après avoir été agressé par un de ses élèves. De même, le cas de la mère d’un lycéen qui a violemment attaqué une enseignante sous les yeux de tous les élèves et du personnel d’un établissement scolaire à Taza avait également suscité une vive réaction médiatique en mars dernier...
Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSFRS) a souligné dans son rapport sur les violences scolaires, publié en 2023, que la catégorie de violence à l’égard des enseignants est considérée comme la limite la plus importante de la violence scolaire, dans la mesure où elle peut miner la relation élève-enseignant et toucher aux conditions d’exercice et à l’autorité du personnel éducatif. Selon le rapport, cette forme de violence place l’enseignant en situation extrêmement compliquée, car son rôle consiste à maîtriser, à la fois, la classe et la situation. De son côté, le ministère de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports, estime que les cas de violence envers les enseignants restent très limités dans le temps et dans l’espace. «L’instance nationale d’évaluation relevant du Conseil national de l’éducation de la formation a mené une dernière enquête quantitative réalisée à la fin du premier trimestre de l’année scolaire 2021-2022, auprès de 260 établissements représentatifs à l’échelle nationale, avec la participation de 13.884 élèves représentant les trois cycles de l’enseignement (primaire, secondaire collégial et qualifiant), ainsi qu’une enquête qualitative menée dans 27 établissements. Les deux enquêtes ont conclu que la majorité absolue des cas de violence signalés sont exercés par les élèves contre les élèves. Tandis que la violence exercée sur les cadres pédagogiques représente un très faible pourcentage. Ce faible pourcentage n’exclut pas la volonté et l’engagement du ministère de maximiser les efforts pour éradiquer la violence exercée sur les cadres administratifs et pédagogiques», déclare au journal «Le Matin» Abderrahim Ayadi, directeur de la vie scolaire au ministère de l’Éducation nationale.
Des sanctions pas assez sévères
Le responsable nous précise que le ministère préconise la mise en place de plans et de procédures préventives correctives et curatives pour lutter contre la violence en milieu scolaire et pour assurer le vivre ensemble et la cohésion sociale entre les différents acteurs de l’école. En ce sens, il veille à garantir la sécurité des cadres administratifs et pédagogiques pour accomplir dignement leurs fonctions. Cependant, quand un cas de violence exercé sur un professeur est signalé et que toute intervention à travers une solution alternative notamment la médiation est vaine, l’établissement scolaire se fait partie civile pour représenter juridiquement l’enseignant sujet de violence. «L’élève auteur d’acte de violence est alors sanctionné selon les conclusions des conseils de discipline et des lois en vigueur tout en prenant en considération l’intérêt supérieur de l’enfant et la dignité du professeur sujet d’acte de violence», indique Ayadi. Cependant, les enseignants jugent que les sanctions infligées aux élèves impliqués dans des actes de violence ne sont pas assez rigoureuses pour les dissuader d’avoir de tels comportements. «Même si l’élève passe devant un conseil de discipline, nous estimons que les sanctions prévues par les circulaires ministérielles ne sont pas assez sévères pour punir les actes parfois très violents. Cette situation incite ces élèves à récidiver et encourage d’autres à agir de la même manière. Même lorsqu’un enseignant est agressé avec une arme et que la police intervient, il est souvent contraint de pardonner à l’élève devant la justice pour ne pas détruire son avenir», souligne Issam Boukria. «Malheureusement, cette situation a des répercussions sur la santé mentale et le bien-être de l’enseignant et par conséquent sur sa capacité à accomplir sa mission d’enseigner. Cela nuit profondément à la relation enseignant-élève. Lorsqu’ils sont attaqués violemment, ils n’arrivent plus à voir les élèves comme leurs enfants, mais plutôt comme des ennemis qu’ils veulent à tout prix éviter, d’autant que les enseignants victimes d’agressions ne bénéficient pas d’un suivi psychologique après l’incident», insiste l’enseignant. Afin de prévenir les cas de violences envers les enseignants, ce dernier appelle le ministère à prendre certaines mesures susceptibles de dissuader les élèves d’avoir recours à la violence. «La violence scolaire est un phénomène international qui ne concerne pas uniquement le Maroc. L’éradiquer serait compliqué, mais il existe des solutions pour le prévenir. On pourrait envisager de renforcer la sécurité dans les établissements scolaires en employant davantage d’agents de sécurité et en organisant plus de patrouilles régulières des forces de l’ordre autour des écoles, en particulier dans les quartiers où la violence est prédominante», recommande Issam Boukria.Un dispositif pour lutter contre les violences scolaires
Afin de garantir un suivi et une évaluation des cas de violence signalée dans le milieu scolaire et pour créer un climat scolaire favorable à l’enseignement et à l’apprentissage, le ministère de l’Éducation nationale a mis en place un dispositif intégré composé de trois principaux éléments. «Il s’agit des cellules d’écoute et de médiation, implantées dans les établissements scolaires. Ces cellules d’écoute constituent un mécanisme de sensibilisation et de prise en charge pour écouter les acteurs scolaires cibles de violence et mesurer les activités de suivi et d’évaluations des cas traités. Il y a aussi les centres de lutte contre la violence en milieu scolaire au niveau régional et provincial. Ce sont des structures composées par différents départements ministériels concernés et partenaires pour traiter la stratégie et les plans d’interventions préventive et curative», souligne Boukria. Et d’ajouter que «le ministère a également mis en place le portail Marsad, qui est une plateforme dédiée au suivi des cas de violence signalés au sein des établissements scolaires et qui sont communiqués par voie d’accès limité aux responsables aux niveaux provincial, académique et central». Bien que ces mesures puissent contribuer positivement à la prévention de la violence scolaire, il reste nécessaire de fournir un effort supplémentaire en matière de communication. Selon le dernier rapport du CSFRS, 75,9% du personnel enseignant enquêtés ne connaissent pas le dispositif Marsad et la grande majorité des directeurs d’établissements interrogés n’ont pas eu recours à ce mécanisme pour signaler les cas de violence.La sensibilisation des parents est fondamentale
Pour sa part, la Fédération nationale de l’Association des parents d’élèves au Maroc (FNAPEM) insiste sur l’importance de sensibiliser tous les acteurs concernés, à leur tête les parents d’élèves, pour faire face à ce fléau. «Le milieu scolaire doit être un lieu de tolérance, de coopération qui rejette la violence sous toutes ses formes, et toutes les parties doivent y contribuer. Nous appelons les familles à jouer leur rôle dans l’éducation de leurs enfants. Il est nécessaire d’accroître les interactions et les réunions entre les enseignants, les parents et les membres de l’administration, ainsi que de multiplier les activités sportives et artistiques et animations scolaires afin de favoriser un environnement propice à l’éducation», déclare au journal «Le Matin» Ali Fannach, vice-président de la FNAPEM.Une action synergique pour mieux lutter contre la violence dans les écoles
Lutter contre la violence en milieu scolaire est sous le lead et la responsabilité première du ministère de l’Éducation nationale. Cependant, le ministère s’ouvre sur différents départements et instances partenaires pour une intervention synergique coordonnée en vue de contrecarrer toute manœuvre ou acte pouvant nuire à l’image de l’établissement scolaire. Dans ce cadre les centres régionaux et provinciaux de prévention et lutte contre la violence en milieu scolaire comptent parmi leurs membres des représentants de différents départements, notamment les collectivités territoriales, la DGSN, la Gendarmerie Royale, le ministère public, le ministère de la Justice... Cette coordination multi-départementale assure la visibilité, l’efficacité et la pertinence des plans d’intervention, notamment au niveau local. Par ailleurs, le département de l’Éducation nationale a signé différents partenariats avec maints acteurs, notamment avec la DGSN, dans le but d’une part d’assurer et sécuriser l’environnement immédiat de l’établissement, à travers des patrouilles régulières, d’autre part de permettre aux cadres de la DGSN de donner des séances de sensibilisation et de formation au sein des établissements scolaires. Le ministère reçoit régulièrement des données statistiques de la DGSN sur la répartition des cas de violences dans le milieu scolaire, qui sont exploités pour mettre en œuvre les interventions et les stratégies de prévention contre tous les comportements à risques dont la violence.Comment le ministère agit-il contre la violence en milieu scolaire ?
Pour prévenir et traiter la violence en milieu scolaire, notamment celle à l’égard des enseignants, le ministère a adopté une approche holistique à plusieurs entrées :• Le renforcement du cadre normatif, à travers la publication de plusieurs notes et textes juridiques, la dernière en question est la note 146.24 du 1er avril 2024 concernant la lutte contre la violence en milieu scolaire.
• L’ancrage des valeurs de citoyenneté, de démocratie, de civisme et de vivre ensemble via le curriculum qui, à travers ses contenus et ses méthodes d’enseignement, véhicule différentes valeurs tolérantes nationales. Les activités de la vie scolaire renforcent également ces valeurs et permettent aux apprenants et apprenantes d’acquérir les différentes compétences, stratégiques, méthodologiques, culturelles, communicatives, technologiques et autres. Elle développe également leurs compétences de vie et stimule leurs créativité et excellence. On note actuellement plus de 33.000 clubs éducatifs qui offrent des activités variées pour les élèves dans ce sens.
• La prévention contre la violence en milieu scolaire et la prise en charge des cas enregistrés, à travers le renforcement des mécanismes de détection et de signalement au niveau des établissements scolaires et à travers la coordination avec les autorités locales, notamment les services du ministère de la Santé, la Sûreté nationale et la Gendarmerie Royale.
• Le renforcement du rôle des structures de lutte contre la violence en milieu scolaire, notamment les cellules d’écoute au niveau des établissements scolaires et qui ont un rôle d’écoute, d’orientation et d’accompagnement psychologique des élèves. On compte actuellement plus de 8.000 cellules d’écoute. Ces cellules seront dotées de cadres spécialisés en sociologie pour améliorer leurs interventions.