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«Le premier été» : Roman nostalgie

«Le premier été» est le premier roman de l’auteure marocaine Noor Ikken. Paru aux éditions Maha, l’ouvrage nous renvoie dans un été typique des années 1980, où l’amour est dans l’air et le destin dans le vague. Avec humour et sensibilité, l’auteure démêle les destins enchevêtrés d’une famille marocaine, pour jeter la lumière sur une époque.

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Vous souvenez-vous de cet été ? C’est la question qui viendrait à l’esprit de tous ceux qui ont connu la douceur et la nonchalance des années 1980 à la lecture de ce roman. Ou peut-être n’est-ce que la nostalgie d’adultes sur le point d’être dépassés par la marche, pressée et irrémédiable, du monde ? Et pour cause. «Le premier été» nous propulse dans un temps que les moins de vingt ans ne peuvent même pas imaginer ! Une époque sans téléphones, sans connexion, sans décharges instantanées de dopamine et avec pour seul réseau social, celui qu’on tisse lors d’un bain de soleil ou d’un match de foot.



Dans son premier roman, Noor Ikken nous décrit les réunions de famille, les premières amours et les premières transgressions, les non-dits et les secrets de polichinelle, les douleurs qui se mêlent aux petites joies. Le tout dans un style léger et un ton amusant qui plaît à la lecture. L’histoire, somme toute banale, explore toute la richesse et les contradictions d’une époque.

Années bénies ?

Il serait injuste de décrire les années 1980 comme une période idyllique et même quelque peu passéiste. Les vacances d’été, en particulier, pouvaient être d’un ennui mortel et les réunions de famille de vraies punitions, plombées par les vieilles rancœurs et les guerres de clans. Mais ce n’est pas le cas de la famille que nous décrit Noor Ikken. Ici, on est en bord de mer, dans une maison spacieuse et confortable, entourée d’un jardin fleuri et ombragé. La famille est aisée, nombreuse et, surtout, complice.

Et si les jours peuvent se ressembler, le roman est sauvé de la redondance par une riche galerie de personnages attachants et parfois loufoques. Il y a évidemment les adolescents qui se découvrent et se réveillent aux premiers émois amoureux, leurs cœurs battant au rythme des vagues et des nuits étoilées. Mais il y a également les adultes traînant parfois des destins tragiques qui semblent, pourtant, moins pénibles au soleil.

À la joie de Tanya, de Nora, de Kikos et de Dino, s’oppose la peine de Rama, de Soane et de Shayna. «Le premier été» nous fait voyager dans les vécus des uns et des autres, juste assez pour satisfaire notre voyeurisme, sans nous encombrer de détails ou nous engager dans des liens contraignants avec les différents personnages : des amours d’été en somme...

Les mœurs d’antan

Si l’humour est pleinement présent et intentionnel dans cet ouvrage, les problématiques sociétales qui y sont dépeintes sont tout aussi assumées. À travers les courts récits de vie de chacun des personnages, nous découvrons les drames à peine voilés des uns et des autres, mais aussi leurs hontes bues ou non, au gré des conventions. Viol pour Rama, violence et sorcellerie pour Soane, concubinage assumé pour Shayna : il y avait de quoi alimenter les soirées de ragots, à l’époque d’avant internet. Sans porter de jugement, Noor Ikken met l’accent sur la résilience de ces différents adultes qui pansent leurs blessures, à quelques mètres de ces jeunes gens, à qui la vie promet l’amour et le bonheur, sans rien avouer de la peine et des épreuves. «Le premier été» dresse un tableau riche en contradictions sociales, qui ne semblait pas sauter aux yeux comme c’est le cas aujourd’hui. Pourtant, la comparaison avec le Maroc actuel se fait à notre insu et le constat s’impose que la modernité et le conservatisme se tiennent toujours la main, sans se soucier de leur dualité ou de leur contradiction. Rien ne change sous le soleil...
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