À l’occasion du 70e anniversaire de la parution à Paris de «Les Boucs» (1955), premier roman marocain à traiter l’immigration, le Salon international de l’édition et du livre 2025 (SIEL) a rendu le 22 avril un hommage fort et émouvant à l’écrivain Driss Chraïbi (1926-2007). Cette commémoration s’inscrit également dans la préparation du centenaire de sa naissance, qui sera célébré en 2026 par une série d’événements littéraires et culturels à la hauteur de l’héritage qu’il a laissé.
Organisée dans l’espace dédié aux Marocain(e)s du monde, cette rencontre a réuni proches, amis, passionnés et lecteurs fidèles de l’écrivain. Une lecture croisée de Les Boucs par les romanciers Zineb Mekouar et Mustapha Kebir Ammi a permis de redonner toute sa résonance à ce texte fondateur qui dépeint avec force et lucidité les conditions de vie des immigrés maghrébins en France. Publié en 1955, ce roman a marqué un tournant décisif dans la littérature maghrébine d’expression française et demeure l’un des ouvrages les plus marquants de l’œuvre de Driss Chraïbi.
Les échanges ont révélé des aspects plus intimes de l’auteur. L’écrivain ne gardait jamais ses manuscrits. Un choix étonnant, voire déroutant, qui témoigne de son détachement matériel et de sa confiance absolue dans l’acte d’écrire comme une urgence plutôt qu’un monument à bâtir.
Son épouse, Sheena Chraïbi, a partagé plusieurs anecdotes touchantes, évoquant un homme à la fois humble, rigoureux et profondément en décalage avec les pratiques modernes. «Driss s’est opposé aux nouvelles technologies. La télévision a fait une entrée tardive chez nous», a-t-elle confié, soulignant sa préférence pour le silence et la lecture. Les participants ont aussi rappelé ses débuts difficiles en France, lorsqu’il avait décidé d’y rester après ses études. Vivre dans la nécessité, sans attaches ni sécurité, a profondément marqué sa sensibilité et nourri ses thématiques. L’évocation de ses habitudes a permis de brosser le portrait d’un homme animé par une quête intérieure continue.
Pour l’universitaire Kacem Basfao, Driss Chraïbi est un «propulseur» : un écrivain qui a ouvert la voie à toute une littérature de l’exil, de la migration et de l’aliénation. Son œuvre, habitée par la mémoire, la contestation et la réinvention de soi, résonne toujours aujourd’hui avec une rare intensité. Au sein du SIEL, une belle exposition retrace
Driss El Yazami a rappelé que l’année 2026 marquera le centenaire de la naissance de l’auteur, né le 15 juillet 1926 à El Jadida et grandit à Casablanca. Ce centenaire visera à revisiter l’ensemble de l’œuvre Chraïbi, à exhumer ses archives, à organiser des colloques, des lectures, ainsi qu’à mettre en lumière son apport dans les débats sur l’identité, la modernité, l’exil et la mémoire collective.
Chimiste de formation devenu écrivain et journaliste par passion, Driss Chraïbi a reçu plusieurs distinctions, dont le Prix de l’amitié franco-arabe en 1981. Il s’est éteint en avril 2007 à Drôme, dans le sud-est de la France. En célébrant Les Boucs aujourd’hui, et en préparant le centenaire de sa naissance, c’est tout un pan de la mémoire littéraire marocaine qui est réactivé, et avec lui, une invitation à relire l’œuvre d’un écrivain qui n’a cessé de questionner son époque, les siens, et lui-même.
Une scénographie inventive mêle archives manuscrites, photographies rares, objets personnels et installations interactives. Elle permet d’entrer dans l’intimité du créateur et de découvrir l’homme derrière l’écrivain. Des vidéos projetées en continu restituent l’atmosphère de travail de Chraïbi et invitent à ressentir l’intensité de sa démarche artistique.
“Les Boucs” est également emblématique de la contribution culturelle des Marocains du monde. Si ce roman a fait l’objet d’une reconnaissance croissante au fil des années, il aura fallu attendre 2021 pour qu'il soit enfin traduit en arabe. Cette situation met en lumière l'importance de l'initiative lancée cette année par le ministère de la Culture, visant à traduire les œuvres des Marocains du monde vers l'arabe, afin de préserver et de promouvoir cet héritage littéraire d’une grande richesse.»
Organisée dans l’espace dédié aux Marocain(e)s du monde, cette rencontre a réuni proches, amis, passionnés et lecteurs fidèles de l’écrivain. Une lecture croisée de Les Boucs par les romanciers Zineb Mekouar et Mustapha Kebir Ammi a permis de redonner toute sa résonance à ce texte fondateur qui dépeint avec force et lucidité les conditions de vie des immigrés maghrébins en France. Publié en 1955, ce roman a marqué un tournant décisif dans la littérature maghrébine d’expression française et demeure l’un des ouvrages les plus marquants de l’œuvre de Driss Chraïbi.
Les échanges ont révélé des aspects plus intimes de l’auteur. L’écrivain ne gardait jamais ses manuscrits. Un choix étonnant, voire déroutant, qui témoigne de son détachement matériel et de sa confiance absolue dans l’acte d’écrire comme une urgence plutôt qu’un monument à bâtir.
Son épouse, Sheena Chraïbi, a partagé plusieurs anecdotes touchantes, évoquant un homme à la fois humble, rigoureux et profondément en décalage avec les pratiques modernes. «Driss s’est opposé aux nouvelles technologies. La télévision a fait une entrée tardive chez nous», a-t-elle confié, soulignant sa préférence pour le silence et la lecture. Les participants ont aussi rappelé ses débuts difficiles en France, lorsqu’il avait décidé d’y rester après ses études. Vivre dans la nécessité, sans attaches ni sécurité, a profondément marqué sa sensibilité et nourri ses thématiques. L’évocation de ses habitudes a permis de brosser le portrait d’un homme animé par une quête intérieure continue.
Pour l’universitaire Kacem Basfao, Driss Chraïbi est un «propulseur» : un écrivain qui a ouvert la voie à toute une littérature de l’exil, de la migration et de l’aliénation. Son œuvre, habitée par la mémoire, la contestation et la réinvention de soi, résonne toujours aujourd’hui avec une rare intensité. Au sein du SIEL, une belle exposition retrace
Driss El Yazami a rappelé que l’année 2026 marquera le centenaire de la naissance de l’auteur, né le 15 juillet 1926 à El Jadida et grandit à Casablanca. Ce centenaire visera à revisiter l’ensemble de l’œuvre Chraïbi, à exhumer ses archives, à organiser des colloques, des lectures, ainsi qu’à mettre en lumière son apport dans les débats sur l’identité, la modernité, l’exil et la mémoire collective.
Chimiste de formation devenu écrivain et journaliste par passion, Driss Chraïbi a reçu plusieurs distinctions, dont le Prix de l’amitié franco-arabe en 1981. Il s’est éteint en avril 2007 à Drôme, dans le sud-est de la France. En célébrant Les Boucs aujourd’hui, et en préparant le centenaire de sa naissance, c’est tout un pan de la mémoire littéraire marocaine qui est réactivé, et avec lui, une invitation à relire l’œuvre d’un écrivain qui n’a cessé de questionner son époque, les siens, et lui-même.
Espace Driss Chraïbi
L’espace hommage à Driss Chraïbi offre aux visiteurs une plongée profonde dans l’univers singulier de l’auteur, salué pour avoir transformé durablement le paysage littéraire maghrébin. Conçue comme une traversée immersive de son œuvre et de son héritage, l’exposition, visible jusqu’au 27 avril au SIEL, met en lumière les multiples dimensions d’un écrivain inclassable. De ses romans traduits en plusieurs langues à ses archives personnelles, en passant par une partie moins connue de son parcours – son travail de producteur radiophonique –, c’est toute la richesse de sa trajectoire qui est dévoilée. Près de 2.000 heures de programmes audio originaux y sont présentées, témoignant de l’ingéniosité avec laquelle il a su adapter les grandes figures de la littérature mondiale au format radiophonique.Une scénographie inventive mêle archives manuscrites, photographies rares, objets personnels et installations interactives. Elle permet d’entrer dans l’intimité du créateur et de découvrir l’homme derrière l’écrivain. Des vidéos projetées en continu restituent l’atmosphère de travail de Chraïbi et invitent à ressentir l’intensité de sa démarche artistique.
Témoignage de Driss El Yazami, président du Conseil de la Communauté marocaine à l’étranger
«Driss Chraïbi est l'un des premiers grands romanciers à avoir abordé la question de l’immigration, et “Les Boucs” (1955) demeure, à mon sens, l'un des plus grands romans écrits en français sur ce sujet. Ce roman, publié il y a soixante-dix ans, se distingue par son traitement sans concession de la condition des immigrés maghrébins en France. Il est d'autant plus significatif lorsqu'on le replace dans le contexte de l'époque : les années 1950 à Paris, en pleine guerre d’Algérie, période où le racisme anti-maghrébin est particulièrement virulent et où la communauté maghrébine vit sous un contrôle social et politique strict.“Les Boucs” est également emblématique de la contribution culturelle des Marocains du monde. Si ce roman a fait l’objet d’une reconnaissance croissante au fil des années, il aura fallu attendre 2021 pour qu'il soit enfin traduit en arabe. Cette situation met en lumière l'importance de l'initiative lancée cette année par le ministère de la Culture, visant à traduire les œuvres des Marocains du monde vers l'arabe, afin de préserver et de promouvoir cet héritage littéraire d’une grande richesse.»