Le Maroc appelle à une forte mobilisation de l’Afrique pour la création d’un Fonds bleu pour les océans. Les missions de ce Fonds devraient être orientées non seulement vers la préservation de l’intégrité écologique des océans, mais aussi vers la transformation du secteur halieutique du continent en un écosystème «durable» et une «véritable» locomotive de l’économie, capable de nourrir l’Afrique et créer des emplois durables.
La recommandation pour la création de ce dispositif a été formulée par le ministre de l'Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, Mohammed Sadiki, lors de l’ouverture de la Semaine des océans, le 8 octobre à Tanger. Un évènement qui connaît la participation de 32 pays, dont 16 délégations conduites par les ministres en charge de la pêche et de l’économie bleue (EB). Devant un parterre de ministres, d’experts et de scientifiques, Sadiki a appelé les pays de l’Afrique à saisir pleinement les opportunités offertes par le continent en matière de «Blue food and jobs». «Nous devons intensifier nos efforts en matière de recherche scientifique, de R&D, de développement de projets aquacoles et de gestion durable des pêches, en nous appuyant sur la plateforme collaborative de l’Initiative de la “Ceinture bleue”, ainsi que sur des mécanismes de financement innovants et d’envergure», suggère le ministre. Rappelons que depuis son lancement en 2016 lors de la COP 22 à Marrakech, l’Initiative de la «Ceinture bleue» a rallié plus de 32 États d’Afrique et d’autres continents. Pour le ministre, la volonté du Royaume de coopérer avec les pays du continent dans le cadre de l’initiative «Ceinture bleue», repose sur l’expérience «solide» acquise grâce au déploiement, depuis quinze ans, de la Stratégie nationale de développement du secteur halieutique «Halieutis», lancée en 2009, et qui, aujourd’hui, enclenche sa deuxième phase à l’horizon 2030.
La recommandation pour la création de ce dispositif a été formulée par le ministre de l'Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, Mohammed Sadiki, lors de l’ouverture de la Semaine des océans, le 8 octobre à Tanger. Un évènement qui connaît la participation de 32 pays, dont 16 délégations conduites par les ministres en charge de la pêche et de l’économie bleue (EB). Devant un parterre de ministres, d’experts et de scientifiques, Sadiki a appelé les pays de l’Afrique à saisir pleinement les opportunités offertes par le continent en matière de «Blue food and jobs». «Nous devons intensifier nos efforts en matière de recherche scientifique, de R&D, de développement de projets aquacoles et de gestion durable des pêches, en nous appuyant sur la plateforme collaborative de l’Initiative de la “Ceinture bleue”, ainsi que sur des mécanismes de financement innovants et d’envergure», suggère le ministre. Rappelons que depuis son lancement en 2016 lors de la COP 22 à Marrakech, l’Initiative de la «Ceinture bleue» a rallié plus de 32 États d’Afrique et d’autres continents. Pour le ministre, la volonté du Royaume de coopérer avec les pays du continent dans le cadre de l’initiative «Ceinture bleue», repose sur l’expérience «solide» acquise grâce au déploiement, depuis quinze ans, de la Stratégie nationale de développement du secteur halieutique «Halieutis», lancée en 2009, et qui, aujourd’hui, enclenche sa deuxième phase à l’horizon 2030.
Cette feuille de route affiche l’ambition de faire du secteur halieutique un véritable levier de développement économique et social durable. Fort de sa vocation halieutique historique le long de ses 3.500 km de côtes (atlantiques et méditerranéennes), le Royaume est un acteur majeur de la pêche en Afrique. Avec une production annuelle moyenne de plus de 1,5 million de tonnes, le secteur halieutique fait vivre près de 3 millions de personnes et contribue à hauteur de 40% des exportations agroalimentaires du pays. «Halieutis ne se limite pas à une course à la production. Elle privilégie la valorisation et la minimisation de l’impact environnemental. Elle s’articule autour de trois orientations structurantes, ambitieuses et complémentaires : durabilité, performance et compétitivité», souligne Sadiki. Pour lui, les résultats encourageants de la stratégie Halieutis confortent le Royaume dans sa conviction qu'un avenir bleu durable est possible. Ils soulignent également l'importance d'une coopération renforcée pour accélérer la mise en oeuvre des stratégies nationales des pays du continent, «car il y a un seul océan», conclut le ministre. Pour relever tous les défis qui se dressent face au développement des systèmes de production aquatiques et des emplois bleus, tenant compte du nécessaire équilibre entre une exploitation durable de nos océans et leur préservation, le Maroc suggère de consolider les initiatives existantes, explorer de nouveaux horizons en matière de coopération et, surtout, innover dans les approches de financement, domaine où l’Afrique doit impérativement renforcer ses capacités.
Omar Hilal : «L’intégration régionale et sous-régionale, la clé pour débrider l’EB»
S’il y a un message à dégager à l’issue de la séance d’ouverture de la Semaine des océans, ce serait certainement l’importance stratégique pour le continent de fédérer les engagements et les stratégies de ses pays pour enclencher une véritable révolution bleue. Aux yeux de Omar Hilal, par exemple, Représentant permanent du Royaume auprès des Nations Unies, qui intervenait lors de l’ouverture, l’optimisation de l’économie bleue jouera un rôle central dans la réalisation des Objectifs du développement durable (ODD) 2 (Zéro faim) et l’ODD 14 (Vie durable sous l’eau) et partant contribuera à la souveraineté alimentaire du continent. Pour lui, les ressources marines et côtières, notamment la pêche, l'aquaculture, et la transformation des produits de la mer, offrent une opportunité unique pour renforcer la sécurité alimentaire de l’Afrique. «Cette optimisation ne peut devenir une réalité sans l’inscrire dans le cadre d’une intégration régionale et sous-régionale et de développement durable endogène», soutient le diplomate. D’où, l’impératif, selon lui, de consolider une force d’action collective, axée sur la coopération Sud-Sud, capable de favoriser une «meilleure» exploitation des ressources halieutiques et le développement des potentialités africaines des meilleures techniques d’exploitation des richesses océaniques. Hilal estime, par ailleurs, qu'il est temps de passer de la conceptualisation de l’économie bleue à l’élaboration des plans d’action et la réalisation des mesures concrètes répondant aux besoins immédiats du développement des pays côtiers et autres. À ses yeux, l’initiative de la «Ceinture bleue» a tout le potentiel pour concrétiser cette approche dynamique et pro-active. Le diplomate juge également stratégique de mobiliser le secteur privé pour le financement des projets de l’alimentation bleue. «Le secteur privé devrait être encouragé à investir dans des projets structurants tels que les ports décarbonisés, les systèmes de réfrigération et les équipements de transformation du poisson. Ce qui permettra de transformer et renforcer les chaînes de valeurs et maximiser les bénéfices des ressources aquatiques, notamment en matière de sécurité alimentaire», développe Hilal. Le secteur privé étant parfois faible, voire embryonnaire, il serait approprié, selon lui, de le greffer dans un partenariat public-privé. Le responsable souligne, par ailleurs, que l’importance de l’économie bleue et son apport désormais reconnu dans l’économie mondiale plaident pour repenser et renforcer la gouvernance océanique. Objectif : Garantir une répartition juste et équitable des retombées économiques en faveur des populations côtières. «La troisième Conférence sur les océans prévue à Nice en 2025 sera une occasion idoine pour porter très haut cette revendication légitime pour une gouvernance internationale inclusive de l’économie bleue», insiste Hilal qui rejoint Sadiki à l’idée de créer un Fonds dédié à l’économie bleue. Pour lui, toute vision océanique devrait faire appel à des actions concrètes comprenant la création des fonds bleus à l’instar du fonds vert pour le climat créé par la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques. L’objectif étant de contribuer au financement de l’adaptation aux changements climatiques, investir dans la résilience des océans et financer des projets bleus nationaux et de coopération bilatérale et triangulaire. Hilal juge tout aussi primordial d’engager le secteur académique, les instituts de la Recherche et Développement (R&D) afin de galvaniser et développer le concept de la souveraineté alimentaire aquatique. Une coopération Sud-Sud ambitieuse dans ce domaine permettra, d’après lui, l’optimisation de l’exploitation des ressources aquatiques, la protection de la biodiversité marine et la pérennisation la pratique alimentaire aquatique. Sans oublier les atouts touristiques et culturels des mers et océans qui, selon le diplomate, ne doivent ni être occultés ni négligés. «Le tourisme côtier et maritime reste vital pour la prospérité économique des communautés insulaires et côtières, d’où le besoin d’intégrer l’aspect tourisme dans toute stratégie de l‘économie bleue. Une telle démarche sera de nature à renforcer le rapprochement des pays africains, à cimenter le voisinage des États, conforter la compréhension et la coexistence entre les peuples et consolider le dialogue des cultures», estime le responsable.
L’UA appelle à fusionner les initiatives liées à l'EB en Afrique
L’initiative de la «Ceinture bleue» ainsi que celles en cours par ailleurs sur le continent doivent, au regard de leurs spécificités respectives, fusionner en une démarche synergique et cohérente. Voilà ce que recommande Josefa Sacko, commissaire à l’Agriculture, au développement rural, à l’économie bleue et à l’environnement durable au sein de l’Union africaine (UA). La responsable au sein de l’UA rejoint ainsi le ministre marocain de l’Agriculture à l’idée de fédérer les initiatives en Afrique en vue de réunir les ingrédients d’une véritable révolution bleue du continent. Sako cite également l’initiative de la «Grande Muraille bleue», une approche «phare», «transformatrice» et «collective» encourageant la résilience et visant l’atténuation et l’adaptation aux effets du changement climatique, en plus de la Déclaration de Moroni qui reconnaît particulièrement les spécificités des États insulaires et la nécessité de leur intégration dans les politiques, stratégies et cadres continentaux et régionaux. Par ailleurs, estime Sako, la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), principal instrument pour le développement de chaînes de valeur régionales durables et intégrées, constitue un cadre de collaboration au sein duquel les processus inclusifs de déploiement de l’économie bleue doivent être actionnés pour favoriser le développement des PME, l’innovation et l’esprit d’entreprise. «Il est important que ces processus se focalisent sur les femmes, les jeunes, les communautés côtières et les autres groupes vulnérables. Cela requiert bien évidemment un dialogue coordonné entre les États et les régions, ainsi que la promotion d’approches circulaires de l’économie en tant que leviers pour l’intégration économique», détaille la commissaire de l’UA qui souligne que l’initiative de la «Ceinture bleue» doit servir à resserrer la coopération et la collaboration sur des thématiques comme la pêche, l’aquaculture marine, le tourisme côtier, le transport maritime et le commerce. La «Muraille bleue» quant à elle devrait constituer le rempart, la barrière par laquelle passent et sont filtrés les échanges économiques avec le reste du monde. Elle doit, par ailleurs, constituer le point de déploiement des stratégies continentales vis-à-vis de questions globales à l’instar des changements climatiques, l’acidification des océans et la préservation des écosystèmes marins. Pour Sako, la mise en œuvre par les États africains du Traité sur l’exploitation des ressources marines au-delà des juridictions nationales (BBNJ) et la négociation des accords de pêche, sont également deux sujets de l’heure à considérer dans le cadre de la «Grande Muraille bleue».
La Commission de l’UA plaide, en outre, pour une mise en synergie de toutes les initiatives en cours en vue d’une «dynamique concertée» qui harmonise la production alimentaire et la création d’emplois sur le continent. Dans cette optique, Sako appelle la Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD) et les autres institutions financières en plus des partenaires de l’Afrique à se saisir des diverses et nombreuses opportunités d’investissements qu’offre le continent, aussi bien pour la mise en place d’infrastructures structurantes que pour l’accompagnement du secteur privé y compris les petits producteurs. La Commission de l’UA formule, par ailleurs, 3 recommandations majeures pour consolider les performances en matière de production alimentaire et de création d’emplois liés au secteur de l’économie bleue. Concrètement, Sako suggère de cartographier les secteurs d’emplois traditionnels et émergents en économie bleue et les besoins en recherche et infrastructures structurantes. Il s’agit, également, de donner une valeur marchande aux niches de développement des systèmes de production alimentaire bleu et identifier et cataloguer les demandes des marchés nationaux et à l’export en produits alimentaires et emplois bleus. Le tout assorti d’un renforcement des cadres et instruments juridiques nécessaires aux échanges commerciaux avec l’extérieur et à l’investissement dans les chaînes de valeur bleues et au développement des PME.
Produits de la mer : la consommation africaine est 2 fois inférieure à la moyenne mondiale
Le constat est sans appel. En dépit de l'étendue de ses ressources aquatiques, marines et continentales, la contribution de l’Afrique à la production halieutique mondiale demeure dérisoire : 11,4% pour la pêche de capture et seulement 2,3% pour l’aquaculture. Pour Sadiki comme pour bon nombre d’experts et officiels africains, ces chiffres sont bien en deçà des besoins alimentaires du continent, qui demeure un importateur net de produits aquatiques. En effet, la consommation moyenne de produits de la mer en Afrique (10 kg/habitant/an) est deux fois inférieure à la moyenne mondiale (20,5 kg/habitant/an). Selon la FAO, pour maintenir ce niveau de consommation d’ici 2050 sans accroître sa dépendance des importations, le continent n’a d’autres choix que d’augmenter sa production halieutique de 83%.
Atteindre la moyenne mondiale actuelle, un objectif hautement souhaitable, impliquerait donc de tripler la production actuelle. «Il est donc impératif de renforcer en profondeur le système de production alimentaire aquatique afin d’affranchir durablement l’Afrique de sa dépendance des importations, garantir sa souveraineté alimentaire et, in fine, augmenter sa consommation en produits de la mer», recommande le ministre marocain. Selon la Banque mondiale, l’économie bleue représente en Afrique un potentiel de développement économique en or. Le fait est qu’environ 38% des populations du continent vivent à moins de 100 km des côtes et dépendent des ressources marines pour l’alimentation, les emplois et les revenus. Pourtant, ces ressources sont menacées par la pollution, la surexploitation des pêcheries en plus des effets liés aux changements climatiques. Ce qui met en péril des millions de moyens de subsistance et compromet la sécurité alimentaire sur le continent.
Pour faire face à ces défis, l’Union africaine (UA), à travers son Agenda 2063 et l’Agenda 2030 des Nations unies, encourage les pays de l’Afrique à se tourner vers une croissance verte et bleue, en exploitant durablement leurs ressources marines. D’après l’UA, en Afrique, l’économie bleue génère en moyenne plus de 296 milliards de dollars et 49 millions d’emplois. Selon les projections, ces chiffres monteraient respectivement à 405 milliards de dollars et de 57 millions d’emplois d’ici 2030.
Verbatim
Omar Hilal, Représentant permanent du Maroc aux Nations unies
«Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’Assiste, a toujours mis la coopération Sud-Sud au cœur de sa politique de solidarité avec le continent africain. Sous Son Leadership et Ses Hautes Orientations, le Maroc a établi des partenariats stratégiques visant la souveraineté alimentaire africaine. Et ce grâce au partage de son savoir-faire scientifique en matière de pêche et d’aquaculture durables, l’assistance technique aux pays côtiers et insulaires ainsi que la formation des ingénieurs et des cadres. Cette politique d’engagement solidaire du Royaume a été renforcée par l’Initiative de Sa Majesté, lors du Premier Sommet africain de l’action de la COP 22. C’est durant ce Sommet que la Commission Climat des États insulaires et la Commission du Bassin du Congo et de la région du Sahel ont été créées. L’économie bleue ne doit pas être appréhendée à l'aune des pays côtiers uniquement. En effet, dans un monde globalisé avec une économie mondialisée, les pays africains les moins avancés et ceux sans littoral doivent également être intégrés et ne pas les laisser pour compte dans l’équation de la sécurité alimentaire aquatique».
Josefa Sacko, commissaire à l’Agriculture, au développement rural, à l’économie bleue et à l’environnement durable au sein de l’Union africaine
«Au nom de Son Excellence, Moussa Faki Mahamat, Président de la Commission de l’Union Africaine, je voudrais particulièrement remercier le Royaume du Maroc et son Illustre Souverain, Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’Assiste, pour la tenue de ces Assises ici à Tanger, ville côtière remplie d’histoire portuaire et de pêche maritime. L’Initiative de la “Ceinture bleue”, lancée par le Royaume, doit servir à resserrer la coopération et la collaboration sur les thématiques comme la pêche, l’aquaculture marine, le tourisme côtier, le transport maritime et le commerce (...) La Commission de l’UA plaide pour une mise en synergie de toutes les initiatives en cours en vue d’une dynamique concertée qui harmonise la production alimentaire et la création d’emplois sur le continent. Dans cette optique, la Banque Mondiale, la Banque africaine de développement, les autres institutions financières et les partenaires de l’Afrique sont appelés à se saisir les diverses et nombreuses opportunités d’investissements qu’offre le continent, aussi bien pour la mise en place d’infrastructures structurantes que pour l’accompagnement du Secteur privé y compris les petits producteurs.»