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Inflation, durcissement monétaire et croissance : La DG du FMI et Abdellatif Jouahri sur la même longueur d’onde

À la veille de son Assemblée annuelle, prévue cette semaine en présence de ses 190 pays membres, dont le Maroc, le Fonds monétaire international alerte sur le risque grandissant de récession dans le monde. Sa directrice générale, Kristalina Georgieva, appelle les pouvoirs publics à prendre trois mesures dans l’immédiat. D’abord, en dépit des conséquences douloureuses à court terme, les banques centrales doivent riposter face à l’inflation, sans un durcissement excessif et trop rapide de la politique monétaire, afin d’éviter des conséquences encore plus douloureuses et plus durables sur les ménages et les entreprises. C’est ce qui a été dit par Abdellatif Jouahri à l’issue du dernier Conseil de Bank Al-Maghrib. Kristalina Georgieva appelle aussi à plus de convergences entre les missions Banque centrale-Gouvernement en période d’inflation, en prenant des mesures budgétaires à la fois provisoires et ciblées pour maintenir le pouvoir d’achat et soutenir la croissance. Enfin, le FMI préconise un soutien aux pays émergents et en développement face au triple choc de l’appréciation du dollar, de la hausse des coûts de l’emprunt et de l’augmentation des sorties de capitaux.

Inflation, durcissement monétaire et croissance : La DG du FMI et Abdellatif Jouahri sur la même longueur d’onde
Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI et Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib

À la veille de son Assemblée annuelle, qui réunira  cette semaine ses 190 pays membres, dont le Maroc, le Fonds monétaire international (FMI) alerte sur des perspectives économiques mondiales et régionales qui s’assombrissent davantage. L’inflation est devenue plus persistante alors que le durcissement des conditions financières et les contraintes accentuées sur l’offre ont ralenti la croissance. D’ailleurs, la semaine prochaine, dans sa mise à jour des Perspectives de l’économie mondiale, le FMI va réviser encore à la baisse ses prévisions de croissance pour 2022 et 2023. Il signale, même, une augmentation des risques de récession dans plusieurs pays qui, pris ensemble, représentent environ un tiers de l’économie mondiale. Et même «là où l’économie continuera de croître, la situation sera vécue comme une récession, sous l’effet de la baisse des revenus réels et de la hausse des prix», avertit Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI. Le Fonds recommande ainsi à ses pays membres de prendre 3 mesures dans l’immédiat afin de revitaliser l’économie et renforcer sa résilience à l’heure où les fragilités s’accroissent d’une manière historique.

Premièrement, il convient de garder le cap dans la lutte contre l’inflation. Celle-ci reste élevée, tenace et généralisée, et c’est pourquoi les banques centrales doivent riposter. «Dans le contexte actuel, il est effectivement judicieux d’agir de manière décisive, alors même que l’activité économique ralentit inexorablement. Cette tâche est ardue et aura des conséquences douloureuses à court terme, mais il faut en passer par là pour éviter des conséquences encore plus douloureuses et plus durables pour tout le monde», prévient Kristalina Georgieva. La DG du FMI et Abdellatif Jouahri sont sur la même longueur d’onde.  Lors du point de presse post-Conseil de Bank Al-Maghrib, tenu le 27 septembre à Rabat. Jouahri avait dit : «il vaut mieux payer un prix léger en agissant rapidement et efficacement sur l’inflation à travers le rehaussement du taux directeur, plutôt que d’attendre et de la voir se généraliser et durer. Si l’inflation se généralise et dure, nous serons obligés de prendre des mesures encore plus draconiennes avec des conséquences plus endommageables à la fois sur les particuliers et les entreprises». Cependant, précise Kristalina Georgieva, dans ce domaine, des erreurs de politique économique pourraient avoir des conséquences désastreuses. Selon la DG du FMI, un durcissement insuffisant de la politique monétaire aurait pour effet de laisser l’inflation s’installer dans la durée et entraînerait le désancrage des anticipations d’inflation, ce qui nécessiterait à l’avenir de relever bien davantage et plus longtemps les taux d’intérêt, au risque de causer des dommages irréparables pour la croissance économique et la population.

À l’inverse, un durcissement excessif et trop rapide de la politique monétaire risquerait de faire basculer les pays dans une récession prolongée. Et là aussi, pour éviter un durcissement excessif et trop rapide de la politique monétaire, l’option d’une hausse de 75 points de base a été abandonnée par Bank Al-Maghrib, tout en continuant à suivre de plus près l’évolution des données.

Politique budgétaire responsable et protectrice des plus fragiles

Kristalina Georgieva semble, aussi, appuyer Abdellatif Jouahri lorsqu’il avait souligné que «les missions des banques centrales, c’est de lutter contre l’inflation, de ramener les prix à un niveau compatible avec une croissance inclusive et durable… et que le soutien du pouvoir d’achat et de la croissance, relève, lui, de la responsabilité du gouvernement». En effet, cette idée de «convergences des missions Banque centrale-Gouvernement en période d’inflation» a été également abordée par la patronne du FMI. Selon elle, et c’est la deuxième priorité immédiate, les gouvernements doivent mettre en œuvre une politique budgétaire responsable et protectrice des plus fragiles, sans alimenter l’inflation. «Étant donné la gravité de la crise du coût de la vie, les pouvoirs publics doivent prendre des mesures budgétaires à la fois provisoires et qui s’adressent de manière très ciblée aux ménages les plus pauvres.

Dans les pays où les prix de l’énergie sont susceptibles de rester élevés, les pouvoirs publics peuvent aider directement les ménages à revenu faible ou intermédiaire, en ayant le moins possible recours à la réglementation des prix, une pratique à la fois coûteuse et inefficace lorsqu’elle est utilisée dans la durée», note Kristalina Georgieva. Néanmoins, à ses yeux, il faut absolument s’abstenir de prendre des mesures de soutien budgétaire à tout vent, car à grande échelle, elles stimulent la demande de telle sorte qu’il devient encore plus difficile de juguler l’inflation.

Rappelons que le wali de Bank Al-Maghrib a également contesté la politique des subventions généralisées régulières et sans ciblage, tout en évoquant le retard dans le lancement du Registre social unifié. «Nous avons besoin d’un ciblage pour que les personnes qui ont réellement besoin d’aide puissent en bénéficier et pas les autres… Nous devons aussi avoir le courage de dire quelle est la limite des aides à accorder. C’est à ce moment-là que l’État aura une image budgétaire qui permettra de faire les arbitrages nécessaires», a-t-il indiqué.
Pour Kristalina Georgieva, «associer une politique monétaire restrictive à une politique budgétaire expansionniste revient à appuyer en même temps sur la pédale de frein et sur l’accélérateur. Il s’agirait là d’une conduite dangereuse de la politique économique». 

Flexibilité du taux de change

Concernant la troisième recommandation du FMI, elle consiste à soutenir collectivement les pays émergents et en développement face au triple choc de l’appréciation du dollar, de la hausse des coûts de l’emprunt et de l’augmentation des sorties de capitaux. La probabilité de sorties de portefeuille en provenance des pays émergents au cours des trois prochains trimestres a augmenté jusqu’à 40%. Cette situation pourrait poser de graves difficultés aux pays dont les besoins de financement extérieur sont élevés. «Pour y remédier, il convient de maintenir la flexibilité du taux de change, mais les pays gagneraient également à adopter une approche plus volontariste et à prendre des mesures de précaution avant qu’une crise n’apparaisse», explique la DG du FMI. À ses yeux, il est essentiel de prendre toutes ces mesures dans l’immédiat, mais elles ne suffiront pas pour revitaliser l’économie mondiale et renforcer la résilience à l’heure où les fragilités s’accroissent. Il faut aussi engager des réformes porteuses de transformations afin de fabriquer un nouveau tissu économique et social plus solide et plus résistant face aux tensions que connaît le monde. 

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